Après avoir créé le chaos avec sa politique de droits de douane agressive et ses annonces erratiques, l’administration Trump fait à présent face à une remise en cause par les tribunaux américains des décrets présidentiels. Résultat : l’incertitude plane sur une bonne partie des droits de douane américains et ce brouillard n’est pas près de s’éclaircir. Le point dans cet article proposé par notre partenaire La newsletter BLOCS.
La semaine dernière, deux coups de théâtre judiciaires ont ainsi fragilisé les droits de douane dits « réciproques », les tarifs « de base » de 10 % infligés à la quasi-totalité de la planète, ainsi que les sanctions infligées séparément à la Chine, au Canada et au Mexique.
En cause : deux requêtes, l’une formée par une coalition de 13 États, conduite par l’Oregon, l’autre par un groupe de PME directement affectées par les tarifs, visant à faire reconnaître l’illégalité de ces mesures.
La Cour de commerce internationale (U.S. Court of International Trade), juridiction fédérale spécialisée basée à New York, a invalidé le 28 mai une large partie des droits de douane imposés par Donald Trump depuis son retour à la Maison Blanche.
Ce jugement a toutefois été suspendu dès le lendemain par la Cour d’appel fédérale, dans le cadre d’un référé d’urgence. Les mesures contestées ont donc été réintroduites, dans l’attente du jugement de la Cour sur le fond.
14 milliards de droits de douane perçus à rembourser
La décision d’appel est attendue pour la mi-juin au plus tôt. Elle pourrait confirmer le jugement en première instance, qui considère que Donald Trump ne pouvait se prévaloir comme il l’a fait de l’International Emergency Economic Powers Act (IEEPA) de 1977 pour imposer ses droits de douanes.
En conséquence, l’administration américaine pourrait être contrainte de rembourser jusqu’à 14 milliards de dollars de droits de douane perçus depuis avril, et décider de réintroduire ces taxes par le biais d’autres vecteurs juridiques, ce qui serait long et coûteux, comme l’indique le Council on Foreign Relations.
En cas de défaite devant la cour d’appel, l’affaire pourrait néanmoins être portée devant la Cour suprême, dont la majorité des membres sont inféodés au héros du clan MAGA.
Les négociations en cours bousculées
Ces péripéties judiciaires ne constituent pas moins un revers majeur pour le locataire de la maison Blanche, puisqu’elles bousculent les négociations en cours avec plusieurs pays, comme le Japon, le Vietnam ou l’Union européenne (UE), et décrédibilisent la tactique de menaces infligées puis retirées par Donald Trump.
Par ailleurs, ce double revirement et l’incertitude induite impacte directement les acteurs économiques touchés par les droits de douanes pris sous l’IEEPA, qui commencent déjà à s’organiser pour identifier les transactions soumises aux tarifs invalidés en première instance et évaluer leur éligibilité aux remboursements.
Ce bras de fer judiciaire pourrait enfin permettre de clarifier en partie la répartition des compétences entre le président américain et les Congrès sur la conduite de la politique commerciale.