Dans sa riposte à la guerre commerciale de l’administration Trump, la Chine a non seulement relevé ses droits de douane sur les importations de produits américains mais elle a aussi introduit de nouvelles restrictions aux exportations de terres rares, perturbant les chaînes d’approvisionnement. Voici un point dans cet article proposé par notre partenaire La newsletter BLOCS.
Les chaînes d’approvisionnement en terres rares en provenance de Chine connaissent de fortes perturbations, depuis quelques semaines. En cause, le désordre provoqué par l’annonce par Xi Jinping, le 4 avril, de l’instauration d’un nouveau système de licence pour l’exportation de sept catégories de ces précieux métaux, d’une importance cruciale pour l’industrie mondiale.
Cette initiative fait suite à de premières restrictions à l’exportation de matériaux stratégiques vers les États-Unis, notamment le gallium, le germanium, l’antimoine, le graphite et le tungstène.
Les nouvelles mesures ciblent cette fois-ci les métaux les plus lourds [samarium, gadolinium, terbium, dysprosium, lutécium, scandium, yttrium], encore plus incontournables dans les processus industriels, et ciblent, sur le papier, l’ensemble des exportations de ces terres rares et plus seulement celles vers les États-Unis.
Incertitudes dans divers secteurs industriels
La mise en œuvre poussive de cette nouvelle procédure de contrôle des exportations se fait déjà ressentir. Selon les informations de CNN, au moins cinq livraisons d’aimants en terres rares commandés par des sociétés américaines et européennes ont été suspendues. L’incertitude règne tant sur la durée de ces perturbations que sur l’effet précis du nouveau levier chinois, une fois qu’il sera pleinement en place.
De quoi susciter l’inquiétude des industriels (BLOCS#57), notamment du secteur automobile, qui ne disposeraient en moyenne que de deux à trois mois de stocks d’aimants, selon les estimations de Jan Giese, négociant en métaux chez Tradium, cité par le Financial Times.
Alors que l’automobile électrique, très consommatrice de terres rares, semble particulièrement vulnérable, les industriels de la défense et de l’aérospatiale pourraient aussi être affectés à court terme. La tech et, en particulier, l’IA, comptent aussi parmi les secteurs menacés.
Des fournisseurs alternatifs difficiles à trouver
Fortement dépendant de la Chine, qui produit plus 60 % des terres rares mondiales et dispose d’un quasi-monopole sur leur raffinage, les entreprises peinent de surcroît à identifier des sources d’approvisionnement alternatives. Si l’Australie, le Brésil ou encore l’Arabie saoudite ont lancé des initiatives en la matière, ces projets ne devraient pas voir le jour dans un futur proche.
Annoncées dans le contexte de l’escalade du conflit commercial sino-américain, les restrictions chinoises devraient, in fine, surtout toucher les firmes états-uniennes, et notamment son secteur de la défense. Seize entreprises de ce secteur ont d’ailleurs concomitamment été sanctionnées par la Chine.
Selon les statistiques du Center for Strategic and International Studies (CSIS), l’avion de chasse F-35 contient plus de 400 kg de terres rares. Un destroyer DDG-51 de classe Arleigh Burke nécessite environ 2 340 kg, tandis qu’un sous-marin de classe Virginia en utilise environ 4 200 kg.
Ce contrôle des exportations de terres rares pourrait également avoir des conséquences sur les entreprises qui réexportent vers les États-Unis. Mardi 22 avril, le ministère chinois du Commerce a ainsi demandé à deux entreprises coréennes de cesser de vendre des marchandises contenant des terres rares chinoises à l’armée américaine, les menaçant de sanctions si elles n’obtempèrent pas.