Le 28 juin dernier dans les locaux du Mouvement des entreprises françaises (Medef), le Medef avec l’Adepta, association d’entreprises françaises spécialisées, de constructeurs d’équipements et d’unités de production agro-industrielles en France et à l’étranger, et l’OSCI (Opérateurs spécialistes du commerce international), la fédération des sociétés de commerce international (SCI) et d’accompagnement à l’international (SAI), organisaient les premiers Meet up Exploration collaborative dans l’agroalimentaire.
Quelque 270 entreprises françaises (notre photo), selon Étienne Vauchez, président de l’OSCI, étaient ainsi invités à nouer un partenariat avec des porteurs de projets – SCI, consultants, etc. – identifiés dans des pays étrangers. Selon les organisateurs, les 33 projets présentés (voir pdf) devaient être l’occasion de créer des réseaux, de structurer des filières ou encore d’échanger des informations.
F. Burgaud : « présenter une offre complète aux clients »
« Souvent, les entreprises se demandent si ce n’est pas un problème de collaborer à l’international avec une entreprise du même métier. La réponse est non, a répondu sans ambages François Burgaud, président de l’Adepta. Au contraire, c’est un atout, car souvent cela permet de présenter une offre complète aux clients, ce qu’ils demandent de plus en plus ».
Selon lui, les entrepreneurs se demandent encore s’ils vont encore pouvoir vendre, par exemple, des yaourts si d’autres vendent en même temps des équipements. « C’est le contraire, assure-t-il. La demande est tellement importante que l’exportation de matériel va faciliter la livraison de produits. Tel est ainsi le cas dans le vin en Chine, pays qui s’équipe. C’est aussi vrai en Algérie où la fourniture dans le génie génétique et l’équipement stimule la vente de poudre de lait ».
Patron des Vins Bréban, Jean-Jacques Bréban, est, pour sa part, persuadé des bienfaits pour la santé de son entreprise de l’exportation collaborative. Et ce, depuis qu’il a entendu Christine Lagarde, alors ministre du Commerce extérieur, prôner pour la première fois en 2005 le « chasser en meute », lors du Salon international des vins et spiritueux, Vinexpo à Bordeaux. « Je suis alors parti avec des concurrents pour exporter du vin de Provence au Brésil, pays chaud et de la fête, mais très lointain, très grand et où on ne consommait pas à l’époque de rosé », a ainsi raconté le P-dg de la PME de Brignoles (Var). D’où la création du Club Brésil vins de Provence avec huit autres entreprises pour engager des opérations de promotion sur lieu de vente, de communication, de relations presse et de diffusion de l’image de la Provence et de la qualité de ses vins. Pour leur réalisation et leur suivi commercial, le club s’est adjoint les services d’EOC, une société d’accompagnement à l’international (SAI), basée à Marseille, Sao Paulo et Rio de Janeiro.
A. Antoine : « réduire les coûts et les risques et accroître l’efficacité »
En matière d’exportation collaborative, le maître mot est « confiance ». « Les réunions, les échanges d’expérience sont indispensables. Nous avons même inventé des speed meetings au cours desquels un de nos adhérents donne une information à un autre », a exposé Albert Antoine, président à l’Adepta de la filière Élevage, qui regroupe « 70 entreprises, souvent complémentaires, mais parfois aussi concurrentes ».
Pour aborder le marché iranien, a-t-il relaté, nous avons décidé de mutualiser pour réduire les coûts et les risques et accroître l’efficacité ». De façon concrète, une dizaine de PME ont décidé de lancer une prospection conjointe. Un cahier des charges a été rédigé, quatre partenaires potentiels en Iran ont été consultés et un d’entre eux a été finalement retenu, « lequel est intéressé sur le chiffre d’affaires des entreprises pendant la première année afin de l’engager sur la durée », a précisé Albert Antoine.
« Comme ensemblier industriel, il importe de trouver des partenaires en France, donc d’établir avec eux un climat de confiance, le cas échéant de les aider à se répartir les tâches quand il y a un peu de concurrence », a, pour sa part, exposé Philippe Marie, responsable de la filière alimentaire chez Boccard. Ensuite, la France étant « reconnue » dans le domaine laitier et les équipements de transformation, ce qui peut permettre de gagner « c’est sa capacité à offrir l’offre la plus large, y compris les automatismes ».
P. Marie : « chacun savait que s’il ne tenait pas il pénaliserait les autres »
C’est ainsi que Boccard a participé à l’émergence de la plus grosse usine de produits ultra-frais au monde, dans l’Idaho, appartenant au groupe turc Chobani, qui détient aux États-Unis une part de marché de 44 % du segment des yaourts dits grecs évalué à 8 milliards de dollars par le cabinet Sanford Bernstein. Pour cette unité qui peut traiter cinq millions de litres de lait par jour et fabriquer ainsi 2,4 millions de yaourts grâce à 14 lignes de production, le spécialiste lyonnais a dû constituer une chaîne complète de partenaires.
Selon Philippe Marie, il n’y avait pas de groupement formalisé, mais chacun savait que s’il ne tenait pas il pénaliserait les autres ». Une fois ce grand projet de 450 millions de dollars terminé, dont 60 millions au profit des sociétés françaises, Boccard et ses partenaires de l’Hexagone ont décidé de poursuivre leur collaboration dans d’autres territoires : Chine, Afrique, Canada. « Le succès, appelant, selon Philippe Marie, le succès ».
François Pargny