Le 15 décembre, lors du premier atelier d’information de Business France consacré à la réouverture du marché iranien, Gabriel Miguez pesait ses mots. Il est vrai que l’adjoint du directeur du Développement international de Suez n’avait pas la partie facile, puisqu’il lui était à la fois demandé d’informer les dirigeants d’entreprises dans la salle des besoins, des freins et difficultés dans le secteur de l’eau et d’évoquer la stratégie de son groupe. Il est vrai que l’ex-Suez Environnement a juste engagé à ce jour un « cycle de discussions » avec les autorités locales, en l’occurrence le ministère de l’Énergie et la Compagnie nationale des eaux.
Ce cycle, au demeurant, s’annonce difficile et long, puisqu’il s’agit de convaincre les autorités du pays qu’il y a « d’autres leviers que le dessalement » pour répondre à la situation « catastrophique» du secteur. Dès le début de son intervention, Gabriel Miguez avait ainsi pointé « le gros problème de stress hydrique » de l’Iran, dont une centaine de villes serait menacée à terme « d’être à sec», comme c’est déjà le cas dans certains villages.
Les modèles de contractualisation ne sont pas adaptés
C’est pourquoi l’eau est devenue une priorité nationale, et si « les interlocuteurs sont des très bon niveau », se félicitait-il, en revanche, « les besoins ne sont pas hiérarchisés et les modèles de contractualisation existants, comme le BOT (Build Operate Transfert), ne sont pas adaptés au secteur de l’eau qui est gratuite en Iran ». Aujourd’hui, a-t-il approfondi, les Iraniens voudraient augmenter la capacité de production d’eau, en développant le dessalement. « Problèmes, racontait le dirigeant du groupe français, ce serait coûteux et il faudrait transférer l’eau puisée dans la mer d’Oman sur de très longues distances, 2 000 km par exemple jusqu’à Machhad », la deuxième ville du pays, après la capitale Téhéran.
« Donc, il faut s’assoir à table avec la Compagnie nationale des eaux pour se mettre dans un processus de pédagogie permettant de définir les solutions les plus adaptées pour les Iraniens », ce qui « n’est pas facile », parce que « çà demande du temps, de l’argent, il faut faire des aller et retour et mettre en place une force commerciale ».
Le groupe ne compte pas sur une hausse du prix de l’eau
Interrogé par la suite sur la difficulté que représente la gratuité de l’eau en Iran, Gabriel Miguez a rappelé que « certains biens sont donnés au peuple depuis la Révolution islamique » et que, dans ce contexte, « Suez ne compte pas pour réussir sur une hausse du prix de l’eau, même si des responsables politiques disent qu’on ne peut pas continuer ainsi ». Du coup, « on imagine que des enveloppes extérieures puissent venir financer les infrastructures », a confié le responsable du groupe français.
Appelé à préciser ses propos par un dirigeant d’entreprise présent dans la salle, Gabriel Miguez a souligné que de nombreux projets d’hydrocarbures pouvaient dégager du « cash ». Et comme, selon lui, ni Suez ni les bailleurs de fonds ne sont prêts à investir dans de dessalement, l’Iran devrait utiliser sa capacité d’endettement. En clair, « la situation est urgente », c’est même « une question de survie » et donc « il va falloir que l’État dégage une enveloppe dédiée ». Les solutions proposées par Suez sont « bien inférieures en termes de financements que le dessalement » et, assurait-il, « sur 30 ans, c’est jouable si on développe un système d’autonomisation de la gestion de l’eau ».
François Pargny
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