Créée en 2018 à Lacanau par un ancien de Décathlon et un ingénieur passionné de sport, la PME landaise Kahe s’apprête a lancé son moteur électrique pour bateaux dans pas moins de 12 pays. Et envisage de partir à la conquête des marchés américain et chinois.
« Je n’ai pas su convaincre ». Christian Ollier, cofondateur de Kahe, la marque des produits de Motion Concept Group, le dit sans regret. Il y a quinze ans, le dirigeant, alors en poste chez Décathlon, songe à lancer sa propre entreprise afin de concevoir et commercialiser un moteur électrique capable de propulser des embarcations légères (paddles, surfs, hors-bords, kayaks…). Ce passionné d’alpinisme et de sports nautiques est alors pleinement convaincu de la nécessité d’impulser la transition énergétique sur mer.
« Mon credo, c’est l’innovation produit au service de l’utilisateur et de la planète », résume l’ancien directeur de Quechua, marque phare de l’enseigne Décathlon, qui a notamment développé la tente « 2 secondes ». En 2018, c’est grâce à une rencontre que l’entrepreneur lance enfin son projet. « Je me suis rendu compte que je n’y arriverai pas tout seul et j’ai rencontré Nicolas Quendez, un ingénieur de génie, avec lequel j’ai fondé Kahe. » Encore en poste dans l’enseigne de loisirs, il collabore avec ses équipes dans le cadre d’un partenariat en conception avant de voler de ses propres elles et de déposer pas moins de quatre brevets.
« Aller très vite sur les marchés étrangers »
Côté financements, les deux dirigeants font appel à des fonds personnels, des fonds amis et des business angels auprès desquels ils ont levé 2,5 millions d’euros. L’essentiel de cette somme est dédié à la R&D, dont les travaux dureront cinq ans, afin de mettre au point un moteur avec un poussée optimale, clipsable sur différentes embarcations et proposant une fonction scooter sous-marin. En parallèle, Christian Ollier tisse sa toile d’agents et de distributeurs hors des frontières hexagonales.
« Notre idée était de démarrer en France et d’aller très vite sur les marchés étrangers, confie le dirigeant. Clairement, nous savions que ce projet serait international ou ne serait pas. » Ayant quitté Décathlon il y a maintenant plus de deux ans, il confie son démarchage à l’autre cofondateur, et travaille son réseau, écume les salons professionnels, lance des campagnes de marketing digital et trouve l’appui de partenaires du secteur. Il sollicite ainsi Zodiaq pour aller chercher les agents de son propre réseau.
Résultat : fin 2023, un réseau d’agents distributeurs est constitué qui couvre 12 pays et régions au total (Allemagne, Afrique du Sud, Turquie, Maroc, Danemark, Pays Bas, Belgique et Luxembourg, Pologne, Hongrie, République tchèque et Croatie, Espagne, Moyen-Orient, Australie).
Pour les choisir, Kahe, qui compte aujourd’hui 11 salariés, privilégie des rapports de confiance et demande l’exclusivité. Pour se faire connaître, la marque compte notamment sur le prix de l’innovation technique décerné par l’Afbe (Association française du bateau électrique) en 2023 et sur la visibilité que lui a procuré sa présence sur l’édition 2024 du CES de Las Vegas.
La Chine et les États-Unis dans le viseur
A ce sujet, les moteurs électriques de Kahe aimeraient bien traverser l’Atlantique et conquérir les États-Unis ainsi que la Chine, peut-être via l’ouverture de bureaux ou de filiales sur place, rien n’est encore fixé. « Nous pensons également à l’Afrique du Sud, où nous exportons déjà, et à l’Australie », s’enthousiasme le dirigeant.
Si cette expansion à l’internationale est concluante, la marque songe à produire au plus près de ces marchés soit directement en Chine, où l’entreprise a déjà noué des partenariats, et au Mexique pour le marché états-unien. Pour une entreprise qui prône la décarbonation, autant réduire le plus possible les distances entre les sites de production et les lieux où seront utilisés ces moteurs.
Pour l’heure, c’est en France que sont produits les moteurs Kahe grâce à deux partenariats industriels. Swisstools (YB Group) assemble les moteurs dans son usine de mécanique de haute précision, tandis que la startup La Soie met à disposition sa plateforme de conception et prend en charge la fabrication du reste de la gamme (bagagerie, accessoires et équipements de navigation).
A terme, Christian Ollier ne cache pas son désir de proposer plus qu’un moteur électrique et, pourquoi pas, un bateau complet. Pour l’instant l’entreprise amorce la commercialisation et croit dur comme fer à son succès. « 2024 est une année pivot et nous constatons une vraie prise de conscience des acteurs du nautisme sur la nécessité de décarboner la propulsion ». Une prise de conscience sur laquelle les deux dirigeants comptent pour réussir leur développement à l’international.
Sophie Creusillet