Malgré l’actuelle pause de trois mois de la guerre commerciale entamée par l’administration Trump, les exportateurs sont inquiets. Selon la dernière édition du baromètre d’Allianz Trade, ils sont 60 % à anticiper des conséquences négatives. Leurs inquiétudes portent en particulier sur la capacité de leurs clients à les payer en temps voulu. Voire à les payer tout court.
Sept jours. C’est l’allongement moyen des délais de paiement auquel s’attendent 25 % des répondants de l’enquête annuelle de l’assureur-crédit Allianz Trade, menée auprès de 4500 exportateurs dans 9 pays* (60 % du PIB mondial). En outre, 48 % des exportateurs interrogés s’attendent à une augmentation du risque de non-paiement, une crainte exprimée en particulier aux États-Unis, en Italie et au Royaume-Uni.
Les sondés français se montrent plus optimistes puisque « seuls » 24 % d’entre eux partagent cette inquiétude. Ils s’attendent cependant à une augmentation des défaillances de 11 % en Allemagne et 17 % en Italie.
Toutes nationalités confondues, ils ne sont en moyenne que 11 % d’exportateurs à parvenir à se faire payer dans les 30 jours. Ce pourcentage est par ailleurs nettement inférieur dans les principaux pays exportateurs (États-Unis, Chine et Allemagne).
Les entreprises font la banque
Pour le reste, environ 70 % des entreprises interrogées sont payées entre 30 et 70 jours.
L’étude d’Allianz Trade souligne que les grandes entreprises ont plus facilement tendance à proposer des délais plus longs. Ainsi 26 % de celles ayant un chiffre d’affaires supérieur à 5 milliards d’euros font face à des délais supérieurs à 70 jours. « Cela suggère que les grandes entreprises proposent des délais plus longs et tiennent de plus en plus le rôle de banque invisible », note Ana Boata, directrice de la recherche économique chez Allianz Trade.
Ce risque de non-paiement est à mettre en lien avec l’augmentation des coûts supportés par les entreprises. « Les entreprises s’adaptent à cette nouvelle donne, note Ano Kuhanathan, directeur de la recherche sur les entreprises chez Allianz Trade. Seules 18 % se disent prêtes à réduire leur marge pour rester compétitives au lieu d’augmenter leurs prix. Un tiers travaille à la diversification de leurs fournisseurs et la majorité des entreprises disent vouloir relocaliser ou au moins rapprocher leurs unités de production. »
305 milliards de dollars de pertes à l’export
Malgré les différentes stratégies mises en place pour contrer les effets des crises géopolitiques et de la guerre commerciale lancée par les États-Unis, les entreprises s’attendent à une baisse de leur activité à l’international.
« Les chiffres parlent d’eux-mêmes, estime Aylin Somersan Coqui, CEO d’Allianz Trade. Les prévisions positives sur les exportations à l’échelle mondiale sont passées de 80 % à 40 % et 42 % des entreprises d’attendent désormais à une baisse de leur chiffre d’affaires à l’export comprise entre – 2 % et – 10 %, contre seulement 5 % avant les annonces du 2 avril. Malgré les accords bilatéraux conclus récemment avec le Royaume-Uni et la Chine, les pertes mondiales à l’export atteindront 305 milliards de dollars en 2025. »
Sophie Creusillet
* Italie, France, Allemagne, Pologne, Espagne, Royaume-Uni, Singapour, Chine, Etats-Unis.