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French Touch 2018 : entretien avec Gérard Wolf

Gérard Wolf, fédérateur de la famille de produits prioritaires à l’export Ville durable.

 

 

 

 

 

Le Moci. Le ministère de l’Europe et des affaires étrangères a créé cinq familles de produits prioritaires à l’export. Toutes sont sectorielles – agroalimentaire, santé, énergies renouvelables, industries culturelles et créatives –, sauf celles dont vous êtes en charge, la Ville durable. Pourquoi ?

Gérard Wolf. Vous connaissez la capacité du Village gaulois à se taper dessus, comme dans Astérix. C’était un constat que nous avions fait au Medef International et qui nous avait conduits à créer en octobre 2014 une Task Force Ville durable, dont on m’a confié la présidence. Nous avons ainsi réussi à réunir des entreprises, avec des savoir-faire très différents, tous concernés par l’urbanisation, au point que la Task Force en rassemble aujourd’hui 550, des start-up, des PME, des ETI et de grands groupes actifs à l’international, sur tous les métiers de la chaîne de valeur de la ville.

Tous travaillent autour de projets concrets et acceptent de valoriser les offres françaises au travers d’actions collectives. Ce qui est vital pour la filière. Que vous preniez un pays très centralisé, comme l’Égypte, ou décentralisé, avec des régions fortes, à l’instar du Brésil, ou encore une nation en pleine évolution, comme le Maroc, on ne peut pas concevoir une ville durable par la simple addition de travaux d’infrastructure. En même temps, la pression urbaine est telle, dans le monde mais aussi dans un même pays, que l’on ne peut pas tout faire.

Pensez au Caire, un million d’habitants en plus tous les 24 mois. Au Brésil, la population urbaine grossit tous les jours. Résultat, ça se dégrade et se traduit par plus de favelas. À Dakar, c’est environ 100 000 habitants de plus tous les ans. Dans tous ces pays, il faut des solutions inclusives, si on ne veut pas s’adresser seulement à la frange des 30 % des plus riches. L’exclusion d’habitants risque d’y créer l’insécurité et l’instabilité.

 

Le Moci. Comment êtes-vous devenu le fédérateur de la famille Ville durable ?

G. W. La France dispose d’un très bon réseau diplomatique, avec les ambassades, les services économiques et les opérateurs étatiques. Les entreprises sont sur toute la chaîne de valeur, avec leurs planificateurs, ingénieristes, urbanistes, architectes, constructeurs de maisons, d’infrastructures, leurs spécialistes des transports publics, de l’eau, de l’électricité, des déchets, des connexions.

Depuis la seconde guerre mondiale, avec le plan Marshal et la reconstruction, la France a acquis une véritable expérience, ce qui explique qu’elle abrite des spécialistes mondialement reconnus. La Task Force a réussi à mobiliser et rassembler le secteur privé. Du côté de l’Etat, quand Nicole Bricq était ministre du Commerce extérieur, avaient été créées en décembre 2012 des familles de produits prioritaires à l’export.

C’est ainsi que le 20 avril 2016 j’ai été nommé le fédérateur pour la Ville durable par le ministre des Affaires étrangères. J’ai été reconduit par l’actuelle équipe en place, officiellement le 23 février quand le Premier ministre a annoncé la nouvelle stratégie de la France en matière de commerce extérieur. Le fédérateur aide à faire converger tous les acteurs de l’écosystème ensemble, les acteurs publics, bien sûr, mais aussi les acteurs privés, Medef International, Business France, l’Agence française de développement (AFD), l’association d’industriels Vivapolis, les chambres de commerce et d’industrie présentes à l’international. Notre objectif est que l’Équipe de France soit présente sur ce sujet majeur des villes durables.

 

Le Moci. Et ça marche ?

G.W. Oui et non. Ça marche si les petites tribus gauloises acceptent de travailler ensemble. La création de clubs locaux Ville durable dans des grandes capitales a ainsi permis à « Astérix » de voyager en terre étrangère et de répondre à des offres collectivement, comme en Côte d’Ivoire. Par exemple, c’est, suite à la délégation de la Task Force de juillet 2017 qu’un consortium d’entreprises, composé d’Alcor Equipements, de Baudin Chateauneuf, d’Egis, du cabinet d’architectes SCAU et de Sogea Satom (Vinci), a remporté l’appel d’offres d’une valeur de 75 millions d’euros pour la construction du stade de Yamoussoukro prévu pour la Coupe d’Afrique des Nations en 2021.

Il y a deux ans, on a également créé un club en Égypte, qui compte aujourd’hui 76 entreprises. En Inde, elles sont 75 entreprises. Il y a encore des clubs en Afrique du Sud, au Chili et au Brésil et, depuis le 9 juillet, au Kenya. Le fédérateur ne peut pas tout faire à lui seul. Les clubs permettent de démultiplier les efforts faits au niveau central et de faire remonter de l’information directement par les entreprises, les ambassades, les Services économiques ou les bureaux à l’étranger de Business France.

La Task Force permet aux entreprises de se rencontrer pour développer des solutions communes. Business France s’adresse principalement aux primo-entrants à l’export qui apprennent ainsi à se repérer à l’étranger avec les équipes locales de l’agence publique. Les CCI et les conseillers du commerce extérieur de la France sont indispensables pour nouer des partenariats locaux qui soient stables pour que ça dure. De même, l’AFD possède des responsables Ville durable un peu partout dans le monde. Ils connaissent bien le terrain et sont d’une aide précieuse. Quant à Vivapolis, cette association fonctionne comme un cluster. Ses membres mettent en œuvre des solutions innovantes, ce qui est très utile pour travailler à l’étranger. Sauf que souvent ce sont des « petits » projets, type éco-quartiers, alors que ce sont des réalisations beaucoup plus ambitieuses qui sont envisagées hors de France : une ou plusieurs villes. Mais ça ne diminue pas l’effet positif.

 

Le Moci. Pierre Gattaz s’est rendu en Inde à la tête d’une délégation de 60 entreprises du 24 au 29 septembre 2017, soit quelques mois avant la visite d’État d’Emmanuel Macron, du 10 au 12 mars 2018. Quels sont les enjeux dans cet immense pays ?

G. W. L’enjeu est considérable, puisque le gouvernement du Premier ministre Modi désire développer un programme très ambitieux de 108 villes durables, dont 99 sont déjà labellisées. La Confederation of Indian Industry (CII) nous a fait comprendre que l’Inde avait besoin de partenaires. C’est pourquoi un Memorendum of Understanding (MOU) a pu être signé entre la Task Force et la CII lors de la visite d’État du Président Macron. Auparavant, nous avons constitué un club Ville durable, et nous l’avions fait dès le 1er juillet 2016. Lors de la visite du président de la République, le directeur général de l’AFD, Rémy Rioux, a annoncé que 100 millions d’euros seraient dévolus à des études de faisabilité pour les villes durables indiennes.

Le fédérateur doit connaître ce que font le Medef International, l’AFD, Business France, les ministères : MEAE, ministère de l’Économie et des finances (Minefi), ministère de la Transition économique et solidaire (MTES), etc. C’est à lui de se bouger dans ce sens. Il faut un programme cohérent. C’est ainsi que nous sommes en train d’identifier ensemble une vingtaine de villes en Inde. Nous regardons l’intérêt que représentent les différents États fédérés de la République d’Inde. Certains nous connaissent déjà, ce qui peut présenter un avantage. En somme, nous faisons tout, tous ensemble, pour ouvrir de nouvelles opportunités aux entreprises françaises, PME comme grands groupes, sur ce marché indien qui est colossal.

Propos recueillis par François Pargny

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