Critère de sélection du prix startup exportatrice
Startup ou scale-up ayant, dès le départ, intégré l’international dans son business plan et mis en place une politique d’investissement pour se déployer sur un ou plusieurs marchés étrangers. La croissance de son CA est fulgurante à l’export.
Move’N’See a reçu le 6 décembre à Paris le prix Startup exportatrice de l’année dans le cadre du palmarès 2021 des leaders de l’export. La startup bretonne est devenue en quelques années le leader mondial des robots cameramen automatiques pour les sportifs. Développés et fabriqués en France, ils sont distribués quasi uniquement via le site d’e-commerce de l’entreprise et sont exportés à 95 %*.
C’est une histoire de passions qui a présidé à la naissance de Move’N’See, en l’occurrence celles de son fondateur Éric Willemenot. « De 1990 à 2000, j’ai fait du parachutisme en compétition, le sport qui utilise le plus la vidéo, se souvient le P-dg. Quelques années plus tard, quand je suis arrivé en Bretagne, je me suis mis au surf et j’ai été étonné de constater que personne ne filmait. »
S’adjoindre les services d’un cameraman coûte en effet entre 500 et 800 euros par jour. Un nouveau défi à relever pour cet ingénieur polytechnicien spécialiste de l’instrumentation : créer une solution technique à moindre coût pour pouvoir filmer des rencontres sportives.
« Ça me trottait depuis des mois et un matin je me suis réveillé avec une idée : créer une caméra sans cameraman, un instrument qui filme tout seul. » En 2011, le futur dirigeant quitte son poste de directeur d’un site industriel d’iXblue, une société spécialisée dans les équipements de haute précision, pour se lancer dans l’aventure Move’N’See. Il s’entoure alors d’électroniciens et de mécaniciens pour mettre au point Pixem (pour téléphones et tablettes) et Pixio (caméras).
Ces robots capables de filmer, aussi bien en intérieur qu’en extérieur, les déplacements des sportifs utilisent la triangulation par radio. Le robot et le sujet sont équipés d’émetteurs récepteurs d’une portée de 100 m et évoluent entre trois balises permettant ainsi à la caméra de suivre le sujet en mouvement. Le robot fait automatiquement la mise au point et ajuste le zoom ainsi que le cadrage. « Nous avons été les premiers à mettre cette technologie au point », se félicite le dirigeant, qui a pris soin de la breveter.
Une stratégie 100 % webmarketing intégrant l’international
Pour financer ce projet, le dirigeant compte, outre un apport personnel, sur les banques, le Réseau Entreprendre, Phar Bretagne et Bpifrance. Le Pixio est présenté au CES de Las Vegas de 2015 pendant lequel sont organisées des préventes sur le site marchand de la startup. Une stratégie qui permet de récolter des informations sur les potentiels acheteurs. Avantage de créer un marché : ce sont les clients qui viennent à l’entreprise et non l’inverse.
C’est d’ailleurs une des particularités de Move’N’See : hormis quelques distributeurs, les ventes se font uniquement sur Internet. Le site est disponible en trois langues (français, anglais, espagnol) et deux devises (l’euro et le dollar US). « Nous n’avons toujours pas de commercial et avons développé une stratégie 100 % web, confie Eric Willemenot. Le webmarketing nous a permis de faire de l’international à moindre frais. »
Une stratégie gagnante puisque la startup exporte aujourd’hui 95 % de son chiffre d’affaires dans 70 pays et 45 % rien qu’aux États-Unis. Move’N’See est ainsi devenu l’outil officiel d’entraînement de la Fédération équestre américaine.
Du parachutisme aux églises évangéliques
Les robots cameramen intéressent non seulement les sportifs (75 % des utilisateurs actuels) mais ont également attiré les conférenciers, les enseignants, les adeptes de l’agility ou encore… les églises évangéliques américaines. Le prix de l’équipement (moins de 1 000 euros) permet une large diffusion de ces robots.
Forte de ce premier succès, la startup a développé Pix4Team, un robot capable de filmer des sports collectifs. Grâce à l’intelligence artificielle et à une caméra grand angle, le robot cadre et filme seul les actions sur le terrain. La commercialisation est prévue pour janvier 2022.
Cerise sur le gâteau : cette solution à la pointe de la technologie, vendue moins de 1 000 euros, est entièrement fabriquée à Douarnenez, par Eolane, un EMS (Electronic Manufacturer Services) qui travaille notamment avec Airbus et Thalès. « Nous les avions rencontrés à Las Vegas en 2015. Travailler avec des fabricants asiatiques suppose des coûts cachés, des allers-retours réguliers et un délai d’industrialisation de dix-huit mois alors qu’il est de huit à dix mois en France. » Un choix qui apparaît encore plus pertinent après une pandémie qui a très sérieusement remis en question le Made in China.
Sophie Creusillet
*Article paru dans le magasine Le Moci N°2089, novembre 2021.
LES CHIFFRES CLÉS
CA 2020 : 3 millions d’euros
CAI 2020 : 2,8 millions d’euros
Part de l’international dans le CA : 94 %
Effectif : 20