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Trois questions à Carsten Dannöhl, conseiller principal au département Affaires Internationales chez Business Europe

Le Moci. Quels seraient pour les entreprises européennes les bénéfices d’un accord de libre-échange ?
Carsten Dannöhl. Le Japon est un des grands partenaires commerciaux de l’Union européenne, mais on constate que nos entreprises rencontrent, et ce depuis très longtemps, de grandes difficultés à pénétrer le marché japonais. Malgré, plusieurs sessions de dialogue sur les questions réglementaires, dans le passé, on n’a pas remarqué d’améliorations notables. Prenez, par exemple, le taux d’investissement, il est le plus faible de tous les pays de l’OCDE, ce qui est un bon indicateur des obstacles rencontrés là-bas. Ce sont les barrières non tarifaires (procédures, tests de conformité, etc.) qui posent le plus de problèmes. Toutes ces difficultés, très spécifiques au Japon, rendent son marché impénétrable et donc moins intéressant.

Le Moci. Quels sont les secteurs les plus intéressés par la conclusion d’un ALE avec le Japon ?
C.D. Certains secteurs sont moins intéressés que d’autres par la conclusion d’un accord. Parmi ceux qui soutiennent les négociations figurent notamment l’industrie chimique, l’agroalimentaire ou les services. Mais, globalement, tous réclament un accord équitable et le même accès au marché japonais qu’à celui de l’UE. Le pays a fixé des droits de douane très bas, sauf bien sûr dans quelques secteurs comme l’agroalimentaire ou l’agriculture. Mais sur les biens industriels ils sont très bas, voire inexistants. Le problème est d’obtenir, à l’avenir, le même degré d’ouverture, et les mêmes conditions d’accès au marché. Si l’élimination des droits de douane est une procédure plutôt facile, la levée des barrières non tarifaires est beaucoup plus complexe. Elles touchent à des sujets plus sensibles comme les standards en matière de sécurité ou d’environnement.

Le Moci. Pour les Japonais, les concessions européennes dans l’automobile sont un élément majeur des négociations. Pour rassurer leurs interlocuteurs, ils insistent sur leur volonté d’investir. Cela vous paraît-il crédible ?

C.D. Les investissements japonais en Europe existent déjà, prenez le cas de Toyota à Valenciennes ou de Honda, notamment en Angleterre. Mais il y a aussi certains modèles, produits aujourd’hui seulement pour le marché japonais, qui seront probablement exportés vers l’UE en cas d’accord.
Rappelons que le modèle japonais a toujours été tourné vers les exportations, même si depuis il y a eu des changements de mentalité là-bas. Les japonais souhaitent certainement exporter plus, notamment du fait de la concurrence avec la Corée du Sud. La signature d’un ALE Union européenne/Corée du Sud a provoqué une sorte de révélation au Japon. Si on regarde quelques années en arrière, l’agenda était clairement orienté vers les Etats-Unis, pas vers l’Union européenne.

Le Moci. Quelles sont les lignes rouges à ne pas dépasser ?
C.D. Si nous estimons que l’accord devra être très ambitieux, l’élimination des barrières non tarifaires, identifiées depuis très longtemps, constitue pour nous un préalable non négociable. Les dossiers qui seront de ce fait abordés risquent d’être très complexes, notamment dans les domaines de la politique d’investissement ou de l’accès à de nouveaux marchés publics.

Ainsi, la poste japonaise, dont les activités ne se limitent pas au courrier mais aussi à la finance et aux assurances, domine toujours le marché. Son ouverture pour encourager la concurrence serait un signal fort. Même chose pour le secteur ferroviaire. L’utilisation de la clause de sécurité opérationnelle peut éventuellement se justifier, mais elle sert surtout à fermer l’accès des opérateurs étrangers au marché japonais. Au Japon, les procédures concernant les marchés publics sont très opaques et, dans le domaine ferroviaire, les fournisseurs étrangers ne détiennent que 0,3 % de part de marché. Donc, ce qui est important, c’est d’obtenir des résultats très concrets, une condition nécessaire pour que l’industrie reste mobilisée. Nous avons des échanges réguliers avec la Commission européenne et nous espérons être consultés à chaque étape du processus de négociation.

Propos recueillis à Bruxelles par Kattalin Landaburu

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