En ce début de mois de juillet, le décret précisant ses nouvelles missions
n’est pas encore sorti mais Claude Revel, la nouvelle patronne de la Délégation interministérielle à l’intelligence économique (D2iE) et son équipe préparent leurs
cartons pour déménager de leurs actuels locaux place des Vins-de-France, près
de Bercy, vers des bureaux rattachés à Matignon dans le 7ème
arrondissement de Paris. Ce changement n’est pas de pure forme : « le
rattachement au Premier ministre est une orientation importante, confie Claude
Revel à la Lettre confidentielle (LC). Une vraie volonté de développer
l’intelligence économique a ainsi été manifestée ».
Et ceci, dans tout le millefeuille institutionnel et administratif français.
Une idée qui tient à coeur à l’auteure du rapport « Développer une
influence normative internationale stratégique pour la France ». Commandé
par et remis à Nicole Bricq, ministre du Commerce extérieur,
le 31 janvier 2013, ce rapport avait clairement appelé à une pratique plus
collective de l’IE (1).
Son prédécesseur, Olivier Buquen, rendait compte à un comité
directeur de l’IE placé auprès de la présidence de la République. Ce qui
rendait peu lisible, d’un point de vue opérationnel, l’action de son service,
malgré des initiatives remarquées comme le Guide
du Routard de l’Intelligence économique publié en 2012. La nouvelle Déléguée interministérielle à l’intelligence économique
rendra compte, elle, à un comité interministériel présidé par le Premier
ministre, qui lui fixera aussi ses orientations. « Nous aurons d’avantage
de possibilités d’irriguer le système », explique Claude Revel, qui estime
qu’une bonne organisation collective en matière d’IE, comme savent la pratiquer
les pays anglo-saxons, contribue à « la compétitivité hors coût ».
Plusieurs présidents de Régions veulent participer au réseau
En attendant le décret, quatre grands axes d’action ont été fixés à la D2iE
par Jean-Marc Ayrault lorsqu’il l’a présenté en conseil des ministres le 29 mai
: un volet « pédagogique », pour sensibiliser les acteurs sur les
objectifs et les méthodes de l’IE; un volet « anticipation et
accompagnement des évolutions », notamment par la veille stratégique »;
un volet « sécurité économique », à travers la prévention des risques
d’atteinte à l’image ou à la propriété intellectuelle; et enfin un volet
« travail d’influence de long terme sur l’environnement économique »,
par exemple les « régulations internationales » touchant à des domaines
de toutes natures.
Pour Claude Revel, il s’agit ni plus ni moins que « d’irriguer » ce vaste
univers segmenté qu’est le millefeuille public français en bonnes pratiques en
matière d’IE et de partage d’informations « à notre profit collectif ».
Une nouveauté : les collectivités territoriales qui le souhaitent pourront être
associées. « Nous avons déjà reçu des manifestations d’intérêt de plusieurs
présidents de Région » se réjouit-t-elle.
Quant aux entreprises, elles ne seront pas mises de côté : « Je
souhaite développer les liens avec le monde économique, indique Claude Revel,
qui bien qu’énarque, a fait une bonne partie de sa carrière dans le secteur
privé, notamment en tant que consultante. Je les consulterai régulièrement ».
Et de préciser qu’elle travaillera en lien avec les priorités définies par
Nicole Bricq en matière de Commerce extérieur, et d’Arnaud Montebourg en
matière de réindustrialisation. Si le ministre du Redressement productif doit
encore lui préciser ses priorités sectorielles, sa collègue du Commerce
extérieur a déjà établi les siennes : les familles de produits en « M »
qu’elle essaye de promouvoir (mieux vivre en ville, mieux se nourrir, mieux se
soigner, mieux communiquer).
Enfin, the last but not the least, la nouvelle D2iE va
probablement être très rapidement amenée à plancher sur les gros enjeux qui se
profilent au plan international. Les négociations engagées par la Commission européenne
avec les Etats-Unis pour le Transatlantic Trade and Investment Partnership
(TTIP), source d’une tension persistante avec Karel de Gucht, le commissaire
européen au commerce (voir la rubrique Paroles d’acteurs dans la LC de
cette semaine) sera l’un des sujets au menu d’un entretien avec Nicole
Bricq, le 18 juillet, selon l’entourage de la ministre.
Christine Gilguy
(1) Relire dans la LC : « Intelligence
économique : le rapport Revel préconise plus de « jeu collectif ».