CCI France International a tenu le 15 octobre la 5e édition de son « forum booster Europe », en partenariat avec le Moci et le Crédit Agricole. L’occasion de faire un tour des marchés les plus porteurs sur le Vieux Continent alors que la conjoncture européenne commence à reprendre des couleurs.
Alors que les États-Unis et la Chine connaissent une phase de repli, les entreprises tricolores souhaitant se projeter à l’international pourraient être bien inspirées de prospecter des marchés plus proches et d’un accès plus simple. D’autant que la conjoncture du Vieux Continent commence à sortir de l’atonie.
« La perspective de croissance pour la zone euro en 2025 est désormais de 1,3 % alors qu’elle a plafonné à 0,8 % en 2024, détaille l’économiste Isabelle Job-Bazille, directrice des études économiques du Crédit Agricole. Ce retour du dynamisme de la croissance s’appuie sur un peu plus de consommation, même si les Européens épargnent également davantage, sur un assouplissement des conditions de financement et donc sur les investissements des entreprises, même d’ils demeurent prudents. »
Cette timide reprise de la conjoncture européenne est par ailleurs contrastée, certains pays tirant mieux leur épingle du jeu que d’autre. Tandis que la France est enlisée dans une crise politique et budgétaire et l’Allemagne dans une crise de modèle avec la fin du gaz russe, d’autres marchés affichent aujourd’hui des perspectives plus prometteuses. Petit tour d’horizon, avec les représentants de CCI françaises à l’étranger de ces économies qui vont bien.
Europe du Nord : Allemagne, Belgique Royaume-Uni, Pays-Bas, Finlande
Allemagne
La première économie de l’UE (elle représente 24 % de son PIB), même si elle sort d’une période de récession, reste incontournable.
Au printemps, le gouvernement a lancé un plan d’investissements de 500 milliards d’euros (Md EUR) sur 12 ans destinés à la rénovation des infrastructures, dont 100 Md EUR réservés aux communes et aux Länder et 100 Md EUR fléchés vers le Fonds climat et transformation (KTF). Le KTF doit permettre de financer la modernisation des routes et des ponts, des réseaux de transport d’énergie ou encore les hôpitaux.
Belgique
Pays en partie francophone, la Belgique est une destination de choix pour les primo-exportateurs. En juin dernier, le royaume a adapté son plan relance post-Covid de 5 Md EUR (et 244 M EUR de prêts à taux avantageux).
Si certains projets ont été retirés (notamment en médecine nucléaire, dans les infrastructures énergétiques et la cybersécurité, d’autres ont vu le jours notamment dans la protection de l’environnement marin et l’énergie offshore.
Royaume-Uni
Malgré une inflation toujours forte et des difficultés budgétaires, le PIB britannique a progressé de 0,1 % en août, selon l’Office national des statistiques (ONS).
Non seulement le Royaume-Uni demeure une destination de choix pour certains secteurs tricolores comme l’agroalimentaire ou le vin, malgré le Brexit, mais le gouvernement a doté son programme d’investissements de 86 Md EUR, axé sur les projets scientifiques et techniques ainsi que la R&D. De plus, les relations franco-britanniques, bousculées par le Brexit, ont commencé à se réchauffer l’été dernier.
Pays-Bas
Économie la plus ouverte d’Europe et important hub logistique grâce au port de Rotterdam, les Pays-Bas ont beaucoup misé sur les investissements dans l’innovation appliquée à l’agriculture. Mais d’autres secteurs bénéficient d’un plan d’investissements publics de 150 Md EUR : infrastructures, défense, énergie, digitalisation et santé.
Finlande
Plus petit marché présenté lors de ce forum, la Finlande n’en compte pas moins 178 entreprises françaises implantées sur place.
Malgré un certain nombre de faiblesses structurelles (dont le vieillissement de sa population), le gouvernement table sur un rebond progressif de l’activité avec une croissance de 1,5 % cette année et de 1,6 % l’an prochain. Cette reprise est motivée par la demande interne qui continue à bénéficier de l’assouplissement des conditions financières pour les ménages et les entreprises.
Europe du Sud : Portugal, Espagne, Italie, Grèce, Turquie
Portugal
Retour du tourisme, industrie manufacturière en hausse, excédent budgétaire… Le Portugal s’est transformé en 15 ans, au prix d’une politique d’austérité qui a pu être douloureuse. Aujourd’hui le pays attire des investisseurs dans des secteurs innovants.
Airbus a ainsi récemment ouvert son laboratoire d’innovation de 3 000 employés à Lisbonne. Pays qui comptait parmi les mauvais élèves de l’UE, le pays a renoué avec la croissance. Le 7 octobre, la Banque du Portugal a revu ses prévisions de hausse du PIB de 1,6 % à 1,9 %, portée par la consommation privée.
Espagne
Le « miracle espagnol » continue. Après s’être affichée en hausse de 3,2 % en 2024, son PIB devrait à nouveau progresser cette année, à 2,5 % cette année, selon les prévisions du FMI, soit 0,2 pp en plus qu’attendu.
Cet autre ancien mauvais élève de l’UE, aux côtés du Portugal, de l’Italie et de la Grèce, a mis à profit son plan de relance pour augmenter les dépenses publiques et diversifier le tourisme, moteur de la croissance depuis la fin de la crise sanitaire. Le dynamisme du marché de l’emploi et des conditions de financement plus souples soutiennent le dynamisme de la croissance.
Italie
La mise en place, au sortir de la crise sanitaire, du Superbonus (un dispositif d’incitation à la rénovation énergétique) sur fond d’accélération de la construction résidentielle a permis à l’économie italienne de croître de 1,1 % en moyenne entre 2019 et 2024. Exprimé en parité de pouvoir d’achat le PIB par habitant est désormais équivalent à celui de la France.
Grèce
Autre pays pouvant se targuer de sortir d’une période d’austérité, la Grèce revient de loin. L’endettement du pays, qui atteignait 207,6 % du PIB en 2020 pourrait passer sous la barre des 140 % en 2027, selon les prévisions du gouvernement. La croissance a atteint 2,3 % en 2024 et vise 2,2 % cette année.
Europe centrale : Serbie, Roumanie, Pologne
Serbie
Malgré un retour de l’inflation au premier trimestre de cette année, l’économie serbe poursuit sur sa lancée, impulsée après la fin de la pandémie de Covid-19. Tirée par les investissements, tant publics qu’étrangers, et par une solide demande domestique, la croissante a atteint 3,8 % en 2023 et 2024. Infrastructures et BTP, environnement, efficacité énergétique, nouvelles technologies…
Les projets sont nombreux et en partie liés à l’organisation de l’Exposition universelle à Belgrade en 2027.
Roumanie
Fiscalité attractive, main d’œuvre qualifiée, important flux de fonds européens (le pays en est le deuxième bénéficiaire), la Roumanie multiplie les projets dans des secteurs aussi variés que les ENR, le gaz, le nucléaire (développement des SMR), la défense, les infrastructures (port de Constanța, réseau autoroutier…) ou encore les nouvelles technologies (data centers, cloud, cybersécurité…).
Pologne
La principale économie de la région, qui avait particulièrement bien résisté à la crise sanitaire, continue de progresser malgré la guerre en Ukraine. Son PIB devrait augmenter de 3,4 % cette année et la consommation des ménages est au beau fixe.
Les opportunités sont nombreuses pour les entreprises étrangères en particulier dans les secteurs de la transition énergétique (photovoltaïque, éolien, biogaz et biométhane), l’automobile, les TIC et l’IT, l’agroalimentaire mais aussi la défense.
Sophie Creusillet