Alors que la croissance mondiale a atteint un point bas au premier semestre, la sortie de la récession du commerce mondial et la désinflation devraient relancer la croissance mondiale, projetée à 2,8 % en 2024 et 2025 par l’assureur-crédit Allianz Trade.
La demande est toujours atone et les stocks pleins, en particulier en Europe où, après avoir chuté à 0,6 % en 2023, la croissance devrait stagner à 0,7 % cette année. Elle devrait reprendre des couleurs en 2025 pour atteindre 1,4 %, anticipent les analystes d’Allianz Trade. Si les PIB des locomotives allemande et français devraient se redresser l’an prochain, passant respectivement de 0,1 % à 0,9 % et de 0,9 % à 1,3 %, le risque de récessions continue néanmoins de planer au-dessus du Vieux Continent.
En raison du ralentissement du marché du travail ce risque de récession continuera également de menacer les Etats-Unis où le PIB devrait décélérer en 2025 à 1,7 % après avoir progressé de 2,3 % en 2024. L’économie chinoise s’essoufflera également passant de 5 % à 4,3 % tandis que l’Asie-Pacifique devrait enregistrer le plus fort taux de croissance régional cette année et la suivante avec 4,2 % et 4 %. Les pays d’Asie du Sud-Est en seront le principal moteur, grâce au dynamisme de la consommation intérieure et aux exportations.
En cas de dérapage, une possible récession mondiale
Autre ensemble de pays émergents, l’Amérique latine pâtit de la baisse des cours mondiaux des matières premières, qu’il s’agisse de certains minerais ou des produits agricole. Résultat : sa croissance ne devrait pas dépasser 2 % cette année et 2,7 % en 2025. En Afrique et au Moyen-Orient, la baisse de la demande de pétrole, avec un cours mondial du baril de brent anticipé à 80 dollars en 2025 handicapera particulièrement les pays de Golfe (exception faire des Emirats arabes unis). Le PIB africain devrait croître de 3,2 % cette année et 3,5 l’an prochain, celui du Moyen-Orient de 2,2 % et 3,2 %.
Allianz Trade formule également un scénario beaucoup moins optimiste qui se traduirait par une baisse de la croissance mondiale de 1,5 point et une hausse d’un point de l’inflation. En cause, notamment, de possibles dérapages budgétaires. A cet égard, plusieurs pays européens montrent des signes d’inquiétude quant à leur déficit public et ne respectent plus les règles budgétaires européennes (France, Italie, Belgique, Pologne, Hongrie, Slovaquie, Malte), en plus de la Roumanie qui était déjà soumise à une procédure de déficit excessif depuis 2020.
Les économistes d’Allianz Trade pointent également l’intensité du risque géopolitique (guerre en Ukraine, conflit à Gaza…) dont les manifestations et effets restent difficiles à prévoir. De plus, 2024 est particulièrement chargée en termes d’élections nationales. 76 pays sont concernés, peuplés de 4,1 milliards d’habitants soit 51 % de la population mondiale. Huit pays les plus peuplés au monde se seront rendus aux urnes avant la fin de cette année (Bangladesh, Brésil, Etats-Unis, Inde, Indonésie, Mexique, Pakistan, Russie).
Retour en force du risque politique
Pour les Etats-Unis, l’étude projette trois scénarios en cas de victoire de Donald Trump aux présidentielles de novembre. En cas de poursuite de la politique économique (resserrement budgétaire modéré et hausse des tarifs douaniers concentrés sur la Chine), le taux de croissance atteindrait 1,7 % en 2026 et 2,2 % en 2027. Mais en cas de guerre commerciale contenue (droits de douanes de 4,5 %, renforcement des contrôles frontaliers des importations, expansion budgétaire modérée), la croissance serait de 1,2 % et 1,9 %. Cette dernière reculerait à 0,3 % puis 1,6 % si le gouvernement Trump lançait le pays dans une politique commerciale « disruptive ». Des droits de douanes de 12 %, un plus grand contrôle des importations, une fiscalité expansionniste financée par les recettes douanières et une augmentation des déficits réduirait la croissance à 0,3 % et 1 ,6 %.
Au Royaume-Uni, en cas de (probable) victoire du Labour, Allianz Trade penche à 80 % pour une politique « pragmatique » avec une consolidation budgétaire modérée avec des perspectives de croissance modérée de 1,9 % en 2025 et 1,5 % en 2026. Si le futur gouvernement optait pour une politique «ambitieuse» incluant un assainissement budgétaire rigoureux le PIB bondirait de 2,4 % en 2025 avant de décélérer à 0,7 % l’année suivante.
Quant aux prévisions sur la politique économique de la France, une majorité Rassemblement national ou du Nouveau Front populaire à l’Assemblée nationale conduirait au même résultat : un PIB en hausse de 0,8 % cette année et 1 % en 2025.
Sophie Creusillet