Cinq ans après sa création, la startup lyonnaise de la Deep tech industrielle est présente dans 13 pays avec ses portiques d’inspection automatisée pour véhicules d’occasion. Après le Maroc et l’Europe, cette habituée du CES de Las Vegas s’apprête à conquérir le marché américain.
Trois secondes. C’est le temps qu’il faut au Car Station 360, selon ses concepteurs, pour passer au crible la carrosserie d’une voiture et inventorier les éventuels impacts, bosses et rayures. Soit un gain de temps précieux par rapport aux 30 minutes d’inspection visuelle habituellement nécessaires aux constructeurs, loueurs, usines de reconditionnement et concessionnaires afin de juger de l’état d’un véhicule.
Le secret de ce portique ? La computer vision ou « vision par ordinateur ». Cette brique de l’intelligence artificielle permet d’analyser et de traiter d’importantes quantités d’images ou de vidéos grâce à un système d’acquisition.
« Nous avons constitué une bibliothèque de dommages, explique Cédric Bernard, président et cofondateur de ProovStation. Les dommages peuvent varier en fonction des pays et notre présence à l’international permet de l’enrichir en permanence. Par exemple, au départ, nous avions du mal à bien détecter le polissage des verres par le soleil, mais la collecte de données dans des pays comme l’Espagne ou l’Italie permet au système de s’améliorer. »
Des partenariats avec de grandes entreprises internationalisées
Si l’international offre des relais de croissance à la jeune pousse, il est donc également un atout sur le plan technologique. « Comme nos clients ont tous au minimum une dimension européenne, l’international était présent dès le départ », ajoute le dirigeant. Pour le fils du P-dg du groupe de concessions automobiles Bernard, dont il a dirigé le département innovation, cette particularité est également une aubaine sur le plan commercial. La jeune pousse de 60 personnes fraye en effet avec de grandes entreprises internationalisées depuis sa naissance, en 2018.
Le projet du CarStation 360 a d’abord été développé avec le soutien de l’entreprise familial, troisième distributeur automobile en France, avant de séduire des multinationales comme le loueur allemand Sixt, la place de marché britannique BCA (British Car Auctions), le constructeur franco-japonais Renault Nissan Mitsubishi, le reconditionneur anglais Aston Barclay, les carrossiers franco-roumain WHS, italien Inova ou allemand DRS.
En France, Proovstation a noué un partenariat avec Carrefour pour installer ses portiques sur les parkings des supermarchés de l’enseigne et BCA. Chaque automobiliste qui passe (gratuitement) son véhicule à l’inspection obtient une proposition de rachat ferme valable sept jours de la part du groupe britannique.
Direction les États-Unis grâce à Sixt et la TFE
L’entreprise, qui réalise désormais 60 % de son chiffre d’affaires (non communiqué) à l’international, a franchi les frontières hexagonales en suivant ces clients.
C’est ainsi via BCA que la startup a installé au Maroc ses premiers portiques à l’étranger et grâce à son expérience avec Sixt qu’elle est en train d’attaquer le marché américain. Le loueur allemand propose en effet depuis cette année les services de deux portiques dans son agence de l’aéroport d’Atlanta, en Géorgie. A Sixt, comme à ses autres clients, ProovStation ne vend pas ses scanners mais les loue entre 1500 et 5000 dollars en fonction de la durée du leasing.
Mais pour tester la pertinence de sa solution sur le marché états-unien, la startup s’est adjoint l’expertise de la Team France Export avant la pandémie de Covid-19. En 2019, elle a en effet participé à la cinquième édition du programme d’accélération de Business France, Ubimobility qui s’est déroulé à Detroit, berceau de l’industrie automobile américaine et à San Francisco, la Mecque de la tech.
Ses dirigeants placent en effet leurs espoirs dans l’essor de la Mobility as a Service (véhicules autonomes et connectés, robots-taxis…). Sa participation au CES de Las Vegas la même année lui a permis de se faire connaître et de nouer des contacts avec de potentiels futurs clients.
Un portique made in Loir-et-Cher
« Nous sommes toujours en phase de démarrage aux États-Unis, confie Cédric Bernard. Mais je suis confiant, le marché des États-Unis est aussi important que celui de tous les pays européens et malgré l’arrivée de modèles électriques, le secteur de l’occasion est toujours trois fois plus important avec des véhicules qui durent de plus en plus longtemps. »
Outre Atlantique, la jeune pousse tricolore dispose d’un atout non négligeable : à part l’entreprise israélienne UVeye, la concurrence allemande, britannique, mais aussi française avec Tchek, n’est pas (encore) présente aux États-Unis.
Enfin, côté fabrication du fameux portique bardé de caméras couleurs 4K, la production est externalisée à une entreprise du Loir-et-Cher. « Il s’agit d’une entreprise qui travaille également pour l’armée et où nous disposons d’une chaîne de production, détaille le P-dg. Nous préférons travailler ainsi car ils ont une vraie expertise et leur expérience nous a permis de recommencer à produire très rapidement pendant la crise sanitaire. »
Dans cette course contre la montre technologique et commerciale, ProovStation, qui se présente comme leader européen de l’inspection automobile automatisée, peut également compter sur la levée de fonds de 10,4 millions d’euros réalisée en janvier dernier auprès d’Otium Capital et de Crédit Agricole Création, par l’intermédiaire de Supernova Invest.
Sophie Creusillet