Le 1er janvier 2021, le mariage entre l’association Medef International, bras armé du Medef à l’international, et l’Adepta, Association pour le développement des échanges internationaux de produits et techniques agroalimentaires, sera effectif.
Confirmé le 16 septembre par les deux présidents, Frédéric Sanchez et François Burgaud (notre photo*), et approuvée lors de l’assemblée générale de l’Adepta, ce rapprochement sera effectué sous la forme d’une fusion absorption, cette dernière, sous un nom encore à déterminer, devenant le pôle Agroalimentaire de Medef International.
Le nom et la marque Adepta, connus dans le monde entier dans son secteur, ne disparaîtront pas et les neuf filières de l’Association (élevage, grandes cultures, fruits et légumes, industrie laitière, industries carnées, boulangerie, vitiviniculture, emballage, aquaculture) sont reprises, avec l’ensemble de ses salariés.
Un intérêt commun
Entre les deux organismes, les complémentarités sont évidentes.
Si Medef International possède une force de projection et un réseau d’affaires importants hors de l’Hexagone, étant l’un des principaux acteurs privés pour l’organisation de délégations d’entreprises à l’étranger, la représentation en son sein de la filière agroalimentaire est encore très faible, quelques grands noms y figurant quand même comme Pernod Ricard. Pour sa part, l’Adepta compte 200 membres, dont 120 PME, représentant un chiffre d’affaires export annuel de 9 milliards d’euros.
Les deux structures d’accompagnement du secteur privé ont donc un intérêt commun à se marier. Elles devront, néanmoins, régler la question du montant de la cotisation de leurs membres. Pour l’instant, chacun reste sur ses bases, on se donne le temps de la réflexion. Ce n’est, en effet, que fin 2021 que, pour la première fois, Medef International lancera l’appel à cotisation – en l’occurrence pour 2022.
Un contexte de concentration des acteurs publics
Ce rapprochement entre opérateurs privés s’inscrit aussi dans un contexte de concentration des moyens financiers et humains de la sphère publique.
Business France a ainsi ravi en 2018 à l’Adepta le budget que réserve traditionnellement le ministère de l’Agriculture à la promotion internationale (organisation de participations à des salons, notamment).
A cette occasion, l’opérateur public d’accompagnement des entreprises aurait d’ailleurs vu d’un bon œil un rapprochement à son avantage avec l’Adepta. Mais l’association, confiante en son indépendance et sa méthode de partenariat avec les associations sœurs à l’étranger, a préféré convoler avec le bras international du Medef, avec lequel les collaborations existaient déjà.
Des collaborations anciennes
Dans la pratique, Medef International et l’Adepta étant tous deux de fins connaisseurs de l’Afrique, il n’était pas rare que le premier fasse appel au second pour organiser le pôle Agroalimentaire d’une mission ou d’un voyage ministériel ou présidentiel, français ou étranger (sur notre photo, un pavillon France organisé par l’Adepta sur un salon ivoirien).
François Burgaud aime ainsi à rappeler que, sous la présidence de François Hollande qui rencontrait son homologue nigérian, l’Adepta, à la demande de Medef International, avait renforcé les liens de la France avec la plateforme agroalimentaire du géant africain, représentée par la Nigeria Agribusiness Group (NABG). Or, cette association est présidée par Sani Dangote, responsable de Dangote Agro, filiale du groupe éponyme, et frère du milliardaire Aliko Dangote.
Cette connexion a semble-t-il donné des résultats fructueux : en juillet 2018 Olmix Group, l’un des grands spécialistes mondiaux des biotechnologies marines et de la chimie verte, et Dangote Agro ont signé un accord de collaboration mutuelle pour promouvoir l’utilisation des technologies à base d’algues dans le domaine de l’agriculture et de la santé humaine.
Autre mode de coopération, la « Task Force Agroalimentaire », logée chez Medef International, avenue Rapp dans le 7e arrondissement de Paris (à proximité du Medef, avenue Bosquet) et co-présidée par François Burgaud et Michel Nalet, président de la Commission Europe-International de l’ Ania (Association nationale de l’industrie alimentaire).
Or, si l’Ania est adhérent du Medef en tant que fédération, elle a toujours manqué de temps pour développer véritablement l’international, accaparée qu’elle est par des questions nationales souvent épineuses… Au fil du temps, certaines professions, comme la boulangerie et la viticulture, ont quitté l’Ania. D’où l’idée qui mûrit de créer avec la nouvelle Adepta une dixième filière, qui serait donc dévolue aux produits agroalimentaires.
Un aboutissement naturel
Quelques jours avant l’annonce du mariage, François Burgaud, qui intègre à l’occasion de cette fusion le bureau de Medef International, a expliqué au Moci que ce rapprochement est un aboutissement naturel.
« Par le passé, nous avons collaboré, mais n’avons jamais organisé de missions communes avec Medef International, parce que nous n’étions pas dans les mêmes lieux. Ce n’était pas possible parce qu’organiser un déplacement à l’étranger, c’est très compliqué, plein de rebondissements et qu’il faut réagir très rapidement. C’est, d’ailleurs, pourquoi aujourd’hui nous avons anticipé la fusion, avec le transfert de tous nos salariés avenue Rapp. Désormais, nous pouvons travailler ensemble pour préparer les opérations futures », confiait ainsi François Burgaud.
Nouvelles pistes d’action
Parmi les nouvelles pistes à suivre, la nouvelle Adepta pourrait s’inspirer des missions d’entreprises qu’organise tous les ans Medef International auprès de la Banque mondiale et du FMI pour faire de même avec l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (Fao) et le Programme alimentaire mondial (Pam).
Lors de l’entretien qu’il a accordé au Moci, François Burgaud s’est aussi félicité de la bonne santé générale des membres de l’Adepta, malgré le Covid. Mais le besoin de relancer la prospection commerciale se fait sentir.
« S’ils ont bien vendu, notamment parce qu’ils ont fait de bons choix en faisant confiance à leurs représentants, s’ils ont pu aussi dans certains cas faire la preuve qu’on peut installer une filiale dans un pays sans être présent physiquement, le monde virtuel ne leur pas permis de se faire de nouveaux clients » a-t-il constaté.
Or, François Burgaud craint un certain attentisme de la part d’entreprises, qui attendraient le second semestre 2021 pour relancer leur déplacements à l’étranger. « Elles croient se protéger alors que c’est à court terme qu’il faut relancer l’international avec des missions et des participations à des salons », estime-t-il.
A ses yeux, les rencontres virtuelles donnant l’impression de la facilité, apportant un certain confort et générant une certaine inertie, ce serait dangereux. Pour faire des affaires, rien ne semble devoir remplacer le contact physique.
Camille Ferré
*Sur notre photo, au Conseil économique, social et environnemental (CESE), à l’issue de l’assemblée géréale de l’Adepta, de gauche à droite Frédéric Sanchez, président de Medefi, François Burgaud, président d’Adepta, et à l’arrière plan, Philippe Gautier, directeur général de Medefi et Michelle Grosset, secrétaire générale de l’Adepta.