En consacrant sa présidence du G7 à la lutte contres inégalités, la France fait le choix de braquer l’objectif sur l’Afrique. Ce continent est de loin le plus inégalitaire et le plus pauvre du monde. D’après la Banque mondiale, 90 % des pauvres à l’horizon 2050 seront originaires de ce continent. Paris a, d’ailleurs, prévu que des nations non membres du G7*, notamment africaines, soient consultées.
Convergence entre la présidence française et l’AFD
En invitant la presse, le 16 janvier, autour de Philippe Huberdeau, secrétaire général adjoint de la présidence du G7, Rémy Rioux, le directeur général de l’Agence française de développement (AFD), entendait démontrer la convergence entre la présidence du G7 et sa maison, en matière de réduction des inégalités sociales et de transition écologique. Parmi les experts de l’AFD présents lors de cette réunion, figurait, en autres, Christophe Cottet, à la tête d’une petite cellule de recherche, appelée Économie & Stratégie, qui a récemment été créée au sein du département Afrique.
Les priorités du G7 peuvent être résumées ainsi : égalité homme-femme, accès à l’éducation et la santé, fin des inégalités environnementales et lutte contre le changement climatique, prise en compte de la dimension sociale dans le commerce et la fiscalité, sécurité, opportunités du numérique et de l’intelligence artificielle.
Le calendrier du G7
Le point d’orgue de la présidence française sera, du 24 au 26 août, le Sommet de Biarritz. « Compte tenu de la ville choisie, il y aura certainement un focus sur les océans et la préservation de la biodiversité », a estimé Damien Navizet, responsable de la division Changement climatique, qui a rappelé que le Sommet de Biarritz se tiendra un mois avant le Sommet du climat fixé par le secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, Antonio Guterres, au 23 septembre prochain.
D’ici le Sommet de Biarritz, les ministres du G7 se réuniront pour aborder des sujets divers (santé, éducation et développement…), a détaillé Philippe Huberdeau. Ensuite, le conseiller diplomate d’Emmanuel Macron, Philippe Étienne, sherpa de la présidence française, rassemblera à Lyon, les 4 et 5 février, ses homologues du G7 pour préparer une feuille de route.
A ce stade, Philippe Huberdeau n’a pas voulu en dire plus sur les axes de travail qui pourraient être développés. Seule information lâchée, la volonté « de multiplier les séances de travail avec la société civile », qui avait organisé le Sommet C7 en mai dernier au Canada, avant le Sommet du G7, les 8 et 9 juin suivants à Charlevoix (Québec).
De son côté, l’Agence française de développement travaille avec l’Union européenne sur la présentation de papiers de synthèse pour les Journées européennes du Développement, qui se dérouleront en mai. L’impact du changement climatique dans différents pays, comme la Tunisie, figurerait ainsi sur l’agenda.
Les modèles de développement et la gouvernance
En termes d’inégalités, il y aurait une forte hétérogénéité, selon les régions d’Afrique. En l’occurrence, s’agissant de l’Afrique du Nord et l’Afrique australe, qui ont un niveau de produit intérieur brut équivalent, la première est la moins inégalitaire dans le continent et la seconde la plus inégalitaire. « Les modèles sont différents. En Afrique du Nord, les systèmes de protection sociale sont plus robustes, il y a un contrat social », constatait Christophe Cottet.
L’expert de l’AFD remarquait aussi que si le nombre de pauvres s’est accru en Afrique, c’est que le lien entre croissance et baisse de la pauvreté est moins fort en Afrique qu’en Asie. Et ce, au moins pour trois raisons. La gouvernance est moins bonne en Afrique, la démographie y est supérieure (la population y double tous les 10 à 15 ans), ainsi que sa dépendance aux ressources naturelles.
M-P. Nicollet : le Niger « ne produit plus de bachelier dans la discipline C
Pour Marie-Pierre Nicollet, la directrice de la Transition démographique et sociale à l’AFD, il est donc important « d’accroître les capacités des États à allouer des moyens pour disposer de systèmes de santé et d’éducation robustes et proposer des services de qualité dans tout le pays ».
Les enjeux sont énormes, selon elle. Par exemple, dans l’éducation, sur dix enfants, sept achèvent le primaire, mais seulement trois terminent avec les compétences requises. Pire, seuls quatre entrent au collège et ce sont surtout les filles qui sont sacrifiées. Enfin, un jeune sur dix accède au supérieur (post bac).
Un exemple particulier est celui du Niger. « Ce pays ne produit plus de bachelier dans la discipline C », déplorait ainsi Marie-Pierre Nicollet. Dans quel pays du monde, peut-on se priver des mathématiques ?
François Pargny
* les membres du G7 sont France, Royaume-Uni, Allemagne, Italie, États-Unis, Canada, Japon
Pour prolonger, découvrez le nouveau rapport du Cian, publié par Le MOCI : Rapport CIAN 2019 – Les entreprises internationales en Afrique