Le plan d’action sur 6 mois prévu par l’accord intérimaire du 24 novembre sur le nucléaire iranien ouvre à très court terme la perspective d’une facilitation des affaires avec ce pays dans de nombreux secteurs, même si le calendrier de levée des sanctions reste encore imprécis et sera dépendant du respect par les Iraniens de leurs propres engagements.
Le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a précisé, lors d’une émission spéciale de France-Culture le 26 novembre, publiée sous la forme d’une interview par Le Monde daté du 27 novembre, qu’ « il y a un premier train de sanctions qui doit être levé dès lors que le contrôle de l’AIEA (ndlr : Agence internationale de l’énergie atomique) sera engagé. Sur l’ensemble des sanctions, cela représente environ 5 % du total ».
Globalement, si tout se passe bien, le premier impact de l’accord va être de permettre à Téhéran de récupérer des avoirs bloqués à l’étranger -notamment ceux liés aux ventes de pétrole brut et de métaux précieux- pour financer ses importations de biens autorisées. Il va aussi permettre de rétablir des circuits de financement du commerce courant, tout ayant été bloqué après novembre 2011, avec la généralisation de l’interdiction d’opérer aux banques américaines et européennes (dont françaises, avec la fameuse circulaire Kouchner) et iraniennes, selon un schéma qui rappelle l’ancien programme de l’ONU sur l’Irak « pétrole contre nourriture ».
Concrètement, le plan d’action, dont la Lettre confidentielle s’est procurée la version française, prévoit qu’en contrepartie des engagements iraniens sur le nucléaire durant cette première phase de 6 mois, le régime de sanctions international soit allégé dans plusieurs de ses aspects :
– Exportations de pétrole : pas d’aggravation des sanctions sur les exportations iraniennes de pétrole, le texte évoque la « pause » dans les efforts visant à des réductions « supplémentaires » des ventes de pétrole brut par l’Iran ; il parle aussi de « permettre le rapatriement d’un montant convenu de capitaux à l’étranger » ; il indique la suspension des sanctions américaines et de l’UE sur « les services correspondants d’assurance et de transports ». Les estimations circulant dans la presse font état d’environ 4 milliards de dollars qui pourraient être ainsi récupérés par l’Iran durant la période de 6 mois prévu par l’accord intérimaire.
– Pétrochimie : suspension des sanctions américaines et de l’UE sur les exportations iraniennes et les services correspondants.
– Or et métaux précieux : suspension des sanctions américaines et de l’UE ainsi que sur les services correspondant. Selon les estimations qui circulent dans la presse, on estime à environ 1,5 milliard de dollars la somme qui pourrait être récupérée par les autorités iraniennes sur les ventes d’or et de métaux précieux durant les 6 mois de l’accord intérimaire.
– Automobile : suspension des sanctions américaines sur cette indusrtrie et les services correspondants.
– Aviation : accorder des licences à la fourniture et à l’installation en Iran de pièces détachées pour la sûreté des vols de l’aviation civile iranienne et services correspondants ; idem pour les inspections dans ce domaine et les réparations en Iran et services correspondants.
– Nucléaire : pas de nouvelles sanctions du Conseil de sécurité de l’ONU, des Etats-Unis et de l’UE.
– Financement du commerce extérieur : établissement d’un « canal financier » pour faciliter le commerce « humanitaire » destiné au marché domestique iranien et utilisant les revenus du pétrole détenus par l’Iran à l’étranger. Les produits concernés : la nourriture et les produits agricoles, les médicaments, les matériels médicaux, les dépenses médicales à l’étranger. Les banques concernées, qu’elles soient étrangères ou iraniennes : elles doivent être définies « au moment de la mise en place du canal ». Ce même « canal financier » pourrait être utilisé pour payer les frais de scolarité des étudiants iraniens à l’étranger durant la période de six mois.
Une autre contrepartie citée par le texte est l’augmentation des seuils d’autorisation de l’UE pour les transactions relatives au commerce « non sanctionné », « jusqu’à un montant convenu ». Précisons que ce seuil, selon une note de la DGTrésor remontant à octobre 2012, est de 40 000 euros jusqu’à présent pour les produits autres qu’humanitaires, une simple notification étant demandée pour les vivres et médicaments à partir de de 10 000 euros.
Christine Gilguy