Le Japon, pays hôte des prochains Jeux olympiques d’été à Tokyo est plus que jamais sur le devant de la scène internationale des grandes manifestations sportives, malgré les inquiétudes récentes liées à l’impact éventuel, sur toute la zone, de l’épidémie en cours de Coronavirus venu de Chine.
Après avoir accueilli la Coupe du monde de rugby l’automne dernier (du 20 septembre au 2 novembre 2019), organisée pour la première fois de son histoire en Asie, l’archipel s’apprête à inaugurer dans moins de cinq mois les Jeux olympiques qui se dérouleront dans la capitale nippone du 24 juillet au 9 août.
Pour ces deux grandes manifestations sportives d’envergure mondiale, les jeux sont faits mais il reste encore des opportunités à saisir pour les entreprises françaises de la filière du sport dans ce pays de 126,4 millions d’habitants, deuxième marché mondial des équipements et articles de sport derrière les États-Unis.
L’augmentation de l’espérance de vie, source de débouchés pour l’offre française
« Le marché [japonais] du sport est important – la taille du marché en 2016 était estimée à 46 milliards d’euros et en 2020, elle devrait s’élever aux alentours de 91 milliards d’euros », a déclaré Yasuhiro Yamashita, le président du comité olympique japonais lors des dernières Rencontres internationales des grands événements sportifs (Riges), organisées le 5 février à Paris par Business France (notre photo).
L’espérance de vie moyenne (hommes et femmes) au Japon est toujours plus longue. Elle est ainsi estimée à 86 ans comme l’a rappelé Yasuhiro Yamashita. La population japonaise vieillit et compte de plus en plus de seniors actifs, soucieux de leur santé et donc de leur activité physique.
Les entreprises françaises ont donc une carte à jouer auprès de cette population attirée par des sports comme le running, la randonnée et le yoga pour les femmes, et le vélo et le trail (la course en sentier) pour les hommes.
Trois exemples de sociétés françaises qui ont transformé l’essai
1./ GL Events
L’organisateur français de salons et grands événements internationaux GL Events est présent au Japon depuis 2015. « C’est très important pour travailler au Japon d’avoir des partenaires japonais », a assuré Sophie Clere, directrice des appels d’offres internationaux chez GL Events. L’entreprise spécialisée dans l’événementiel a donc tissé des partenariats avec des entreprises japonaises notamment de construction.
Une stratégie gagnante puisque GL Events a installé l’été dernier ses premières tribunes dans le pays pour le stade Kamaishi Unosumai spécialement construit à l’occasion de la Coupe du monde de rugby 2019 sur les ruines laissées par le tsunami de 2011. Plus récemment, dans le cadre des JO de Tokyo, le spécialiste français de l’événementiel a signé des contrats d’installation de tribunes et de fourniture d’équipements sur les sites des épreuves de judo et de surf.
« Le Japon s’est ouvert aux expertises étrangères », a exposé Sophie Clere. Mais, a-t-elle prévenu, « il y a une vraie différence de culture business entre le Japon et l’Europe ». La barrière de la langue n’est pas le seul obstacle à franchir pour s’implanter au Japon. Il est donc essentiel pour les entreprises tricolores de « savoir s’adapter » à la culture des affaires nippone recommande ainsi la responsable des appels d’offres internationaux.
2./ ProTracks
Pour travailler au Japon, la société française ProTracks, experte en conception et construction de pistes BMX (bicycle motocross), a elle aussi trouvé un partenaire local.
Fondée en 2012 par le coureur cycliste français, Thomas Hamon, champion de France du bicycle motocross, ProTracks est le constructeur officiel des championnats du monde de BMX 2015, 2018 et 2019. De quoi conférer à cette jeune entreprise installée à Calais une notoriété internationale. « Notre savoir-faire a été repéré et nous avons été choisi pour construire la piste BMX des JO de Tokyo », a ainsi raconté Thomas Hamon.
Au démarrage du chantier, l’entreprise française est intervenue sur la conception de la piste. Mais très vite, il s’est avéré que le savoir-faire de ses homologues japonais pour la construction de la piste « était assez limité », raconte le coureur cycliste français.
Thomas Hamon a donc souhaité faire venir au Japon sa propre équipe pour modeler les obstacles de la piste. Pour ce faire, le constructeur de pistes BMX du nord de la France a noué un partenariat avec une entreprise locale.
3./ Natural Grass
Le concepteur et fabricant français de pelouses hybrides Natural Grass a construit la pelouse du stade Kamaishi Unosumai qui a accueilli la Coupe du monde de rugby en travaillant lui aussi sur place avec une entreprise locale.
L’entreprise a été contrainte d’importer depuis son usine de Milly-la-Forêt (Essonne) les matériaux hybrides nécessaires à la conception de la pelouse. Car le Japon ayant la particularité d’être un archipel, ne regorge pas de « toutes les matières premières que l’on peut trouver facilement en Europe », a ainsi expliqué Bertrand Picard, président et fondateur de Natural Grass.
La Coupe du monde de rugby a été un tremplin pour le spécialiste français de la conception, construction et maintenance de surfaces naturelles pour le sport de haut niveau. Natural Grass est actuellement en discussion au Japon sur de nouveaux projets dans le foot et le rugby mais pas uniquement. « On parle avec de très gros prospects dans le domaine équestre ou le golf », a ainsi révélé son fondateur.
« En ce moment, on regarde de très près le marché chinois qui a de grosses perspectives dans le football », a également dévoilé Bertrand Picard. La Chine prévoit notamment de rénover ou de construire 70 000 terrains de football d’ici la fin d’année.
Des opportunités en Chine
Les immenses marchés chinois et indiens offrent également des opportunités riches pour l’offre française de la filière sport.
La société française Labosport, experte dans les services de certification, audit et diagnostic des surfaces sportives, est présente en Chine depuis une dizaine d’années. « La Chine est un des rares pays avec la France et le Royaume-Uni où l’on arrive à offrir toute notre gamme de services pour tous les sports et toutes les surfaces », a livré Xavier Nicolau, directeur commercial et marketing de Labosport. Ainsi, l’entreprise française propose ses services de certification des surfaces synthétiques comme le gazon de foot aux pistes d’athlétisme en passant par les surfaces de sport équestre.
« En 2018, les jeux de Corée ont été le marqueur d’un nouvel engouement pour les sports d’hiver sur la région asiatique », a rappelé pour sa part Martin Francou, directeur Business Development du groupe MND (Montagne et Neige Développement). Certes, avec des dynamiques de marché très différentes entre le Japon, berceau du ski en Asie, la Chine et la Corée du Sud qui s’ouvrent de plus en plus à la pratique des sports de neige.
Le spécialiste de l’aménagement des espaces de montagne a fait le choix « assez rapidement » en Chine de « chasser en meute » avec l’ensemble des acteurs de la filière de l’aménagement en montagne. « Aujourd’hui, on a une présence marquée sur le développement des stations chinoises », a confié Martin Francou.
Une filière en plein essor en Inde
En Inde, la filière du sport est en plein essor avec des besoins notamment en formation, dans les infrastructures et équipements pour de nombreuses disciplines (football, athlétisme…).
Dans la filière des sports de neige, « il y a un marché de la demande », observe Julien Montel, consultant indépendant expert en stratégie du sport, basé en Inde depuis 2017. La demande en matière de pratique des sports d’hiver émane clairement de la classe moyenne et de la classe moyenne supérieure indienne, a fait remarquer le consultant.
Mais il n’y a pas de marché de l’offre. La géographie du pays avec de très hautes montagnes enneigées et notamment les chaînes de l’Himalaya pourrait offrir un cadre propice à la pratique des sports de neige mais « le grand problème reste l’accessibilité des zones comme l’Uttarakhand, l’Arunachal Pradesh ou le Cachemire, avec d’autres problèmes, de diplomatie », a exposé Julien Montel.
Reste que l’Inde veut se placer sur l’échiquier des grands événements sportifs internationaux. En 2017, ce pays de 1,3 milliard d’habitants a organisé la Coupe du monde de football des moins de 17 ans (FIFA U-17). L’Inde a également accueilli en 2018 la Coupe du monde masculine de hockey sur gazon (du 28 novembre au 16 décembre 2018) à Bhubaneswar dans l’État indien d’Odisha.
Le pays souhaite également candidater aux Jeux olympiques d’hiver de la Jeunesse 2026 et aux Jeux du Commonwealth qui se tiendront également en 2026.
Le Japon, la Chine et l’Inde représentent de belles opportunités à l’export pour les entreprises françaises.
Venice Affre