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Guide business Cameroun 2013

Les autorités camerounaises veulent faire du pays une économie émergente en 2035. Une ambition qui se heurte, néanmoins, à des freins sensibles, notamment la bureaucratie et la corruption. Car la patrie du président Biya a un besoin vital d’infrastructures (électricité, routes, rail, ports…) pour désenclaver le pays, la région et acheminer ses produits agricoles, forestiers et miniers. 

A Yaoundé comme à Douala, la capitale économique, on en parle peu, mais on y pense fortement. En l’absence de dauphin désigné, chacun s’interroge sur « l’après-Biya », le président camerounais – 32 ans au pouvoir – étant aujourd’hui âgé de 82 ans. Les acteurs économiques craignent l’incertitude. Une incertitude qui va à l’encontre même de l’ambition affichée par Paul Biya de transformer le Cameroun en une économie émergente en 2035. 
Retour en arrière. Le ministère de l’Économie, de la planification et de l’aménagement du territoire (Minepat) publie, en février 2009, la « Vision 2035 », un document de 65 pages qui va servir, en février 2010, de cadre au Document de stratégie pour la croissance et l’emploi (DSCE) transmis au Fonds monétaire international (FMI).

Cinq priorités sont alors affichées dans le DSCE : infrastructures de transport, production énergétique et télécommunications, secteur agricole et minier, amélioration de capital humain, intégration régionale et diversification des exportations, renforcement du secteur financier. Et surtout dans le scénario le plus optimiste de l’émergence, une croissance annuelle supérieure à 9 % est retenue à partir de 2015.
 
Fin 2013. On est en loin, le FMI indiquant, dans son dernier rapport de consultation, que « la croissance vigoureuse n’est pas suffisante pour que les autorités réalisent leur ambition de faire du Cameroun un pays émergent d’ici 2035 ». Ce que le secrétaire général du Minepat, Gilbert Edoa, reconnaît volontiers. « Le rythme de la croissance n’est pas suffisant. Nous prévoyions 5,5 % par an jusqu’en 2015. On n’y est pas », a-t-il indiqué lors d’un entretien exclusif accordé au Moci en septembre, à Yaoundé.
 
Selon lui, l’explication réside dans « le retard pris dans l’exécution des grands projets ». Par conséquent, en déduit-il, « dès que ces chantiers seront enfin lancés – ce qui est déjà le cas pour résorber le déficit en électricité avec la centrale à gaz de Kribi – la croissance sera boostée ». Encore faut-il que « de façon plus générale, les investissements publics soient concrétisés, bien et vite », commentent les entrepreneurs et familiers du pays. 
Selon eux, les chantiers seraient réalisés au compte-gouttes. La faute à l’Administration, qui, « malgré de beaux esprits en son sein », fait surtout preuve de faiblesse dans la gestion des dossiers. « Inertie », « incompétence », « manque de planification », les mots ne sont jamais assez durs pour qualifier la fonction publique. Sans parler de la corruption « de haut en bas ». Trois, quatre, dix ans « peuvent être nécessaires pour l’exécution d’un grand projet », résume ainsi, un peu désabusé, le représentant d’un bailleur de fonds.
 
Ce serait sans espoir ? Pas tout à fait, « même si on ne va pas changer les méthodes et les mauvaises habitudes en un jour », souligne un expert occidental, qui perçoit « un frémissement dans la gouvernance économique ». Et d’évoquer, comme d’autres, le rôle majeur du ministère des Marchés publics (Minmap). « Le ministre n’est pas fermé, il veut trouver des solutions, un suivi des dossiers a été mis en place, il souhaite injecter plus de fluidité », se félicite ainsi Hervé Conan, le directeur de l’Agence française de développement (AFD). 

Créé le 9 décembre 2011, alors que la Commission nationale anti-corruption (Conac) estimait que la corruption touchait 75 % des marchés publics, le Minmap a jusqu’à présent entretenu des relations compliquées avec les ministères techniques. Au point que certains projets ont été bloqués ces deux dernières années. Très récemment, les ministères techniques et les bailleurs de fonds ont obtenu un relèvement des seuils. De fait, depuis le 5 août dernier, la compétence du Minepat pour les marchés publics centraux a été réduite pour les routes (seuil relevé de 500 millions à 5 milliards de francs CFA), les autres infrastructures (seuil relevé de 500 millions à 1 milliard), le bâtiment (de 200 à 500 millions), etc. L’objectif est double : à la fois redonner du poids et de la compétence aux acteurs traditionnels et libérer le ministère des Marchés publics, de façon à ce qu’il se concentre sur les grands projets uniquement.
 
Parallèlement, le gouvernement serait prêt aujourd’hui à encourager les partenariats privé-public (PPP). « L’État camerounais est plutôt centralisateur », lâche un diplomate européen, qui estime qu’il faut du temps pour que le concept de PPP, « qui fait appel au secteur privé », soit accepté par l’Administration. Au demeurant, l’expertise en la matière fait encore défaut.

Si l’idée fait, néanmoins, son chemin, c’est que les PPP restent une compétence ministérielle. Ensuite, l’agence du Minepat chargée d’évaluer les projets, le Conseil d’appui à la réalisation des contrats de partenariat (Carpa) monte en puissance. Quand Le Moci a rencontré à Yaoundé le coordinateur du secrétariat technique du Carpa, Justin Ntsama, cet ingénieur hydro-électricien, ancien cadre de Rio Tinto Alcan, travaillait sur le projet de port en eau profonde de Limbé. D’autres projets seraient très avancés, comme le terminal à conteneurs de Kribi ou l’autoroute Edea-Kribi.

Une autre avancée notable est la programmation pluriannuelle prévue dans la nouvelle loi de finances, ce qui va permettre de « fluidifier » la réalisation des grands investissements publics. « Il faudra un à deux ans pour parvenir à une bonne exécution et il convient aussi de travailler sur le climat des affaires qui est mauvais. Mais la nouvelle loi d’incitation pour l’investissement, même si elle n’est pas parfaite, va dans le bon sens », estime un observateur économique.
 
« En 2010, les investissements (surtout locaux) avaient connu une baisse drastique parce qu’on avait supprimé des avantages fiscaux. Non seulement on remet des avantages, mais on ne les donne pas seulement à l’industrie et on introduit quatre critères », explique Maryse Meyo Akoulouze, cadre juriste à l’Agence de promotion des investissements (API). Un seul critère parmi les suivants doit être satisfait pour bénéficier des incitations : taille de l’entreprise, emplois créés, utilisation des ressources locales, taux d’exportation (10 à 25 %).
 
« Nous attendions cette loi sur l’investissement et ses décrets d’application depuis dix ans », se réjouit, pour sa part, André Fotso, le président du Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam), qui se félicite aussi de l’évolution du dialogue public-privé, notamment dans le cadre du Cameroun Business Forum (CBF) sur l’environnement des affaires (dématérialisation des procédures administratives pour réduire la corruption et l’inertie, création d’un guichet unique pour la création d’entreprises en huit heures, etc.). Le CBF, dans lequel s’est fortement impliquée la SFI (Société financière internationale), est présidé chaque année par le Premier ministre. 
« Dans les trois ans, les investissements auront doublé, voir triplé », s’enthousiasme Maryse Meyo Akoulouze. Américains, Indiens, Camerounais se succèderaient aujourd’hui dans son bureau. Mais aucun Français jusqu’à présent. À son grand regret…

De notre envoyé spécial François Pargny


Chiffres clés en 2012 (prévisions 2013)


Superficie : 475 442 km2
Population : 21,73 millions d’habitants
Produit intérieur brut : 25,16 milliards de dollars (28,056 milliards de dollars)
Croissance économique : 4,4 % (4,8 %)
Inflation : 2,4 % (2,5 %)
Exportations de marchandises : 4,584 milliards de dollars
Importations de marchandises : 6,512 milliards de dollars
Solde courant : – 0,9 milliard de dollars (- 1 milliard de dollars)
Solde budgétaire (en % du PIB) : – 2 % (- 5,3 %)
Dette totale (% du PIB) : 15,9 % (19,3 %)

Source : Service économique régional (SER) à Douala

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