« La France a soutenu Robinson Jean-Louis, le candidat de Marc Ravalomanana, qui a finalement été battu. Ce n’est que vers la fin qu’elle s’est rangée derrière le futur vainqueur. La France avait raté le coche quand Marc Ravalomanana s’était emparé du pouvoir. Elle vient de commettre la même erreur », se plaint un observateur économique à la Lettre confidentielle.
Un mois après le second tour des élections présidentielles et législatives (20 décembre 2013), Madagascar est loin d’avoir retrouvé la stabilité qui lui manque depuis le renversement en 2009 de Marc Ravalomanana par le maire d’Antananarico Andry Rajoelina. Bien que la Commission électorale spéciale (CES) ait validé la victoire de Héry Rajaonarimampianina, soutenu par l’homme fort du régime de transition, Andry Rajoelina, le climat reste tendu.
Après l’échec de son favori, l’ambassadeur de France dans la Grande Ile ferait « profil bas» et « ici, on dit que Paris n’enverrait que Yamina Benguigui, la ministre chargée de la Francophonie, pour représenter la France à l’installation officielle du président malgache, le 25 janvier, alors que plusieurs dirigeants malgaches s’attendaient à la venue de Pascal Canfin, son collègue en charge du Développement », rapporte, avec amertume, l’interlocuteur de la LC. « D’ici là, tout peut se passer », insiste ce dernier.
Faute de connaître encore les résultats du scrutin législatif, aucun nom n’a pu encore être annoncé pour occuper la fonction de Premier ministre, tout comme le fauteuil de président de l’Assemblée nationale. Or, le temps presse. Sans un minimum de stabilité politique, les bailleurs de fonds, tant multilatéraux que bilatéraux, n’accepteront pas de se réunir pour appuyer le nouveau régime et relancer la machine économique. De leur soutien, dépendront ensuite les négociations avec le Club de Paris pour la dette publique et le Club de Londres pour la dette privée.
Aujourd’hui, l’économie malgache est à l’agonie. L’insécurité grandit, la misère et la corruption atteindraient des sommets. Le tourisme, qui représentait 15 % du PIB, s’est effondré. D’après la Banque mondiale, le revenu journalier est descendu sous la barre des 2 dollars pour 92 % de la population. Et pire, explique un Français de retour d’un séjour de deux mois dans la Grande Ile, « la peste est réapparue à Fénérive-Est,un gros bourg sur la RN 5, vers Sainte Marie sur la
côte Est et Maroansetra. C’est le résultat de la pauvreté, de l’exode des rongeurs en zone urbaine, provoquée par la déforestation à outrance, et de l’absence de collecte des déchets et d’assainissement ». Ainsi, 19 décès auraient été recensés. Une des raisons de cette déforestation serait l’exploitation sauvage des forêts primaires par les opérateurs chinois faisant le commerce de bois de rose.
François Pargny