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Guide des aides à l’export en France 2016 : entretien avec Alain Bentéjac, président du CNCCEF

Le Moci. Le 25 juin 2013, avec votre compère Jacques Desponts, vous remettiez un rapport sur « l’évaluation des dispositifs de soutien à l’internationalisation de l’économie » au ministre du Commerce extérieur de l’époque, Nicole Bricq. Pratiquement toutes les recommandations de réforme que vous préconisiez ont été réalisées depuis : la grosse réforme de cette année sera le transfert des garanties publiques de Coface à Bpifrance, sans oublier celle de la part française, mais il y a eu aussi la fusion Ubifrance/Afii, les conventions Business France/CCI de mars 2015, le transfert d’activités de Sopexa à Business France dans l’agroalimentaire… Êtes-vous satisfait ou y a-t-il encore des domaines dans lesquels des réformes sont à mener ?

Alain Bentéjac. Il n’est pas sûr qu’il y ait un lien de cause à effet entre le rapport qu’on avait fait à l’époque et les mesures que vous citez. Le rapport a contribué, je l’espère, à la réflexion et créé les conditions favorables pour que cela avance dans ce sens-là. Mais toutes ces mesures vont dans le bon sens car l’idée maîtresse du rapport était la simplification et la rationalisation du système. Je pense que la création de Business France à partir de la fusion entre Ubifrance et l’Afii c’est très bien, de même le fait d’intégrer les activités BtoB de Sopexa dans ce nouvel ensemble. De même – mais cela n’était pas dans notre rapport car on n’avait pas mandat pour aborder les questions de financement – je suis pour ma part très favorable à l’opération qui a été décidée de transfert des garanties publiques de Coface à Bpifrance. Cela permettra d’avoir un interlocuteur à la fois financeur et pourvoyeur de garanties pour les opérations export et je pense que c’est une très bonne chose.
Néanmoins, il y a deux sujets sur lesquels on pourrait certainement encore s’améliorer.
Il y en a un que je pensais réglé et qui ne l’était pas finalement – ce que je regrette personnellement – c’est le rattachement de l’AFD à la Caisse des dépôts, qui a été annoncé puis visiblement arrêté. Je le regrette car il me semblait que c’était une mesure de nature à donner à l’AFD une capacité financière et une ouverture plus importantes aux préoccupations des entreprises, et c’est cela que celles-ci attendent. J’espère que le dossier n’est pas complètement fermé sur ce thème-là.
Le deuxième sujet, c’est l’articulation entre Business France et les chambres de commerce. Il y a des progrès mais où nous ne sommes pas au bout du chemin. C’est à mon avis un sujet important, clé même, pour les PME en particulier, car ce sont les principaux organismes qui mènent concrètement le soutien à l’export. On l’évoquait d’ailleurs dans notre rapport. Des choses ont été mises en place, Matthias Fekl, le secrétaire d’État au Commerce extérieur, à la promotion du tourisme et aux Français de l’étranger, s’occupe du sujet, notamment en réunissant tout le monde au sein du Conseil stratégique de l’export. Une convention globale a été signée l’an dernier, entre les CCI et Business France, qui maintenant se décline petit à petit pays par pays entre les entités locales. Tout cela est à saluer et encourager, c’est bien, mais c’est encore un point sur lequel, un jour, il faudra certainement se reposer la question, du point de vue de l’entreprise, du parcours de l’export. Toutes ces conventions permettent de clarifier ce parcours mais je pense qu’il faut aussi le simplifier. Je ne méconnais pas les difficultés de l’exercice pour beaucoup de raisons mais je crois néanmoins que ce chantier est encore à parfaire.

 

Le Moci. Dites-nous en plus sur la manière dont vous voyez les choses en tant que chef d’entreprise…

A. B. Je vois le système et je ne peux pas dire qu’il est simple ! Même quand je lis les conventions d’un peu plus près, cela reste quand même un peu complexe pour les entreprises et les attributions respectives des uns et des autres restent un peu, parfois, parallèles. Mon entreprise à une certaine taille, nous avons l’habitude d’utiliser tous les systèmes, il nous arrive d’utiliser Business France, parfois quelques chambres de commerce mais c’est assez rare car nous ne sommes pas dans la cible, nous sommes déjà trop gros et présents à l’international. Mais je pense que pour des PME plus petites, le système reste complexe.

 

Le Moci. Vous-même qui êtes à la tête des CCEF, vous avez complètement réorganisé cette institution. Quel est aujourd’hui le positionnement du réseau au sein du dispositif public d’aide à l’export ?

A. B. Il est très simple. L’accompagnement des entreprises est l’une de nos missions avec le conseil aux pouvoirs publics. Dans ce domaine, nous sommes dans une logique de complémentarité totale par rapport aux autres, que ce soit les chambres de commerce ou Business France. Les entreprises bénéficient de l’aide concrète de ces organismes en termes d’études de marché, de programmes de contacts BtoB, de participation à un salon ou d’accompagnement à l’export, etc. Nous, nous proposons à ces organismes d’offrir à leurs clients, en plus de leurs prestations, la possibilité de rencontrer un ou plusieurs CCE pour avoir gratuitement un « service + » qui consiste à bénéficier de leurs réactions et expériences de terrain, éventuellement de leur carnet d’adresses ou de leurs recommandations, sur des pays et/ou des secteurs d’activités. Ce conseil sur « ce qu’il faut faire et ne pas faire », ce « coaching » d’entrepreneur à entrepreneur, vient en complément des prestations techniques des organismes. C’est gratuit et je pense que cela peut faire gagner beaucoup de temps à des entreprises, leur éviter de faire des erreurs.
C’est précisément l’esprit de la convention que nous avons signée au mois de mars 2015 avec Business France sous l’égide de Matthias Fekl. Nous la mettons en application, ce n’est pas encore parfait partout mais je pense qu’on va y arriver. Lorsque j’étais à Singapour en avril dernier, j’ai vu qu’il y avait de très bons exemples de coopération Business France/Bpifrance/CCE pour ce coaching d’entreprises. On va essayer de valoriser ces bonnes pratiques auprès de tout le monde dans le réseau pour que cela avance.
Avec les CCI on négocie aussi des conventions. Pas mal d’accords ont été signés en France, au niveau régional, entre les chambres et les comités régionaux des CCE. Au moment où je vous parle, j’ai sous les yeux le projet de convention entre la CCI de Paris Île de France et le comité Paris des CCE. Tout cela avance.

 

Le Moci. Le conseil aux pouvoirs publics était tombé un peu en désuétude. Où en êtes-vous dans ce domaine ?

A. B. C’est bien relancé. Notre analyse de départ était que ça marchait bien dans les pays mais que ça marchait moins bien au niveau central, national.
Ca marche bien à l’étranger car il y a un dialogue constant entre les ambassadeurs, les chefs des services économiques et les CCE sur place. Cela marche aussi quand on fait des réunions régionales : en Côte d’Ivoire, au lendemain d’un forum économique France-Afrique de l’Ouest et Afrique centrale organisé par les CCE auquel j’assistais fin avril, une vingtaine d’ambassadeurs de tous les pays de cette région étaient présents à une réunion avec les conseillers de la zone. On a évoqué tous les sujets, y compris les sujets de sécurité, par exemple, qui sont un élément important du contexte des affaires.
Au niveau national, on a mis en place, depuis presqu’un an, une réunion trimestrielle dite « à haut niveau » entre nous d’un côté, et de l’autre la Direction générale du Trésor et le ministère des Affaires étrangères et du développement international. Il s’y passe un peu la même chose que dans les pays entre les sections et les ambassadeurs : nous échangeons des informations qui nous paraissent importantes du point de vue du commerce extérieur, nous faisons remonter des informations qui nous viennent du réseau. Cela fonctionne. Nous avons eu une réunion il y a un mois, la prochaine est programmée fin juin, ça marche très bien, on peut dire que sur ce point, on a changé de braquet.

Propos recueillis par Christine Gilguy

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