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Réglementation : ce qu’il faut savoir pour investir en Colombie

Les différentes réformes adoptées en Colombie au cours des vingt dernières années ont créé un cadre juridique favorable aux investissements étrangers. Le traité bilatéral de protection des investissements, qui vient d’être signé par la Colombie et la France, renforce encore la stabilité juridique, explique un expert du cabinet Mayer Brown LLP.

 

I/ Le cadre général

La situation actuelle de la protection des investissements dans le droit des affaires en Colombie.
Depuis 2000 (Décret n° 2080), la Colombie a levé les entraves à l’entrée d’investissements étrangers. Dorénavant, la règle de principe est l’ouverture de tous les secteurs économiques aux investisseurs étrangers sans autorisation préalable du gouvernement. On retrouve cependant les exceptions typiques à l’ouverture de certains secteurs à l’investissement étranger, comme les activités de défense et de gestion des déchets toxiques, ou encore des restrictions sur le contrôle étranger de certains médias publics. Notons aussi que, comme dans de nombreux pays, les investissements étrangers dans les secteurs des hydrocarbures et de la finance doivent faire l’objet d’une autorisation gouvernementale préalable.
Ce régime assure aux investisseurs l’égalité de traitement, interdisant toute discrimination et garantissant la stabilité juridique des conditions du retour sur l’investissement et du rapatriement des bénéfices en monnaie librement convertible.
Afin de pouvoir pleinement jouir des droits concédés aux investisseurs étrangers, notamment en matière de contrôle de change et de libre circulation du capital, il est nécessaire de déclarer au Banco de la República le capital investi, sans qu’il soit pour autant requis de créer une filiale locale. Cependant, si l’investisseur entend faire des affaires de façon permanente en Colombie, il devra ouvrir au moins une succursale locale.

Bon à savoir

Des contrats de stabilisation
La Loi n° 963 de 2005 permet aux investisseurs de conclure des contrats de stabilisation, garantissant le maintien de règles juridiques existantes au moment de la réalisation de l’investissement, pour une durée de 3 à 20 ans.

 

II/ Investir

L’importance du traité bilatéral de protection des investissements qui vient d’être signé par la Colombie et la France.
Le traité signé en juillet 2014, devant entrer en vigueur à l’issue de diverses procédures constitutionnelles, il aura une importance capitale pour les entreprises françaises, car il leur offrira des protections spéciales et additionnelles.
De façon générale, le texte surprend par la minutie de ses dispositions. Contrairement à d’autres traités de ce type, où les droits et protections garantis aux investisseurs ne sont pas définis dans le texte du traité, ce qui aboutit à un important contentieux interprétatif, ces droits et protections sont définis précisément dans le traité franco-colombien.

• Quels investissements, quels investisseurs ?
Le traité vise à protéger tant les investissements à venir que les investissements déjà réalisés. Ainsi, les sociétés françaises déjà implantées en Colombie voient leurs investissements couverts par cette nouvelle protection. Par ailleurs, la définition de l’investissement protégé est très large et inclut tout intérêt économique. S’agissant des investisseurs, le traité vise à la fois l’investisseur direct et indirect, ce qui permet de qualifier de société française, et donc d’investisseur protégé, toute société contrôlée par une société française.

• Règlement des litiges
En cas de litige entre un investisseur et la Colombie, l’investisseur aura trois options : (i) saisir un tribunal arbitral international CIRDI ou CNUDCI ; (ii) saisir les juridictions compétentes de la Colombie ; ou (iii) saisir tout autre tribunal ou juridiction convenu entre l’investisseur et la Colombie.
S’agissant de la procédure d’arbitrage international, le traité énonce de nouvelles règles visant à clarifier et à rendre plus prévisible la procédure.

• Limites au pouvoir de réglementation de l’État d’accueil
Bien que le traité reconnaisse aux États le droit d’adopter des mesures environnementales, sanitaires ou sociales, il énonce néanmoins le droit à compensation en cas d’expropriation ou si la mesure porte atteinte à l’investissement de façon discriminatoire ou disproportionnée. Les mesures des États en matière fiscale ou de sécurité sont en principe exclues de la protection du traité.

Bon à savoir

Responsabilité sociale des entreprises
Répondant à des aspirations de la société civile, le traité incite – sans en faire une obligation – les investisseurs à intégrer les principes directeurs de l’OCDE pour les multinationales dans leurs pratiques et politiques. L’adoption de ces principes directeurs n’est pas sans conséquences pour les entreprises. En effet, l’intégration de ces principes par une entreprise peut être considérée comme l’acceptation par celle-ci d’obligations internationales en matière, notamment, de droit du travail ou de droits de l’homme.

 

III/ L’importance de l’arbitrage  

Tant l’expérience que les chiffres publiés montrent que l’arbitrage en Colombie a connu un essor considérable : en 10 ans le nombre d’arbitrages administrés de la Chambre de commerce de Bogota a été multiplié par 100. C’est pourquoi, en 2012, la Colombie a promulgué la Loi n° 1563 sur l’arbitrage national et international, à l’instar des législations les plus avancées en la matière.
L’arbitrage international y est défini de façon large et inclut les controverses touchant « les intérêts du commerce international », ouvrant ainsi l’accès à l’arbitrage international aux filiales locales de sociétés étrangères. La loi n° 1563 reconnaît très largement l’autonomie des parties, s’agissant du choix du droit applicable, de la procédure, de la langue ou du siège. Les sentences internationales rendues en Colombie peuvent faire l’objet d’un recours en annulation – l’appel étant exclu – pour les mêmes motifs que ceux permettant de refuser la reconnaissance et l’exécution d’une sentence étrangère aux termes de la Convention de New York.
Les arbitres ont le pouvoir d’ordonner des mesures provisoires ou conservatoires, qui pourront être exécutées par le juge d’appui. Celui-ci peut également ordonner des mesures provisoires ou conservatoires tout au long de la procédure arbitrale.
Finalement, tandis que l’arbitrage international est perçu comme un système d’administration de la justice autonome, l’arbitrage national est assimilé à une justice déléguée par l’État, avec une procédure proche de celle judiciaire, sans l’autonomie que permet l’arbitrage international.

 

IV/ La sécurité juridique

Malgré les difficultés qu’a connues le pays par le passé, l’optimisme est de rigueur. La Colombie jouit en effet d’une étonnante stabilité juridique et politique, érigée en principe constitutionnel.
Ainsi, la Constitution de 1991 instaure de nombreuses garanties de sécurité et de stabilité juridique, tel que le principe de non-rétroactivité fiscale. D’une façon générale, la Colombie offre un cadre juridique sûr et stable aux investisseurs étrangers.
Par ailleurs, il convient de noter la qualité exceptionnelle et la clarté des lois en matière économique. La Loi n° 80 de 1993 sur les contrats d’État en est un exemple patent, par la précision de la distinction entre le droit commun et le droit administratif.
D’autres réformes législatives récentes ont eu pour but de renforcer la confiance des administrés. À titre d’exemple, la Loi n° 1607 de 2012 a renforcé les droits des contribuables en garantissant l’accès aux dossiers de l’administration, le droit d’obtenir une réponse écrite complète, claire et utile aux questions des contribuables, ou bien encore le droit à ne pas payer un impôt contesté avant une décision définitive administrative ou judiciaire. Cette loi encadre également le pouvoir de sanction de l’administration, en interdisant, notamment, les pénalités disproportionnées.

Enfin, les garanties constitutionnelles, qui peuvent être invoquées directement devant les tribunaux par les particuliers et les entreprises, peuvent mener à la déclaration d’inconstitutionnalité ou d’inopposabilité d’une loi d’ores et déjà entrée en vigueur.
Les garanties et nombreuses possibilités de recours constitutionnels représentent un couteau à double tranchant pour toute entreprise commerciale active en Colombie :

• d’une part, les entreprises peuvent efficacement faire valoir leurs droits constitutionnels, y compris s’opposer à la promulgation ou à l’application d’une loi inconstitutionnelle ;

• d’autre part, les entreprises peuvent subir directement ou indirectement les conséquences d’une action constitutionnelle intentée par des tiers, notamment des associations.

L’imprévisibilité résultant de ces recours en matière constitutionnelle peut être illustrée par un arrêt de 2009, aux termes duquel la Cour constitutionnelle a annulé une sentence arbitrale interne pour la violation du droit à un procès équitable prévue dans la constitution, droit qui n’était pas respecté dans l’espèce. Or, la législation en matière d’arbitrage ne prévoit pas un recours en annulation de sentences arbitrales devant la Cour constitutionnelle pour violation des droits constitutionnels.
Si une telle décision d’inconstitutionnalité venait priver un investisseur de son investissement ou en affectait la valeur, le traité franco-colombien pourrait être invoqué pour obtenir compensation. C’est d’ailleurs une hypothèse bien réelle puisqu’elle a déjà été invoquée dans d’autres affaires impliquant d’autres États devant des tribunaux arbitraux CIRDI.

José J. Caicedo,
Avocat aux barreaux de Bogota et de Paris, Mayer Brown LLP

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