Le marché allemand est réputé pour sa difficulté de pénétration, notamment sur ses marchés alimentaires, dont beaucoup sont saturés. Pour autant, de nouvelles tendances de consommation pourraient représenter des opportunités réelles pour les entreprises françaises. C’est ce qu’ont expliqué des experts du sujet à l’occasion des Journées Export Agro 2021.
« Le marché alimentaire allemand, c’est un peu comme une noix de coco », sourit Christian Hamm, chef de pôle agrotech pour Business France Allemagne. « Il est très difficile pour les entreprises étrangères de casser la coque mais une fois qu’elles y ont pénétré, le fruit peut être très juteux ».
Et pour cause : avec 83 millions d’habitants, l’Allemagne importe pour 94,54 milliards d’euros de produits alimentaires par an (donnée 2019). Le pays représente d’ailleurs le premier client export de l’agroalimentaire français mais il existe une marge de progression : la France ne se place en effet qu’au quatrième rang des fournisseurs agroalimentaires avec 7,6 % des parts de marché *.
Une marge que les entreprises françaises pourraient aller chercher dans les nouvelles tendances de consommation alimentaire des Allemands. « Même s’il est évident que le marché allemand est mature et saturé sur un certain nombre de points, on voit émerger des évolutions dans les attentes des Allemands, sur lesquelles les entreprises françaises pourraient venir se positionner », assure ainsi Alexander Mannweiler, directeur d’agence Sopexa Allemagne.
Au premier rang desquels la « premiumisation », vague qui commençait à pointer depuis quelques années mais qui s’est vraiment renforcée avec la crise sanitaire. « Les Allemands, comme tout le monde aujourd’hui, ne peuvent plus voyager. Un certain nombre d’entre eux sont prêts à mettre le prix, à payer cher pour s’évader via le culinaire », poursuit Alexander Mannweiler.
Même si au pays du discount, le prix reste toujours la boussole de la plupart des Allemands, cette tendance au premium pourrait donc ouvrir quelques nouveaux débouchés aux produits agroalimentaires français positionnés sur ces créneaux plutôt haut-de-gamme. Dans une étude récente, 58 % des Allemands affirmaient consentir à des prix plus élevés en échange d’une meilleure qualité.
A noter cependant : les labels européens attestant de la qualité des produits sont peu connus en Allemagne, ils ne représentent donc pas une clé d’entrée assurée.
La déferlante du bio et du végétarien
Autres tendances du marché alimentaire allemand : la recherche de produits plus sains et le bio. « L’Allemagne est un très gros consommateur de sucre, mais les lignes bougent. Des marques commencent à s’imposer avec des produits moins sucrés. Des ouvertures sont très certainement à saisir rapidement », souligne encore le directeur de l’agence Sopexa Allemagne.
Dans une optique de santé publique, le gouvernement allemand promeut d’ailleurs une stratégie de réduction et d’innovation pour le sucre, les graisses et le sel dans les produits finis.
De façon plus globale, les Allemands deviennent de plus en plus attentifs aux listes d’ingrédients des produits qu’ils achètent. « Nous sommes implantés en Allemagne depuis 50 ans. Et nous voyons qu’aujourd’hui, la naturalité des produits joue un rôle de plus en plus important dans les critères d’achat des Allemands. Nous mettons en avant nos arguments d’une agriculture durable et d’une liste courte d’ingrédients », explique Aymeric de La Fouchardiere, DG Bonduelle pour l’Allemagne, l’Autriche et la Suisse.
Ce dernier reconnait tout de même que la compétitivité prix reste un sujet majeur pour être distribué dans les grandes et moyennes surfaces (GMS) allemandes. L’Allemagne représente aujourd’hui 8 % du chiffre d’affaires de Bonduelle, qui a acheté deux usines allemandes afin de jouer, en plus, la carte locale.
Autre tendance avec le vent en poupe : la nourriture végane (végétarienne). La demande étant relativement récente, le marché n’est pas encore saturé et peut s’ouvrir aux entreprises françaises. Même si les discounters, tout puissants en Allemagne, se sont bien entendu emparés du sujet.
Le Grand Est monte un accélérateur sur la zone rhénane
Consciente du potentiel que représente encore sa voisine, même si l’Allemagne pèse déjà 14 milliards d’euros sur les 58 milliards exportés par les entreprises de son territoire (tous secteurs confondus), la Région Grand-Est lance ainsi un programme d’accélérateur pour accompagner les entreprises (tous secteurs) dans leur développement sur la zone rhénane.
La première promotion, constituée d’une vingtaine d’entreprises ayant candidaté à l’appel à manifestation d’intérêt, vient d’être mise sur les rails. Le coût de cet accompagnement est pris en charge à hauteur de 50 % par la Région.
Stéphanie Gallo
*Données fournies par Sopexa (étude : le marché allemand tendances marketing & opportunités pour les produits français)