Les tensions entre les États-Unis et la Chine inquiètent les entreprises européennes et françaises en particulier. Mais les milieux d’affaires préfèrent se préparer à devoir s’adapter à une « mondialisation fragmentée ». C’est ce qui ressort du dernier livre blanc publié par l’AmCham (American Chamber of Commerce) en France, HEC et DLA Piper, à l’occasion du 20ème anniversaire de l’entrée de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
Le titre de ce livre blanc, dont l’élaboration a été pilotée par Jeremy Ghez, professeur associé d’économie et d’affaires international à HEC, ne laisse aucun doute sur le sentiment régnant dans les milieux d’affaires d’une inéluctabilité du découplage entre les États-Unis et la Chine, créant deux grandes zones d’influence économiques mondiales : « Economic Decoupling, Our new reality ? », en français « Chine- États-Unis : le grand découplage, notre nouvelle réalité ? »*.
« Le découplage économique fait référence à la possibilité que les États-Unis et la Chine puissent adopter des normes et des technologies très différentes et s’appuyer sur des chaînes d’approvisionnement de plus en plus distinctes et séparées à l’avenir, précisent l’AmCham, HEC et DLA Piper dans un communiqué commun. Cela conduirait à une ère de ‘mondialisation fragmentée’, où deux systèmes mondiaux mais relativement indépendants coexisteraient ».
Autrement dit, cela mettrait fin à la mondialisation économique sans barrières insurmontables telle qu’on l’a connu depuis la fin de la guerre froide. Si ce scénario se confirme, poursuit le communiqué, les « turbulences et perturbations » observées depuis le début de la pandémie de Covid-19 pourraient devenir « structurelles » et remettre en question, le fonctionnement des entreprises internationales dans cinq domaines critiques : les chaînes d’approvisionnement, les normes technologiques et les business model, l’attraction et la rétention des talents, les solutions commerciales et cadres réglementaires mondiaux.
Des experts ont contribué à ce livre blanc dont Martin Wolf, commentateur économique en chef du Financial times et Elvire Fabry, Chercheur senior à l’Institut Jacques Delors, en charge de la politique commerciale, l’Europe dans la mondialisation et le Brexit.
Les propositions de l’AmCham pour s’adapter
L’AmCham pour sa part fait des propositions pour interpeler pouvoirs publics et entreprises, témoignant d’une réelle inquiétude.
En matière de chaînes d’approvisionnement, il s’agit de « transformer les tests de résistance en tests de résilience » et d’élaborer un outil permettant à toute entreprise d’évaluer ses forces et faiblesses dans ce domaine. Autre proposition, sans attendre que le découplage se confirme ou non, « encadrer et ajuster » l’offre des entreprises, plus précisément des produits pouvant être compatibles avec différents standards et normes mondiaux.
L’AmCham propose également de renforcer le marché intérieur de l’Europe et « prioriser une stratégie diversifiée d’exportation » et, pour préserver l’accès aux talents, voire les retenir, elle propose l’élaboration de cadres juridiques et réglementaires « qui protègent la mobilité ».
*Le Livre Blanc est consultable /téléchargeable (en anglais) sur le site de l’AmCham. Cliquez ICI