Business France a tenu un forum d’affaires franco-iraquien à Paris le 26 mai. Malgré des relations anciennes et les besoins de Bagdad pour relancer l’économie du pays, les investissements et les importations tricolores demeurent anecdotiques. Pourtant, les réformes actuelles offrent des opportunités d’affaires.
Le gouvernement irakien souhaite plus d’importations et d’investissements français. C’est, en résumé, ce qu’est venu dire le ministre irakien du Commerce Atheer Dawood Al-Ghrairi aux entreprises venues en nombre assister à ces rencontres d’affaires. « Il faut que les beaux discours et les gentilles paroles que j’entends un peu partout sur notre pays se concrétisent sur le papier », a-t-il exhorté.
De fait les exportations françaises vers l’Irak n’ont atteint que 426 millions d’euros en 2024, mais elles ont cependant bondi de + 26,9 % par rapport à 2023. Elles se composent essentiellement de produits chimiques (en particulier des catalyseurs), de produits alimentaires (tirés par l’alimentation pour nourrissons) et de produits pharmaceutiques (en progression de 17 %). Les importations (1,95 milliard d’euros) sont à 99,6 % composées d’hydrocarbures naturels et de produits pétroliers raffinés.
Développement du secteur privé
A titre de comparaison, l’Irak a importé l’an dernier pour 14 milliards de dollars (Md USD) depuis la Turquie, 16 Md USD depuis la Chine, 12 Mds USD depuis les Emirats arabes unis et 9 Md USD de marchandises en provenance d’Iran. Bref, les entreprises françaises disposent d’une importante marge de progression. D’autant que l’Irak, qui fut longtemps un marché de grands contrats en raison de sa manne pétrolière et une économie étatisée, est en train de changer son fusil d’épaule.
« Le pétrole représente 90 % des recettes publiques et représente entre 45 et 60 % du PIB irakien, en fonction du cours du baril, explique Duncan Toulon, adjoint au chef du Service économique de Bagdad. Les cours étant bas, le FMI prévoit une récession pour cette année avant un redémarrage l’an prochain. Dans ce contexte, le gouvernement met en place des réformes pour développer le secteur privé. »
Même s’il est toujours nécessaire d’avoir un partenaire irakien pour investir sur place, à l’export, les opportunités se développent notamment du fait d’une hausse de la consommation. « Une classe moyenne émerge, non seulement dans la capitale mais aussi dans les grandes villes, précise Arjoun Raj, également adjoint au chef du Service économique de Bagdad. Il y a de la place en Irak, pas que dans la construction et pas que pour les grandes entreprises. Des PME et des ETI sont déjà présentes et il y a maintenant des entreprises irakiennes de confiance. Pour réussir en Irak, il faut y aller ! »
Bientôt un fonds franco-irakien
Pour autant, les experts de ce marché s’accordent à dire qu’il est nécessaire de se faire accompagner, notamment par la Team France Export. Cette dernière multiplie d’ailleurs les initiatives pour emmener davantage de PME et d’ETI sur ce marché en plein essor.
L’agence de crédit export Bpifrance assurance export (BAE) a ainsi signé en mai 2024 avec le gouvernement irakien un accord de garantie prévoyant que BAE couvrira les contrats d’exportation des entreprises françaises avec l’Irak contre-garantis par le ministère des Finances irakien dans le cadre d’une facilité pouvant aller jusqu’à 1 milliard d’euros.
En outre, le Fonds de développement de l’Irak, doté aujourd’hui de 2,5 Md USD, s’apprête à être décliné pour les petites entreprises. « Nous avons signé un protocole d’accord avec Bpifrance pour lancer un fonds franco-iraquien réservé aux PME, détaille son directeur, Mohammed Al-Najjar. Il sera géré par Bpifrance et l’Irak y placera 50 millions de dollars. »
Autre signe d’une forte volonté de rapprochement entre les deux pays : Laurent Saint-Martin, le ministre délégué en charge du Commerce extérieur, doit se rendre en Irak en juillet prochain. Enfin, Sophie Sidos-Vicat, présidente du comité national des Conseillers du commerce extérieur de la France (CCEF) a appelé les entreprises présentes à ce forum à créer un comité de CCEF en Irak. Une initiative qui nécessite un minimum de sept entreprises.
Bref, malgré la bureaucratie et la corruption, c’est le moment d’aller en Irak, d’autant que la concurrence va se durcir…
Sophie Creusillet