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Entretien avec Xavier Terlet, fondateur du cabinet XTC

Xavier Terlet est le fondateur du cabinet XTC (Xavier Terlet Consultants), spécialisé dans le conseil en innovation aux industries agroalimentaires. Il est présent en Amérique du Nord, en Amérique latine et au Moyen-Orient. Il nous livre sa vision de ce qu’est l’innovation en agro-industrie.

Le Moci. « Innovation » est un mot aux acceptations multiples. Comment le définiriez-vous appliqué à l’agroalimentaire ?
Xavier Terlet. L’innovation est un sport à haut risque puisqu’un produit sur deux disparaît deux ans après son lancement. Ce qui veut dire que 50 % des investissements dans l’innovation se font en pure perte. J’ai une définition toute simple de l’innovation : créer un produit qui apporte un bénéfice nouveau au consommateur, perçu comme tel par le consommateur. Cela marche pour le marché domestique comme à l’international. On peut faire les meilleures rillettes de porc au monde, mais, au Moyen-Orient, les consommateurs n’en tireront aucun bénéfice. Idem pour des produits sans OGM aux États-Unis : les Américains s’en fichent. 

Le Moci. Quelles sont les grandes tendances de l’innovation dans les industries agroalimentaires ?
X. T. En France comme dans tous les pays riches, les consommateurs veulent des produits pour gens malins, ils veulent en avoir pour leur argent. C’est-à-dire des produits simples, pas trop chers mais de bonne qualité. En revanche, ils sont prêts à mettre un peu plus d’argent pour se faire un petit plaisir, comme un carré de bon chocolat. La tendance plaisir est très forte et toutes les autres en découlent. Mais le consommateur veut également des garanties pour sa santé, surtout après les crises sanitaires de ces dernières années. Cela explique le succès des produits issus de l’agriculture biologique, garantis sans OGM, sans graisses saturées… Dans le même esprit, la « naturalité » est également à la hausse avec des produits naturels, qui, en plus de ne pas être nocifs, sont bons en soi et pour l’environnement. Autre tendance : la praticité du packaging. Nous voulons des produits nomades que l’on peut transporter facilement au bureau ou en balade. 

Le Moci. Est-ce la crise qui a mis en avant ces tendances ? 
X. T. La crise n’a fait que conforter le consommateur dans son exigence de bénéfice, il est de plus en plus regardant. Quoi qu’on en dise, la crise n’a pas obéré la consommation alimentaire : nous mangeons toujours autant, mais nous faisons plus attention et c’est tant mieux !

Le Moci. Comment adapter un produit à un marché étranger ? 
X. T. En fait, un produit agroalimentaire n’est pas exportable ! Il faut absolument l’adapter à un marché. Prenons l’exemple d’Actimel de Danone. Les Japonais ont le même type de boisson depuis 70 ans, le Yakult. En 1996, ils ont voulu le lancer tel quel en Europe. C’est une boisson orangée un peu acide, pas du tout au goût des Européens. Résultat, ils se sont fait couper l’herbe sous le pied par Danone qui a repris le concept mais l’a adapté. À l’inverse, Danone a fait un flop en France avec son yaourt Essensis, censé embellir la peau. Il a voulu adapter un concept anglo-saxon en France, qui ne partage pas cette culture. À l’international, il faut bien cerner les leviers du plaisir dans le marché que vous visez, ainsi que les garanties que propose votre produit. Si les Américains se fichent d’une garantie « sans OGM », les ferments lactiques originaires de l’Union européenne sont très appréciés des industriels chinois, après le scandale du lait à la mélamine. 

Le Moci. Peut-on parler d’un savoir-faire particulier à la France en matière d’agroalimentaire ?
X. T. Nous avons tendance à nous enorgueillir de notre gastronomie et de notre Tour Eiffel. Mais maintenant, les plus grands chefs du monde viennent d’ailleurs. En période de crise, nous vendons nos produits agroalimentaires comme notre mode, dans des épiceries de luxe en Asie. 
Pendant ce temps, les Italiens jouent sur la masse. Mais les choses sont en train de bouger, les Français et notamment les professionnels de l’agroalimentaire sont, je crois, en train de se rendre compte que le monde bouge.

Propos recueillis par Sophie Creusillet

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