Pour Zhang Lijun, vice-ministre chinois de la Protection de l´environnement, les choses sont claires. « Même si nous devons tirer des leçons de la crise japonaise », assurait-t-il mi-mars alors que la communauté internationale redoutait un deuxième Tchernobyl à Fukushima 1, « nous ne changerons pas notre calendrier du nucléaire ». Pas question pour Pékin de revoir d´un iota sa feuille de route qui prévoit d´installer un parc nucléaire capable de produire jusqu´à 120 GW (contre 9 GW aujourd´hui) dans moins de dix ans.
Pour atteindre son objectif, la Chine entend construire d´ici là l´équivalent d´une centrale (dont plusieurs EPR) « tous les mois ! », rappelle Jacques de Boisséson, représentant général de Total en Chine « C´est le programme le plus ambitieux jamais imaginé », résume-t-il. « L´objectif officiel reste de 40 GW en 2020. Officieusement, on parle plutôt de 100, voire de 120 GW. Ce sont donc 90 ou 100 GW qu´il faut installer en 9 ans ». Pas moins de 25 unités – en plus des 9 actuellement en production – sont d´ores et déjà validées et en cours de construction. Près d´une vingtaine sont en phase de terrassement ou à l´étude…
Pour renverser son modèle de consommation, qui privilégie nettement le charbon (70 % du mix énergétique), « la Chine n´a pas le choix », estime Song Muren, universitaire pékinois. « Elle doit entamer une mutation », en privilégiant les autres sources d´énergies autres que fossiles. Une nécessité d´autant plus fortement ressentie chez les caciques du régime que le pays est officiellement devenu en 2010 le premier consommateur d´énergie au monde devant les Etats-Unis. Le géant d´Asie a en effet brûlé l´année passé plus de 2,25 milliards de tonnes équivalent pétrole – un volume doublé en seulement 10 ans.
Dans ces conditions, « Pékin ne peut pas se passer de son programme nucléaire » assure, catégorique, le même expert ; programme qui in fine ne pèsera que 3 ou 4 % dans le mix énergétique global du pays. Pour l´heure, face à la menace nucléaire qui pèse sur le Japon, les autorités à Pékin ont imposé une inspection de chacune de leur centrale et ont provisoirement suspendu tout accord sur de nouveaux projets. Jusqu´à ce que la situation à Fukushima 1 (située à moins de 2000 kilomètres de la capitale de l´Empire) soit « maitrisée », a dernièrement indiqué le ministère chinois de l´énergie.
Pierre Tiessen, à Pékin