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Guide business Egypte 2016

L’Égypte est en voie de sortir des années de marasme économique qui ont suivi la révolution. La croissance est de retour et les investisseurs répondent présents. Le pays possède un énorme marché et une position stratégique, mais il doit aussi affronter des problèmes de taille, dont le plus urgent : les restrictions sur les devises étrangères.

 

L’Égypte est-elle sortie d’affaire ? Le plus grand pays arabe a retrouvé la stabilité politique depuis l’arrivée au pouvoir d’Abdel Fattah Al Sissi, élu en juin 2014. L’ex-maréchal a promis le retour à la sécurité et la relance de l’économie, alors en plein marasme. De fait, la croissance a atteint 4,2 % en 2015, alors qu’elle stagnait autour de 2 % depuis la révolution de 2011. Rien à voir, pourtant, avec la croissance de 6-7 % de la fin des années 2000.

Après avoir paré au plus urgent – relancer le secteur de l’énergie, enrayer la chute des réserves de devises étrangères, maîtriser le déficit –, le gouvernement fait désormais face à la panne des trois rentes traditionnelles de l’économie. Longtemps exportatrice d’hydrocarbures, l’Égypte est devenue importatrice nette à cause de son dynamisme démographique et du manque d’investissement dans le secteur. Les revenus du canal de Suez sont pour leur part en baisse, subissant le ralentissement des échanges globaux. Enfin, le nombre de touristes a connu une chute spectaculaire, passant de 13,4 millions en 2009/2010 à 10,2 millions en 2014/2015.

Pour redémarrer l’économie, le président Sissi a décidé de miser sur les mégaprojets. « Comment lancer ces mégaprojets alors que l’État n’a pas les fonds nécessaires ? Pour remédier à ce problème, la solution est d’accueillir un flux important d’investissements étrangers. Cela permet de faire baisser le déficit et l’inflation, tout en permettant l’expansion de l’économie », analyse Amr Adly, chercheur au Carnegie Middle East Center. C’était l’objectif de la conférence économique de Charm el Cheikh, en mars 2015. Le Caire y a annoncé la signature de 33 milliards d’euros de contrats, dont les plus importants dans l’énergie.

Les mégaprojets envisagés vont de la construction d’une nouvelle capitale à celle d’un centre d’échanges international pour les céréales, en passant par de grands projets de bonification de terres désertiques ou encore l’agrandissement du canal de Suez. C’est ce dernier qui, jusqu’à aujourd’hui, a le plus attiré les projecteurs. Le 6 août 2015, un an seulement après son lancement, le président Sissi inaugurait en grande pompe une extension de 72 kilomètres de long, qualifiée de « Nouveau canal de Suez ». Le nouvel homme fort du pays envoyait là un message au monde : l’Égypte est de nouveau gouvernée, et elle est de retour sur la scène internationale, politiquement et économiquement.

Le « nouveau » canal a été certes réalisé en un temps record, et essentiellement financé par les Égyptiens eux-mêmes à hauteur de 7,2 milliards d’euros, mais aucune étude de faisabilité n’a été réalisée. Le gouvernement veut faire passer les revenus issus de cet axe majeur du commerce mondial de 5 milliards d’euros à 12 milliards en 2023. Pourtant, à cause du ralentissement du commerce mondial, les revenus sont passés de 5 milliards d’euros en 2014 à 4,7 milliards d’euros en 2015. « Le gouvernement n’a pas de stratégie, il se contente de gérer les crises », lance Amr Adly.

Malgré ces incertitudes, le pays attire incontestablement les investisseurs. « Lors de la dernière année fiscale, en 2014-2015, l’Égypte a reçu le plus haut montant d’investissements directs étrangers depuis la révolution », indique Mohamed Abu Basha, économiste de la banque d’investissement égyptienne EFG-Hermes. Les investissements dans les hydrocarbures, qui représentent toujours 40 % des exportations du pays selon Amr Adly, ont notamment repris. Ils ont permis la découverte du grand champ gazier d’El Zohr, qui pourrait permettre à moyen terme de couvrir les besoins domestiques de l’Égypte. Selon la banque centrale égyptienne, les investissements directs étrangers (IDE) ont bondi de 54,6 % par rapport à l’année précédente pour atteindre 6,37 milliards de dollars.

Car le pays bénéficie de solides atouts. D’abord, son vaste marché de 90 millions d’habitants est en forte augmentation – 2 millions d’habitants en plus chaque année. Conséquence, « le marché de la distribution est en plein développement. Et, alors que la majorité de la population s’intéresse aux produits basiques, l’existence d’une importante classe moyenne supérieure à fort pouvoir d’achat permet d’offrir toute la gamme distribuable », relève un observateur économique au Caire.

Le pays possède en outre des infrastructures solides, quoique vétustes, mais qui font l’objet d’une modernisation, en particulier dans l’énergie. Et, pour les industriels, la place de l’Égypte est idéale : aux carrefours de l’Afrique, de l’Europe et du Moyen-Orient, avec un axe d’importance globale, le canal de Suez.

Le gouvernement tente de sécuriser ces avantages en réalisant des réformes attendues depuis longtemps. Pour la première fois, il s’est attaqué aux subventions, qui représenteraient près de 20 % du budget de l’État. Un système de carte à puce a révolutionné les subventions de farine et les subventions à l’énergie ont été diminuées. « Avec le service de la dette, elles constituent la plus grosse dépense de l’État. Avec ces réformes, l’État pourra rediriger les économies réalisées vers l’investissement, mais aussi sur les infrastructures ou encore l’éducation, totalement défaillante », analyse Amr Adly.

Autre réforme emblématique, la loi sur l’investissement a été promulguée au début de la conférence de Charm el Cheikh. Elle doit faciliter les démarches des investisseurs, en mettant notamment en place un guichet unique. Son manque d’ambition a néanmoins été critiqué par les acteurs économiques. Et la taxe sur la valeur ajoutée, réclamée par les bailleurs de fonds internationaux, n’a toujours pas été mise en place.

Pour Mohamed Abu Basha, « la priorité doit d’abord être donnée à la résolution du problème de pénurie des devises étrangères ». Les réserves de devises ont en effet connu une chute spectaculaire : elles sont passées de 35 milliards de dollars début 2011 à 16 milliards de dollars aujourd’hui. Résultat : la banque centrale a limité le dépôt de devises étrangères à 50 000 dollars par mois et 10 000 dollars par jour. Début février, elle a assoupli cette restriction pour les importateurs de produits alimentaires basiques, de machines industrielles et de pièces détachées, de matières premières et de biens intermédiaires dans l’industrie manufacturière, les médicaments et les vaccins. Pour ceux-là, la limite quotidienne disparaît et les dépôts sont limités à 250 000 dollars par mois.

L’essentiel des 23 milliards de dollars d’aide des pays du Golfe depuis deux ans visait à limiter cette pénurie, au travers notamment de dépôts de devises à la banque centrale. Mais les restrictions frappent de plein fouet les investisseurs internationaux. Le mois dernier, General Motors a suspendu temporairement sa production en Égypte, selon l’agence Reuters. « La conséquence est que les entreprises totalement égyptiennes se retrouvent favorisées », relève Karen Weick, dirigeante de l’entreprise de marketing et communications Mortimer Harvey Africa Middle East, basée au Caire.

Alors que ces défis devront être relevés le plus tôt possible, le président Sissi poursuit son opération séduction tous azimuts. Le 20 février, il ouvrait le forum Africa 2016, qui réunissait les pays africains dans une optique économique dans la station balnéaire égyptienne de Charm el Cheikh. Le président égyptien a appelé à « encourager le commerce et les investissements sur notre continent », espérant ainsi placer l’Égypte comme pont entre l’Afrique et le reste du monde.

Rémy Pigaglio au Caire

 

 

Chiffres clés
Superficie : 1 002 000 km² (source : Maedi)
Population : 90 millions d’habitants (Capmas)
Produit intérieur brut : 260 milliards d’euros (2013-2014) (Autorité générale pour l’investissement et les zones franches (GAFI)
Produit intérieur brut par habitant : 3 310 euros (2013-2014) (Autorité générale pour l’investissement et les zones franches – GAFI)
Croissance économique : 4,2 % (2015)
Inflation : 11,06 % (2015) (Banque centrale d’Égypte)
Chômage : 13,2 % (PNUD)
Exportations de biens : 23,7 milliards d’euros (2013-2014) (Direction générale du Trésor)
Importations de biens : 54,3 milliards d’euros (2013-2014) (Direction générale du Trésor)
Exportations françaises : 2,111 milliards d’euros (2015) (Ambassade de France)
Importations françaises : 473 millions d’euros (2015) (Ambassade de France)

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