Invitée à prononcer un discours à l’université de Pékin, à la veille du sommet bilatéral UE / Chine des 12 et 13 juillet, la commissaire au Commerce s’est quelque peu « lâchée». Soulignant que l’Union européenne (UE) soutenait les efforts du pays dans son chemin vers une économie de marché, Cecilia Malmström a néanmoins souligné avoir constaté « peu d’avancées notables » depuis 2013. Selon elles, les zones de libre-échange récemment établies dans le pays « ont fait des progrès relativement limitées ou ont été abandonnées » de sorte que « nous restons préoccupés par l’application des droits de propriété intellectuelle, et les discriminations contre les entreprises européennes restent monnaie courante ».
Sur un ton contrastant avec le langage diplomatique utilisé par ses collègues lors du sommet bilatéral, la libérale suédoise a plusieurs fois critiqué l’absence de réciprocité dans les relations UE / Chine. Rappelant l’achat par les Chinois de plusieurs fleurons industriels européens comme Pirelli ou Volvo Car Corp, elle a déploré les nombreux obstacles auxquels restaient confrontés les entrepreneurs de l’UE lorsqu’ils veulent faire de même en Chine, évoquant « un manque d’équité, des transferts technologiques forcés ou des restrictions lors de la concessions de licences », dans plusieurs secteurs . « Pourquoi vos entreprises bénéficient-elles d’un traitement impartial de la part de régulateurs européens indépendants alors que les nôtres ne sont pas traitées de la même façon? ».
Pas un mot cependant sur la décision européenne finale, toujours pas tranchée, visant à octroyer, ou non, le statut d’économie de marché (SEM) à la Chine au sein de l’OMC (Organisation mondiale du commerce). Si le thème, dit-on, a été abordé en marge de la réunion bilatérale les 12 et 13 juillet à Pékin, il ne figurait pas au menu officiel des discussions. Ce qui n’a pas empêché les opposants au projet de renforcer leurs pressions sur l’exécutif européen.
Aegis brandit la menace d’une désindustrialisation
La veille du sommet Aegis Europe, le lobby de l’industrie, a organisé une rencontre à Bruxelles entre des capitaines d’industrie européens et la presse. Objectif : expliquer, chiffres à l’appui, en quoi la concurrence chinoise est particulièrement nuisible à l’activité économique européenne. Pour Milan Nitszchke, le porte-parole d’Aegis, si le SEM est octroyé à la Chine, « l’érosion de l’industrie européenne serait inarrêtable. Même les meilleurs savoir-faire, recherche et développement européens n’auraient aucune chance de pouvoir rivaliser avec les importations chinoises. En résulterait des millions d’emplois perdus ».
Le dumping et la surproduction chinois auraient des conséquences sur plusieurs secteurs en Europe, en particulier ceux des métaux non-ferreux et de l’aluminium. Ces dix dernières années, la part de marché des Chinois dans la production d’aluminium est passée de 10 à 50 %. L’inquiétude est la même du côté des entreprises de céramique. « En six ans, les parts de marché d’imports de vaisselle chinoise en UE sont passées de 20 à 70 %. Leur production de tuiles a été multipliée par six entre 1995 et 2014 », explique Alfonso Panzani, le vice-président de l’Association de l’industrie de la céramique en Europe. Il craint la disparition de 100 000 emplois directs et de plus de 200 000 emplois indirects. Les PME seraient les plus durement touchées.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles