Les règles d’origine de la convention Paneuromed (PEM), qui regroupe l’Union européenne (UE) et une vingtaine de pays africains et moyen-orientaux, sont appelées à être modifiées le 1er septembre. Elles étaient au programme d’un webinaire organisé le 22 juin par la Douane sur les accords commerciaux. Le Moci fait le point.
Aller vers plus de souplesse et de fluidité sur les règles d’origine. Telles sont les objectifs des évolutions proposées par la Commission européenne en août 2020 et qui entreront en vigueur le 1er septembre.
Cette « modernisation » de la convention aura pour conséquence des droits de douane nuls dans certains secteurs afin de faciliter les échanges commerciaux. Une bonne nouvelle pour les entreprises françaises présentes dans les pays de cette vaste zone géographique. Et l’aboutissement d’un long travail.
En 1995, le partenariat Europe-Méditerranée (ou « processus de Barcelone »), lancé à l’initiative de l’UE et de dix pays méditerranéens pour former le cadre institutionnel de la politique l’UE dans la région, ambitionne l’application de mêmes règles d’origine et leur cumul. Mais il faudra attendre 2012 et la signature de la convention PEM pour voir disparaître les protocoles d’origines séparés et faciliter ainsi l’accessibilité des pays voisins grâce au cumul diagonal.
Une harmonisation complexe
Ainsi, les produits ayant obtenu le caractère originaire dans l’un des pays de la zone peuvent être transformés dans un deuxième pays et acquérir l’origine préférentielle de ce deuxième pays pour l’exportation vers un troisième pays, à condition de respecter les règles d’origine de la convention Paneuromed.
Une volonté d’harmonisation louable, mais plus compliquée qu’il n’y paraît en pratique.
« Il s’agit d’un cumul à géométrie variable puisqu’il s’applique uniquement entre des pays ayant signé des accords bilatéraux, remarque Karine Boris-Treille, adjointe au Bureau de la politique tarifaire et commerciale de la direction générale des Douanes. Par exemple, l’Algérie n’a d’accord du type PEM qu’avec l’UE, il n’y a donc pas de cumul diagonal possible avec ce pays et seul le cumul bilatéral avec l’UE s’y applique. »
Au 1er septembre, le principe de cumul régional sera assoupli grâce à l’introduction du cumul total pour la plupart des produits. La zone des pays participant au cumul constituera un seul et même territoire en matière d’origine. La règle d’origine sera satisfaite si les transformations des matières premières (les « ouvraisons cumulées »), réalisées dans plusieurs pays de la zone, constituent une transformation suffisante.
D’autres nouveautés
Il s’agit de la principale évolution, mais non la seule. Parmi les autres nouveautés apportées par cette convention modernisée on peut citer :
– La hausse de la tolérance (le seuil des matières non originaires) qui passe de 10 % à 15 %, en poids ou en valeur.
– La durée de validité des preuves d’origine, qui passe de 4 à 10 mois.
– Le cas particulier du textile, dont les activités de sous-traitance sont très importantes, notamment en Tunisie : il peut déroger au principe de territorialité et est l’unique secteur pour lequel l’interdiction des ristournes n’est pas supprimée.
Tous les pays n’adhèreront pas à ces nouvelles règles
La question de l’harmonisation des règles d’origine semble donc réglée. Sauf que, comme le rappelle Karine Boris-Treille « seuls 21 pays sur 24 ont accepté ces règles modernisées et comme l’Algérie, le Maroc et la Tunisie n’en ont pas voulu, on parle de règles transitoires ». Autant dire que quelques complications supplémentaires vont donc subsister.
Les règles modernisées ne s’appliqueront qu’entre les partenaires ayant amendé leurs protocoles bilatéraux pour les intégrer. Les opérateurs de ces pays auront le choix, pour chaque flux, de solliciter la préférence tarifaire sur la base des règles modernisées ou sur celle des règles actuelles.
Avec les pays n’ayant pas accepté les règles modernisées, les opérateurs n’auront pas le choix : seules les règles actuelles trouveront à s’appliquer. Ce sera donc le cas avec l’Algérie, le Maroc et la Tunisie.
« Au 1erseptembre vont donc coexister deux ensembles de règles jusqu’à ce que tous les pays adhèrent aux règles modernisées, résume Karine Boris-Treille. La Commission européenne réfléchit actuellement à un assouplissement de ces nouvelles règles ».
Certains l’espèrent, à l’instar de Joëlle Da Fonseca-Ruellan, responsable des affaires économiques et européennes à l’Union des industries textiles (UIT), qui observe « d’autres accords commerciaux passés par l’UE, avec le Japon ou la Corée par exemple, ont adopté des règles d’origine beaucoup plus avantageuses que pour nos partenaires de la zone Paneuromed »…
Sophie Creusillet
* Les pays de la zone Paneuroméditerranée sont : l’UE, l’AELE, la Turquie, les Iles Féroé et les pays de l’Euromed : Algérie, Maroc, Tunisie, Egypte, Israël, Jordanie, Liban, Syrie, Cisjordanie et bande de Gaza. Il convient désormais d’ajouter : Albanie, Bosnie-Herzégovine, Ancienne République yougoslave de Macédoine (Macédoine du Nord), Monténégro, Serbie, Kosovo, République de Moldavie, Géorgie et Ukraine.
Pour plus d’informations :
– les pages dédiées du site de la Douane
– La note aux opérateurs de la direction générale des douanes
– l’outil ROSA (Rules of Origin Self-Assessment) sur le site Access2Markets de la Commission européenne