Le Conseil de l’Union européenne (UE) a adopté, le 23 octobre, le règlement visant à aider l’UE et ses États membres à se protéger contre la coercition économique exercée par des pays tiers. Ce nouvel instrument de défense commercial devrait entrer en vigueur avant la fin de l’année.
Pour rappel, la coercition économique est définie par l’Union européenne (UE) comme « une situation dans laquelle un pays tiers tente de faire pression sur l’UE ou un État membre pour qu’il fasse un choix particulier en appliquant ou en menaçant d’appliquer des mesures affectant le commerce ou l’investissement à l’encontre de l’UE ou d’un État membre. »
Exemple typique de ce type de pression : la Lituanie en 2021. Après avoir autorisé Taiwan à ouvrir un bureau à Vilnius, fin novembre 2021, le petit pays balte s’était vu infliger par la Chine de Xi Jinping des représailles diplomatiques sévères (quasi rupture des relations diplomatiques) et des sanctions commerciales plus ou moins transparentes, revenant à un véritable embargo larvé sur les exportations lituaniennes dans l’ex. empire du milieux.
L‘instrument anti-coercition (IAC ou ACI pour le sigle anglais) est censé avoir un effet dissuasif sur ces pays tiers sournois, et mettre fin à ces agissements. Il s’agit donc de « désamorcer la situation et inciter à l’abandon des mesures coercitives en matière de commerce et d’investissement par le dialogue » rappelle un communiqué du Conseil.
Avec ce règlement, « lorsque cela n’est pas possible, et en dernier recours, l’UE sera en mesure d’adopter des contre-mesures telles que l’imposition de restrictions commerciales, sous la forme, par exemple, d’une augmentation des droits de douane, de licences d’importation ou d’exportation, de restrictions au commerce des services ou à l’accès aux investissements directs étrangers ou aux marchés publics » complète-t-il.
« La nouvelle législation fera de l’UE une puissance commerciale plus forte et plus souveraine, mieux équipée pour dissuader et, si nécessaire, contrer les mesures commerciales coercitives des pays tiers à l’encontre de l’UE et de ses États membres » considère Héctor Gómez Hernández, ministre espagnol de l’Industrie, du Commerce et du Tourisme par intérim.
L’aboutissement d’un chantier législatif lancé fin 2021
La Commission européenne a proposé cette législation anti-coercition le 8 décembre 2021 à la demande du Conseil et du Parlement européen, quelques semaine après le déclenchement d’une crise entre la Lituanie et la Chine liée à l’ouverture d’une représentation de Taiwan à Vilnius. Le mandat de négociation du Parlement européen a été adopté le 19 octobre 2022, tandis que la position de négociation du Conseil a été arrêtée le 16 novembre 2022. Un accord politique interinstitutionnel a été conclu le 28 mars 2023. Le 3 octobre 2023, le Parlement européen a donné son feu vert au règlement. La décision prise le 23 octobre par le Conseil a été adoptée en tant que point sans discussion lors d’une réunion des ministres de l’Agriculture et de la Pêche de l’UE.
En pratique, le nouvel instrument peut être déclenché par un large éventail de pratiques économiques coercitives lorsqu’un pays tiers applique ou menace d’appliquer une mesure affectant le commerce ou l’investissement afin d’empêcher ou d’obtenir la cessation, la modification ou l’adoption d’un acte particulier par l’Union ou un État membre. « Les commentaires des intervenants seront pris en compte dans l’activation de l’instrument, et les entreprises sont encouragées à fournir des informations pertinentes » précise le communiqué du conseil.
Le Conseil participera de manière significative au processus décisionnel et déterminera l’existence d’une coercition économique. De son côté, la Commission européenne se verra conférer des pouvoirs d’exécution dans les décisions relatives aux mesures de réponse de l’UE, tout en veillant à ce que les États membres soient davantage impliqués dans ces décisions.
L’IAC et toutes les mesures qui peuvent être prises en vertu de cet instrument sont conformes aux obligations internationales de l’UE et pleinement fondées sur le droit international, précise encore le communiqué du Conseil.
Prochaine étape : la signature du règlement, qui est prévue le 22 novembre prochain et entrera en vigueur 20 jours après sa publication au Journal officiel de l’UE (JOUE).
C.G