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Entretien avec Rolf Bürkl, économiste, spécialiste du marché allemand chez GfK

Le Moci. Il y a trois ans, vous insistiez sur la montée de la consommation privée dans votre pays. Est-ce que cette tendance, nouvelle à l’époque, s’est renforcée ?

Rolf Bürkl. La consommation privée, qui a augmenté de 2,4 % pendant le premier trimestre par rapport aux trois premiers mois de 2014, est devenue le moteur principal de l’économie allemande. Le commerce de détail est très dynamique, avec une hausse de 3,6 % au premier trimestre, 3,1 % sur quatre mois. Il représente dorénavant environ un tiers de la consommation privée et la consommation privée contribue à 57-58 % du produit intérieur brut. L’investissement n’est pas aussi dynamique qu’il devrait l’être. La situation en Russie et en Ukraine ou encore au Moyen-Orient, le ralentissement de la Chine, la mauvaise santé de l’économie brésilienne, tout ce qui est mauvais pour nos exportations l’est aussi pour nos investissements, même si nos exportations se portent bien pour le moment, notamment dans l’automobile. Certains observateurs pensent que l’on va vers un ralentissement général. Ce qui est vrai, c’est que les signaux venant des États-Unis ne sont pas très clairs et que les entreprises sont plutôt en matière d’investissement dans une phase d’attente. Par ailleurs, les importations progressent aujourd’hui plus vite que les exportations, ce qui est bon pour la consommation. En étant un peu ironique, je dirais que l’on est en train de faire beaucoup pour en finir avec le modèle allemand basé sur l’export. Ce qui ne signifie pas qu’il ne jouera pas encore un rôle important dans le futur. Mais dans quelle mesure exactement, c’est difficile à prévoir. Gardons à l’esprit que la consommation ne suffira pas à alimenter l’économie, car le marché domestique n’est pas suffisant, l’Allemagne n’a pas la taille des États-Unis.

 

Le Moci. L’inflation semble légèrement remonter. Ne craignez-vous pas que la consommation privée en souffre ?

R.B. Oui. Les projections économiques de cette année sont une croissance du produit intérieur brut de 1,8 à 2 % et de la consommation privée de 2 à 2,5 %, sauf chez Gfk. Notre société privilégie un scénario plus conservateur de + 1,5 % de la consommation privée. Je suis prudent parce que l’inflation a déjà grimpé de 0,1 % en janvier, 0,3 % en mars 0,5 % en avril et 0,7 % en mai, ce qui reste des taux bas, mais qui est suffisant pour entraîner une baisse de la consommation domestique. Deuxième élément, l’effet positif de la diminution des prix de l’énergie va s’estomper dans la deuxième partie de l’année. Troisième argument, la baisse de l’euro renchérit le coût de nos importations. Enfin, les commerçants pourraient être tentés d’augmenter leurs prix en période d’économie haute. Ce serait un moyen de répercuter les augmentations salariales passées et à venir. On table cette année sur des hausses de l’ordre de 2,5 %, 3 %, voire plus. D’après l’Office fédéral des statistiques Destatis, le coût du travail a progressé de 3,2 % au premier trimestre.

 

Le Moci. Vous annoncez des hausses de prix, alors que le niveau général de prix est bas en Allemagne, notamment dans l’alimentation.

R.B. Il y aura des différences selon les secteurs. Je ne crois pas que dans l’alimentation çà changera beaucoup, car la concurrence est très forte. Il y a, cependant, comme dans les autres secteurs, une recherche de qualité. Ajoutez-y le bon niveau de revenus et les performances très satisfaisantes du marché du travail. L’Allemagne est le seul pays avec un taux de chômage, inférieur au niveau d’avant crise, soit 2,7 millions de chômeurs. Objectivement, les conditions sont favorables à une hausse des prix.

 

Le Moci. Dans quels secteurs la consommation privée augmente-t-elle le plus rapidement ?

R.B. La construction étant vigoureuse, tout ce qui touche à la maison, appareils ménagers, meubles, a le vent en poupe. Les livres sont aussi boostés par l’e-commerce, en revanche, quasiment absent de l’alimentation, à l’exception un peu du vin et de l’alimentation animale. Le livre, les appareils électroniques, l’habillement profitent de la montée de l’e-commerce. De façon générale, les ventes en ligne restent très dynamiques, même si elles ne peuvent plus connaître les évolutions du passé de 10 à 20 % par an. Le crédit à la consommation a également affiché une croissance significative en 2014. Le marché du travail étant stable, la population active n’a pas peur de perdre son emploi, ce qui se ressent dans les achats et dans le crédit, notamment dans l’automobile.

Propos recueillis à Nuremberg par François Pargny

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