Les entrepreneurs français à l’étranger (EFE) ayant des liens économiques et commerciaux avec la France contribuent à son commerce extérieur mais sont méconnus des réseaux diplomatiques et d’affaires de l’Hexagone. Une proposition de Loi est en cours d’examen au Parlement, première étape sur le chemin de la reconnaissance officielle. Lors d’une table ronde organisée le 23 octobre par l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE), les représentants des CCEF, de CCI France Internationale et d’EFE International ont plaidé leur cause, appelant les élus de l’AFE à la soutenir.
(Mis à jour le 26/10/23 8H30)
Entreprise française à l’étranger, entreprise des Français de l’étranger, entrepreneur français à l’étranger… La traduction définitive du sigle EFE est encore sujette à des changements au Parlement, où une proposition de Loi adoptée au Sénat en première lecture, le 30 mai dernier*, doit justement définir une bonne fois pour toute ce que recouvre ces EFE. Elle propose aussi de créer un label permettant de référencer ceux qui contribuent effectivement au rayonnement économique de la France et à son commerce extérieur. La proposition de Loi doit encore être examinée par l’Assemblée nationale.
Des « relais » pour la France et ses entreprises
Une chose est sûre pour Alain Taieb, président d’EFE international, qui porte cette cause avec toute la détermination et l’engagement qu’on connaît au fondateur et dirigeant du groupe Mobilitas, lui-même Conseiller du commerce extérieur (CCE) de longue date : ces entrepreneurs français à l’étranger sont de véritables « relais » à l’international pour la France et ses entreprises, et « contribuent plus qu’on ne le pense aux succès présents et aux succès futurs » de celles-ci à l’étranger en étant, à travers leur activité, importateurs de produits français et promoteur des savoir-faire Made in France dans leur pays d’implantation.
Restaurateurs, importateurs, distributeurs, détaillants, fabricants, designers, consultants, fournisseurs de services… N’ayant aucun lien juridique ni fiscal avec la France, leurs entreprises étant de droit local, ils ne bénéficient toutefois d’aucune aide de l’Hexagone et en ont particulièrement souffert lors de la crise sanitaire. En outre, bien souvent, ils sont très mal connus des réseaux diplomatiques et économiques français à l’étranger, nombre d’entre eux n’adhérant par aux CCI françaises locales pour des raisons de coût, comme l’ont relevé plusieurs élus de l’AFE.
C’est d’ailleurs pour cette raison qu’à l’initiative des CCEF et de CCI France International, EFE International a été créée en mars 2021 : cette structure basée à Paris permet à des EFE qui y prendraient une participation de bénéficier du dispositif du Volontariat international en entreprise. La sélection est stricte : il faut qu’elles prouvent leur contribution au commerce extérieur français. « A ce jour, nous avons pu envoyer une cinquantaine de VIE » a indiqué Alain Taieb.
EFE international planche aussi sur des solutions pour faciliter l’accès à des financements à ces entreprises, notamment auprès des banques françaises.
Le chantier de longue haleine du recensement
Leur reconnaissance, d’un point de vue juridique, est en cours via la proposition de Loi. Reste à les recenser : un chantier de longue haleine qu’ont entrepris de conserve les CCE et les CCIFI, et auquel ils ont invité les élus de l’AFE à participer lors de la table ronde du 23 octobre.
D’après Arnaud Vaissié, président de CCI France International, tête de pont du réseau des CCIFI, lui-même ancien EFE pour avoir démarré sa société, International SOS, à Londres, une première estimation par les CCEF du poids des EFE dans les communautés d’affaires françaises fait état de 120 000 à 130 000 EFE actuellement, sur les 3 millions de Français recensés à l’étranger dans les registres consulaires.
En comptant 3 à 4 employés par EFE, ces entrepreneurs emploieraient près de 500 000 personnes, qui, d’une manière ou d’une autre, sont donc touchées par la culture économique française. Car contrairement aux expatriés, « qui veulent tous un jour rentrer chez eux », eux restent.
« Si on en a 130 000 dans le monde, c’est dommage de ne pas les reconnaître » a complété Sophie Sidos, présidente des CCEF. Car ce sont bien des entreprises locales, mais dont une partie font de l’import-export avec la France. Le recensement en est à ses tout débuts, associant CCIFI, CCEF, mais aussi le réseau diplomatique, et la Team France Export, en particulier Business France et Bpifrance.
Les premières remontées d’informations dont ont fait état les intervenants sont édifiantes quant à la méconnaissance du nombre et de l’étendue des activités de ces EFE : en Côte d’Ivoire, là où le service économique en connaissait 300, ce sont 2000 qui ont finalement été identifiés. En Tunisie, leur nombre atteint 300, aux Emirats arabes unis, entre 400 et 500, bien plus que ce qu’imaginait l’équipe de la CCIFI locale. « C’est un travail qui mettra du temps, il faudra être patient » a indiqué Arnaud Vaissié.
Pour l’heure, même si le chemin est encore long, le processus de reconnaissance semble en bonne voie.
Christine Gilguy
* La proposition de loi avait été déposée le 3 mars 2023 par la sénatrice Evelyne Renaud-Garabedian (LR) et le sénateur Jean-Pierre Bansard (LR)