Source de tous nos maux, pour les uns, solution miracle afin de surmonter les crises, pour les autres, le modèle qui prévaut dans les échanges internationaux depuis trente ans ne parvient plus à tirer la croissance, constate une étude d’Oxford Economics. Pour le cabinet de conseil britannique, cette slowbalisation relève plus de problèmes structurels que de perturbations passagères.
Depuis la fin de la pandémie de Covid-19, malgré un soubresaut en sortie de crise, le commerce international peine à reprendre son souffle. Si les volumes d’importations mondiales sont restés relativement stables ces cinq derniers mois, ils ont cependant reculé de 3 % depuis leur pic d’août 2022.
Cette faiblesse devrait perdurer au moins jusqu’à la fin de l’année selon l’étude qui pointe néanmoins des indicateurs plus optimistes comme l’augmentation de 16 %, en juin, des volumes de fret aérien en glissement annuel. Idem pour l’indicateur RWI/ISL du fret conteneurisé, en progression de 5 % sur la même période.
Pourtant, il est probable que les bonnes performances du transport aérien de marchandises tiennent essentiellement à la substitution au fret maritime, perturbé par la crise en mer Rouge. Concernant ce dernier, d’autres indicateurs comme le Drewry constatent une croissance beaucoup plus lente du fret conteneurisé.
L’Europe à la traîne
Au-delà de cette tendance générale, la situation des échanges internationaux varie d’une région à l’autre.
Ainsi, de l’atonie des importations européennes qui pèse sur les performances mondiales compte tenu du poids du Vieux contient dans le commerce mondial (environ 14 % du total). Ce ralentissement est également particulièrement marqué au Japon et certaines régions émergentes comme l’Amérique latine, le Moyen-Orient et l’Afrique. « Seule l’Asie hors Chine et Japon, en particulier l’Asie émergente, affiche un taux de croissance du commerce que l’on pourrait attendre d’une reprise mondiale », pointe Oxford Economics.
Reste que, si les facteurs cycliques demeurent importants à court terme, les principaux problèmes rencontrés actuellement par le commerce international seraient d’ordre cyclique, affirme l’étude. Pour preuve, cette dernière souligne le fait que le commerce international n’entraine plus la croissance. Depuis la Seconde Guerre mondiale il a en effet progressé en moyenne 1,5 fois plus vite sur le PIB mais cet effet d’entraînement a perdu de la vigueur depuis la crise financière de 2008.
Des causes structurelles
Selon les calculs d’oxford Economics, une augmentation de 1 % du PIB mondial n’est aujourd’hui plus associée qu’à une hausse de 0,8 % à 0,9 % du commerce mondial de marchandises. Deux observations viennent éclairer ce constat.
Premièrement, la fragmentation géographique de la production et l’intégration de l’Europe de l’Est et de la Chine au processus de mondialisation semblent avoir atteint leur limite. En témoigne la diminution de la part de la valeur ajoutée étrangère dans les exportations chinoises ces dernières années : elle est passée de 22 % en 2008 à 16 % en 2020. Sur la même période, la valeur ajoutée intérieure chinoise induite pas la demande étrangère et passée de 24 % à 14 %.
Deuxièmement, et c’est pour Oxford Economics la principale faiblesse structurelle des échanges mondiaux, le protectionnisme gagne du terrain partout dans le monde. Selon les calculs de l’OMC, les mesures de restriction au commerce cumulées depuis 2009 couvre 12 % des importations du G20 contre 4 % en 2015. La majeure partie de ces mesures sont des barrières non tarifaires et, de plus en plus des subventions ou des mesures prises au nom de la politique industrielle d’un pays. Une tendance parfaitement illustrée par les tensions actuelles entre l’Union européenne et la Chine au sujet des véhicules chinois.
Sophie Creusillet