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Trois questions à Madeleine Nguyen-The, consultante et fondatrice du cabinet International Pratique

« Le FCA commence enfin à détrôner le FOB »

Spécialiste des Incoterms, Madeleine Nguyen-The accompagne depuis plusieurs années les entreprises en tant que consultante en commerce international du cabinet International Pratique. Auteur d’Importer (Editions Eyrolles), elle a suivi de près la rédaction de la dernière révision des Incoterms élaborée par l’ICC (International Chamber of Commerce) et livre au MOCI son premier constat de l’utilisation sur le terrain des Incoterms 2010.

Le Moci. Pouvez-vous tirer un premier constat de l’utilisation des Incoterms 2010 par les entreprises ?

Madeleine Nguyen-The. Beaucoup d’entreprises continuent d’utiliser les Incoterms 2000 par habitude ou par crainte de devoir renégocier certains points du contrat, ou tout bêtement parce que les nouveaux paramétrages informatiques ne sont pas prêts. Certains changements ont néanmoins été plus aisés que d’autres. Ainsi, le DDU a vite été remplacé par le DAP et on note un accroissement de l’utilisation des FCA/CPT/CIP au détriment des EXW/CFR/CIF. Le message de l’ICC sur le risque de doublon des THC (Terminal Handling Charges) en maritime semble avoir été entendu : les cotations maritimes sont plus transparentes et les entreprises plus vigilantes à ce sujet. Par ailleurs, le FCA commence enfin à détrôner le FOB, notamment pour les envois en groupage hors crédit documentaire : le vendeur est ravi de pratiquer un « FCA rendu transitaire portuaire » afin de ne plus être tributaire de son client pour la « mise à FOB ». De plus, les financiers peuvent constater le chiffre d’affaires plus tôt, le transfert des risques intervenant avant le chargement.

Le Moci. Les exportateurs sont plus désireux de conserver la main sur la douane export. En ont-ils toujours les moyens ?

M.N.-T. Si les entreprises utilisent l’EXW, il leur est difficile de s’assurer du bon retour des justificatifs de vente hors taxe, particulièrement pour les camions complets à destination des pays d’Europe de l’Est (Russie par exemple). L’EXW est en effet un Incoterm « domestique », à utiliser lorsqu’il n’y a pas de formalités douanières requises. Au grand export, l’ICC nous demande à juste titre de le remplacer par le FCA « locaux du vendeur » permettant au vendeur de confier la déclaration douanière export à son déclarant en douane : meilleur contrôle sur les éléments déclarés et sur le retour de la preuve de sortie de l’UE. Or, si le vendeur n’est pas en procédure de dédouanement à domicile, ou bien géographiquement proche de son commissionnaire agréé en douane, il est souvent difficile d’obliger un chauffeur russe à faire un détour chez le prestataire du vendeur pour récupérer la déclaration douanière avec laquelle il doit partir. Les exportateurs sont donc parfois obligés de s’incliner devant l’insistance du client qui souhaite garder la main sur la douane export. Nous invitons dans ce cas les vendeurs à insérer une clause dans leurs conditions de vente exigeant de l’acheteur le retour de la preuve douanière de sortie communautaire, sous peine de lui répercuter les éventuelles amendes fiscales…

Le Moci. Sur le terrain, plusieurs entreprises soulignent la résistance des transitaires et compagnies maritimes à utiliser le FCA pour les conteneurs complets. Qu’en pensez-vous ?

M.N.-T. C’est une réalité que nous avons du mal à expliquer. Le FOB n’est pas un Incoterm adapté aux conteneurs, unité multimodale remise à la compagnie maritime choisie par le client bien avant le chargement. Or, on constate que 95% des frets maritimes laissent encore les THC port départ à la charge du vendeur alors qu’on nous annonçait une tendance à inclure ces frais dans le fret maritime. Les transporteurs préfèrent-ils facturer les chargements aux exportateurs plutôt qu’à un hypothétique acheteur ? Ont-ils des intérêts financiers à facturer ces frais à l’exportateur ? Les procédures portuaires prévoient-elles la clôture de l’opération après chargement ? Et si les deux parties préfèrent que le vendeur charge à bord navire, notamment en cas de paiement par crédit documentaire ? Du coup, sur le terrain, les entreprises voulant suivre les préconisations de l’ICC de supprimer le FOB tout en s’inclinant devant les exigences de leurs clients ou les refus des compagnies maritimes de changer leurs pratiques ont dû développer le « FCA chargé à bord navire ».

Propos recueillis par Isabelle Verdier

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