SNF, groupe chimiste spécialisé dans la fabrication de polymères hydrosolubles, a décidé de ne plus compter sur la Chine pour approvisionner ses autres marchés géographiques. L’industriel réoriente ses investissements vers l’Inde, la Corée du Sud et les États-Unis.
Leader mondial de la production de polymères hydrosolubles, SNF intervient sur les marchés de la production d’eau potable et du traitement des eaux usées, de l’extraction du gaz et du pétrole, de la fabrication de la pâte à papier, des mines etc.
Avec huit sites industriels de grande taille (un en France dans la Loire, où est installé son siège social monde, deux aux États-Unis, deux en Inde et un en Corée) et 14 sites satellites (Australie, Brésil, Angleterre, etc), le groupe a réalisé en 2021 un chiffre d’affaires de 3,6 milliards d’euros (Md EUR) avec 7 000 salariés (dont 1 500 en France).
Plus de 280 millions d’euros (M EUR) en été investis en 2021 pour déployer ses capacités de production et la tendance 2022/2023 s’annonce sur la même ligne, avec une nouvelle orientation, de plus en plus marquée dans les priorités d’investissement : réduire sa dépendance industrielle par rapport à la Chine.
Desservir l’Asie en s’appuyant moins sur la Chine
« Le marché domestique chinois est extrêmement dynamique, nous avons donc besoin de capacités industrielles sur place, c’est indiscutable. Nous avions deux sites industriels en Chine et nous avons réalisé une croissance externe ce début d’année, portant à 1 800 le nombre de nos salariés en Chine », explique Pascal Rémy, le P-dg de l’entreprise. « Mais il s’agissait de créer de nouvelles capacités de production pour le marché intérieur chinois. En revanche, nous avons décidé de réduire notre dépendance à la Chine pour desservir le reste de la l’Asie ».
Pascal Rémy pointe tour à tour la stratégie chinoise du « zéro Covid », les problèmes suscités par les restrictions énergétiques, les sujets logistiques, la question des transports, etc. Bref, toute une kyrielle de points ayant rendu la Chine moins intéressante car moins fiable désormais.
Les investissements initialement prévus pour la Chine sont donc réorientés vers deux autres pays : la Corée du Sud et l’Inde. En Corée, SNF disposait déjà d’un grand site industriel, il vient d’être renforcé pour desservir l’export asiatique. Le groupe s’appuie par ailleurs sur deux sites en Inde, l’un existant depuis dix ans, l’autre depuis 2021. Un investissement de quelque 50 M EUR supplémentaires vient d’être lancé pour installer deux lignes de production supplémentaires.
Investissements massifs aux États-Unis
« Depuis longtemps, nous travaillons à rendre nos différentes zones d’intervention (Asie-Europe-Amérique du Nord) indépendantes industriellement et commercialement. La situation en Chine nous conforte dans cette stratégie », poursuit Pascal Rémy.
Les États-Unis comptaient déjà deux importants sites industriels pour son marché domestique mais le groupe a décidé d’investir une nouvelle enveloppe de 50 M EUR pour la construction d’une nouvelle ligne de monomères cationiques destinés au marché du traitement de l’eau.
« Nous avions déjà plusieurs lignes sur place mais elles sont insuffisantes. Nous devions faire venir de Chine environ 20% de nos ventes américaines de ces monomères. Ces importations sont devenues difficiles. Les États-Unis seront désormais autonomes et disposeront même de surcapacité, ce qui nous offrira un peu de souplesse pour approvisionner d’autres pays ». Le P-dg du groupe exprime néanmoins quelques inquiétudes sur le lancement de cette nouvelle ligne de production, dans un contexte de recrutement hyper tendu Outre-Atlantique.
Renfort des sites français
En Europe, SNF produisait jusqu’ici essentiellement à Andrézieux-Bouthéon dans la Loire, et de manière plus secondaire à Saint-Avold. Ces deux sites générant à eux deux un chiffre d’affaires de 900 millions d’euros, dont 80 M EUR en France.
Le groupe avait annoncé il y a trois ans sa volonté de construire un troisième site, à Dunkerque cette fois. Cette nouvelle usine, qui a nécessité un investissement de 60 M EUR environ, devrait être opérationnelle fin 2023. « Ce site sera bien positionné pour le transport maritime vers l’Afrique, l’Amérique latine et le Moyen-Orient notamment et pour l’exportation vers le nord de l’Europe » explique le P-dg.
La première ligne sera dédiée à la fabrication de monomères spécifiques pour la fabrication de la pâte à papier. Un investissement supplémentaire de 40 M EUR vient d’être acté pour la fabrication de poudres (produit fini) pour l’export.
Pour 2022, SNF table sur un chiffre d’affaires de l’ordre de 4,5 Md EUR. Une croissance de 25 % donc, tirée en particulier par l’inflation des prix (en Europe) mais aussi par l’augmentation des volumes aux États-Unis et en Asie.
Stéphanie Gallo