Lundi 28 septembre la Commission européenne a présenté son plan d’action pour moderniser l’Union douanière (UD) qui décline une série de mesures visant à rendre les douanes de l’Union européenne (UE) plus intelligentes, plus innovantes et plus efficaces. Une avancée attendue depuis longtemps par les opérateurs européens.
« Le système douanier européen est la clé de voûte de notre marché unique (…), il représente un territoire unique sur lequel s’applique un jeu commun de règles. Un atout que nous ne pouvons pas négliger », a insisté Paolo Gentiloni, le commissaire en charge de l’Economie.
Soulignant le rôle central joué par les douanes européennes durant la pandémie – pour « faciliter les flux d’importation d’équipement de protection et de matériel médical » – l’ex Premier ministre italien estime également qu’elles représentent un outil central pour relancer l’économie du bloc.
330 milliards d’euros par mois traités à l’import et à l’export
En 2019, les fonctionnaires européens des douanes ont traité des importations et des exportations pour une valeur de 330 milliards d’euros par mois, soit 15,4 % du commerce mondial en importation et 15,9% en exportation, selon les chiffres avancés par l’exécutif européen.
Mais les défis auxquelles le système est confronté exige des solutions de pointe afin de de rendre « nos douanes plus résistantes et à l’épreuve du temps », a indiqué le commissaire à l’Economie. Parmi ceux-ci figurent la lutte contre la contrefaçon ainsi que les fraudes liées au non-paiement des droits de douane et de la TVA. Un manque à gagner colossal pour le budget de l’UE estimé à 25 milliards d’euros en 2018, soit 13 % des recettes annuelles de l’Union.
Pour permettre à l’Union douanière de « passer à l’étape supérieure », comme s’y est engagée Ursula Von Der Leyen, la Présidente de la Commission, lors de la présentation de ses orientations politiques, le plan d’action se décline en cinq axes majeurs.
Plateforme analytique, e-commerce, guichet unique, programmes douaniers, international…
– Premier axe d’action : la mise en place d’une plateforme analytique au sein même de la Commission à Bruxelles. Cet instrument, qui doit tirer parti des nouvelles technologies, a vocation à devenir un centre névralgique d’informations pour faciliter le travail des douanes européennes.
Cette plateforme servira donc à collecter, analyser et échanger des données douanières afin d’aider les Etats membres à mieux lutter contre la fraude et à renforcer leurs capacités à gérer les risques. « Nous avons besoin d’outils plus affûtés pour savoir quelles sont les importations qui exigent une vérification plus détaillée », explique Paolo Gentiloni.
– Deuxième axe d’action : le e-commerce où les ambitions sont les mêmes. Si l’UE a déjà pris un certain nombre de mesures pour faire face à la fraude douanière et fiscale dans le commerce électronique, elles restent insuffisantes, constate l’exécutif européen.
« La Commission tient à s’assurer que les douanes auront accès aux données que les prestataires de services de paiement tels que PayPal et Amazon Pay seront tenus de fournir aux autorités fiscales des États membres à partir de 2024 ».
De nouvelles exigences en matière d’information douanière pour les plateformes sont dans les cartons. Elles viseront à réduire, en particulier, les fraudes à la TVA. En 2018, le montant des recettes de TVA perdus, « en raison de l’inadéquation des systèmes fiscaux », s’est élevé à 140 milliards d’euros, estime la Commission.
– Troisième axe d’action : un guichet unique pour les douanes, proposition qui devrait être dévoilée « avant la fin du mois d’octobre », annonce-t-on à Bruxelles. Un nouvel environnement numérique qui permettra, à terme, aux entreprises d’effectuer toutes les formalités transfrontières à partir d’un point d’accès unique.
Une société agricole, par exemple, pourra ainsi remplir plus facilement, et à moindre coût, ses obligations douanières, phytosanitaires et vétérinaires à l’achat de produits. « Elle ne devra plus déposer deux déclarations séparées », s’est félicité Paolo Gentiloni.
Ce nouvel outil, véritable serpent de mer évoqué depuis des années, devrait permettre aux entreprises européennes d’économiser jusqu’à 690 millions d’euros de formalités douanières au cours des sept premières années de mise en œuvre progressive et ensuite, entre 140 et 200 millions euros par an.
– Quatrième axe du plan d’action : les nouveaux programmes d’investissement douaniers. Ceux-ci détaillent les mesures nécessaires pour faciliter le déploiement d’équipements techniques « modernes et fiables » qui devraient être financés dans le cadre du prochain budget pluriannuel (2021-2027).
Ils comprennent également le développement et le soutien des systèmes électroniques douaniers afin de permettre aux autorités du secteur de travailler dans un environnement sans papier.
– Le cinquième et dernier volet du plan comprend une dimension internationale. La Commission compte en effet renforcer la coopération douanière avec ses principaux partenaires et concurrents, notamment avec la Chine.
Objectif ? « Faciliter les échanges tout en garantissant l’efficacité des contrôles », détaille le Commissaire italien. Le suivi de certains aspects, liés aux douanes, des 41 accords de libre-échange négociés par l’UE, seront également renforcés.
Du haut de ses 52 ans, l’Union douanière reste l’un des grands acquis de l’UE. « Il faut maintenant faire fructifier les enseignements tirés de ces cinq décennies en mettant à profit les nouvelles technologies pour améliorer encore son fonctionnement », a conclu Paolo Gentiloni. Une mission qui sera confiée à un nouveau groupe de réflexion. Présidé par la Commission et composé de représentants des Etats membres et du secteur douanier, il devra réfléchir à la façon de mieux armer l’union douanière pour faire face aux défis de demain.
Kattalin Landaburu, à Bruxelles