Informer les entreprises, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME), et le grand public sur toutes les formes du commerce illicite, au-delà de la contrefaçon des articles de luxe et de la contrebande de tabac, tel est l’enjeu de l’Association de lutte contre le commerce illicite présidée par Alain Juillet, ex-directeur du renseignement à la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et ancien haut responsable chargé de l’Intelligence économique.
« En dehors de la contrefaçon et du trafic de drogue, on ne parle pas assez des autres trafics illicites alors qu’ils sont en croissance au niveau mondial et européen », avertit d’emblée Alain Juillet, président de l’Alcci, contacté par Le Moci. « Il y a une vrai sensibilité à la propriété intellectuelle et à la lutte contre la contrefaçon dans le domaine du luxe », constate l’ancien numéro un du renseignement extérieur français. « Mais, déplore-t-il, on ne parle pas assez des autres trafics qui empruntent les mêmes circuits des organisations criminelles ». Et de citer la filière des faux médicaments qui représente un vrai danger pour la santé des consommateurs, le trafic d’êtres humains et de migrants, le trafic d’organes ou encore le trafic de déchets organisé par la mafia napolitaine. « Le trafic illégal de faux médicaments rapporte plus que le trafic de drogue », souligne Alain Juillet.
Un outil au service des entreprises
La mondialisation des échanges favorise cette activité criminelle en croissance faisant de plus en plus de victimes. « Il faut réagir », s’insurge Alain Juillet. Face à l’ampleur de ce phénomène en expansion mais encore peu reconnu, il a décidé avec deux autres experts de la sécurité publique et de la protection des entreprises de créer l’Alcci. L’association qu’il préside aux côtés de Hervé Pierre, vice-président de l’Alcci et Dominique Lapprand, secrétaire général de l’Alcci, se veut un lanceur d’alerte pour sensibiliser les pouvoirs publics et informer les entreprises afin qu’elles se protègent en amont de ce fléau.
Les entreprises sont pénalisées par le commerce illicite. Les PME victimes de contrefaçon n’ont souvent pas pu, en amont, se protéger. Une meilleure anticipation des mécanismes de cette concurrence déloyale leur permettrait pourtant d’éviter de perdre des parts de marché ou une atteinte préjudiciable à leur image, estime l’association. L’Alcci veut leur permettre d’avoir une meilleure connaissance du phénomène dans sa globalité. Notre objectif, résume Alain Juillet, « est de donner aux entreprises à la recherche d’informations, la possibilité d’utiliser des banques de données sur le commerce illicite ».
L’Alcci souhaite ainsi devenir pour ses membres un observatoire source d’information et un laboratoire d’élaboration des instruments de lutte.
Mobiliser et rassembler les acteurs au niveau national et international
Pour ce faire, l’association s’appuierait sur un réseau de partenaires en France mais également à l’étranger (institutionnels, associations professionnelles, universités et centres de recherche, organisations gouvernementales et non gouvernementales, think tanks). « L’IRACM (Institut international de recherche anti-contrefaçon de médicaments), le Comité Colbert, l’Unifab (Union des fabricants) mais aussi les CCEF, le réseau des CCI International, ont tous un vrai rôle à jouer », lance Alain Juillet. Il s’agit de mobiliser au niveau national l’ensemble des acteurs publics et privés concernés, de la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) aux avocats spécialistes et de créer des passerelles entre ces acteurs afin qu’ils échangent pour élaborer des instruments de lutte contre le commerce illicite.
Au niveau international, le commerce illicite fait l’objet d’une attention particulière à travers des actions menées par l’Organisation mondiale des douanes (OMD) et Interpol. Mais au niveau national, observe l’Alcci, seuls quelques acteurs, en particulier dans le domaine du luxe, ont mis en place une démarche pertinente pour lutter contre ce fléau. « Le Comité Colbert, affirme Alain Juillet, fait un excellent travail sur le luxe. Mais, déplore-t-il, les réponses sont très diverses selon les filières. Dans la mode et le luxe, les réponses sont très fortes avec des acteurs comme LVMH, le groupe Kering, et Unifab, dans d’autres domaines il n’y a pas de réponse du tout ! ».
L’Alcci veut justement jouer ce rôle catalyseur. « On a l’ambition d’être un vaste lieu de regroupement des acteurs sensibilisés par les problématiques liées au commerce illicite dans lequel les entreprises pourront échanger des informations avec d’autres PME ou des grands groupes à travers le partage d’expérience », dit encore Alain Juillet.
L’association se dotera prochainement d’un site Internet avec des contacts pratiques et des informations pour apporter des réponses aux entreprises qui doivent faire face à différentes formes de commerce illicite. Mais avant, l’Alcci convie membres et partenaires, le 15 novembre, à sa première réunion lors de laquelle l’association présentera au participants ses projets d’actions pour fin 2017 et 2018.
Venice Affre
Pour contacter l’Alcci : [email protected]