Prévu le 20 septembre à Bruxelles, le sommet UE/Chine s’annonce sous haute tension. Nouveau sujet de discorde entre les deux partenaires? L’enquête antidumping sur les panneaux solaires importés de Chine, lancée formellement par la Commission européenne la semaine passée.
Celle-ci donne suite à la plainte déposée le 25 juillet par l’association industrielle EU Pro Sun. Composée d’une vingtaine d’industriels européens autour de l’allemand SolarWorld AG, elle avait alors alerté les services de la concurrence à Bruxelles de pratique anticoncurrentielles de la part de la Chine. En 2011, le pays aurait exporté des panneaux et des composants-clés pour les panneaux solaires pour un montant total d’environ 21 milliards d’euros. Or, explique Milan Nitzschke, porte-parole de la coalition « Les compagnies chinoises vendent leurs produits bien en dessous de leur coût de production ». Une « manœuvre » qui engendrerait des pertes colossales « compensées par les subventions accordées par Pékin », précise ce responsable.
Après une valse d’hésitations – entretenue notamment par les pressions exercées par Angela Merkel, favorable à un règlement du différend à l’amiable – l’exécutif européen s’est finalement rangé derrière les industriels européens du secteur confrontés, depuis un an, à une crise majeure : de nombreuses entreprises photovoltaïques ont en effet été contraintes de fermer leurs portes à la suite de la réduction des tarifs de rachat par les autorités.
Mais à l’instar de la chancelière allemande, d’autres acteurs clés du secteur dénoncent les risques d’une nouvelle guerre commerciale. Preuve d’une fracture au sein même de l’UE : la création d’une contre-coalition baptisée The Alliance for Affordable Solar Energy (Alliance pour une énergie solaire abordable) et réunissant des industriels tant européens que chinois. « Le secteur emploie 300 000 personnes au sein de l’UE », souligne Giulio Arletti, PDG de Coenergia, distributeur italien de modules photovoltaïques, qui a récemment pris part à ce groupe d’oppositions. Il ajoute : « Les fournisseurs, fabricants, distributeurs, installateurs, en Europe, subiront de plein fouet les conséquences d’une enquête visant, au final, à protéger quelques acteurs représentant une partie infime de la chaîne de valeur ».
Même son de cloche pour un autre membre de l’Alliance, l’Allemand Thorsten Preugsches, P-dg de Soventix : « De nouvelles barrières commerciales mèneront à l’augmentation des prix et à des dommages, peut-être irréversibles, de la compétitivité du secteur de l’énergie solaire ». Côté chinois, plusieurs firmes concernées par l’investigation, telles que Yingli Green Energy, Suntech Power Holdings, Trina Solar ou Canadian Solar, ont menacé de déclencher une guerre commerciale. Au sein du gouvernement, le ton est plus mesuré. Pékin n’a jusqu’ici fait aucune allusion à d’éventuelles mesures de rétorsion. Le porte-parole du ministère chinois du Commerce, Shen Danyang, s’est contenté d’exprimer ses regrets, laissant entendre que des mesures antidumping contre les exportations chinoises de technologie photovoltaïque pourraient affecter le développement du secteur des énergies renouvelables dans le monde.
L’enquête lancée par la Commission doit durer 15 mois, mais les services de la concurrence à Bruxelles auront la possibilité, au bout de neuf mois, d’instituer des droits antidumping provisoires s’ils considèrent avoir suffisamment d’éléments de preuve démontrant le dumping. Enfin, si le dumping est avéré, l’exécutif européen proposera, au bout des 15 mois, d’instituer des droits antidumping définitifs pour une durée de cinq ans.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles
Pour en savoir plus :
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