A l’occasion de la réunion des ministres du Commerce du G20, prévue à Bali les 21 et 22 septembre, Olivier Becht effectuera du 18 au 27 septembre une tournée en Asie-Pacifique, zone considérée comme stratégique par la France, qui l’amènera en Australie, en Indonésie et à Singapour. Diplomatie économique, export et attractivité seront au menu.
Pour le ministre en charge du Commerce extérieur, de l’attractivité, et des Français de l’étranger, ce sera le premier vrai déplacement officiel à l’étranger dans ses nouvelles fonctions, après le tour de chauffe effectué dans la délégation accompagnant le président Macron fin juillet au Cameroun, au Bénin et en Guinée Bissau.
Une première occasion aussi de mettre en pratique la stratégie de « porte à porte » qu’il avait annoncée lors de la présentation, le 5 août dernier, des résultats catastrophiques du commerce extérieur. « Le contexte de crise nous oblige à nous mobiliser davantage pour soutenir nos entreprises à l’export, notamment les PME et les ETI, grâce au collectif de la Team France Export, avait déclaré Olivier Becht. J’effectuerai moi-même un travail de terrain, un « porte à porte » pays par pays, pour promouvoir nos entreprises. Ma priorité sera de garantir, dès l’origine, les débouchés exports de nos filières stratégiques et d’attirer en France tous les talents et les investissements dont nous aurons besoin. »
Australie, reconstruire après la crise « Aukus »
Avec l’Australie, tourner définitivement la page de la crise diplomatique déclenchée par l’affaire « Aukus », référence à l’annulation brutale, mi-septembre 2021, d’un grand contrat pour la construction de sous-marins avec Naval group, est la priorité.
Le changement de Premier ministre à Canberra en mai dernier a favorisé la reprise des contacts bilatéraux à haut niveau, tant l’ancien chef du gouvernement australien, le conservateur Scott Morrisson, à l’origine de la décision d’annulation de ce grand contrat stratégique (56 milliards d’euros) signé cinq ans plus tôt, était devenu persona non grata à Paris.
Après la prise de fonction du travailliste Anthony Albanese, le dialogue a repris, Paris et Canberra sont tombés d’accord fin juin sur un montant d’indemnisation à la partie française -555 millions d’euros -, et le nouveau Premier ministre australien a été reçu à l’Elysée début juillet pour sceller la réconciliation. « On n’en est plus à la réconciliation, on est passé à l’étape reconstruction », souligne-t-on dans l’entourage d’Olivier Becht.
Une forte présence française
Le ministre du Commerce extérieur est en l’occurrence en charge du volet économique de cette « reconstruction ». Durant son déplacement, du 18 au 20 septembre, sa mission sera de poser les « premières briques » de la relance du partenariat stratégique mis en suspens durant près d’un an. Le terreau est déjà en place : les courants d’affaires entre la France et l’Australie, qui génère le sixième plus important excédent commercial de l’Hexagone dans le monde, n’ont pas cessé durant la période de glaciation.
On y compte 600 filiales françaises, avec la quasi-totalité du CAC 40 mais aussi de nombreuses ETI et PME, qui emploient près de 60 000 personnes. Elles prospèrent dans des secteurs comme la mobilité urbaine avec des exemples comme Transdev (infrastructures, gestion et exploitation de réseaux), l’eau, l’assainissement, l’aéronautique, les biens de consommation (cosmétique, pharmacie, produits alimentaires) et, de plus en plus, les énergies renouvelables.
A cet égard, deux sujets seront au cœur de la visite d’’Olivier Becht, qui aura des entretiens avec les autorités du New South Walls et son homologue Don Farrell : la promotion des savoir-faire français dans l’hydrogène, alors que les Australiens veulent en produire et en exporter, et, en sens inverse, un renforcement de la coopération entre les deux pays dans l’approvisionnement en terres rares, dont l’Australie regorge, les Français proposant de développer une filière décarbonée en commun. Le ministre français visitera les installations de Neoen, producteur français indépendant d’énergie solaire, et rencontrera à Sydney la communauté d’affaires française.
En Asean, diplomatie et attractivité
L’étape indonésienne, du 20 au 23 septembre, sera, elle partagée entre un bref agenda bilatéral en vue de relancer les relations économiques et commerciales, et la réunion des ministres du Commerce du G20 à Bali, qui vise notamment à se pencher sur la situation du commerce mondial et à préparer des positions communes sur les réformes que doit mener l’OMC.
Dans ce grand pays en développement de 200 millions d’habitants, au cœur de l’Asean, où 180 filiales françaises de grandes entreprises sont déjà implantées (Danone, Schneider Electric, Saint-Gobain, Egis, Décathlon, Michelin…), l’ambition de la France est notamment d’augmenter la présence des PME. Le ministre a d’ailleurs prévu de revenir en Indonésie dans les prochains mois pour une visite bilatérale plus longue.
Enfin, à Singapour, la priorité d’Olivier Becht sera plutôt de promouvoir l’attractivité de la France, de son plan France 2030 et de ses startups auprès des Singapouriens. Il s’agira notamment de viser les deux grands fonds d’investissement de la Cité Etat, GIC et surtout Temasek, qui a déjà investi 2,5 milliards d’euros en France sous la forme de prise de participation minoritaires et à long terme, et dont il doit rencontrer le P-dg le 26 septembre.
Cette visite dans ce hub moderne du commerce international qu’est Singapour, irriguant toute l’Asie du Sud-Est, et qui génère le deuxième excédent commercial de la France dans le monde, comportera toutefois un petit volet commerce extérieur sous la forme d’une participation à une table ronde avec les responsables régionaux en Asie de l’écosystème export français. Au programme : décarbonation, luxe, agroalimentaire, logistique, énergies renouvelables.
La délégation officielle qui accompagnera le ministre dans différentes étapes de cette tournée comportera une petite liste de représentants d’entreprises n’ayant pas d’implantations locales. Elle était en cours de finalisation quelques jours avant son départ.
Christine Gilguy