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Le Togo veut relancer les investissements d’infrastructures

Le Togo envisage d’associer le secteur privé local et étranger à la réalisation du corridor sud-nord rail-route pour valoriser le port de Lomé et son hinterland : c’est l’un des projets phares des autorités de Lomé qui veulent aussi relancer les investissements dans l’énergie, les mines et l’aménagement urbain.

En Afrique, les petits pays, comme les grands (Cameroun, Gabon, Sénégal…), rêvent d’émergence. Tel est le cas du Togo, qui l’an dernier annonçait qu’il atteindrait une croissance économique à deux chiffres dès 2015. Si l’on en croit le Fonds monétaire international (FMI), il est loin de parvenir à son objectif, même si l’activité est plutôt bien orientée, à la fois soutenue par la production de coton et de phosphates et les investissements dans le port et dans un nouvel aéroport de la capitale, Lomé. Le FMI table ainsi sur une légère accélération de la croissance à 6 % en moyenne entre 2014 et 2016.

Limitrophe, à l’ouest, du Ghana, et au nord, du Burkina Faso, le petit Togo (plus de 6,6 millions d’habitants sur un territoire de 56 785 km2) a pour voisins à l’est, le Bénin et le géant de l’Afrique de l’Ouest, le Nigeria. Lomé a pour avantage de disposer d’un port naturel en eau profonde. Un outil fondamental pour le développement national, à condition de pouvoir l’exploiter. L’ambition du président Faure Gnassingbé, chef d’État moderne, dit-on à Lomé, est double : transformer l’ouvrage en un port de transbordement majeur et le relier à son hinterland vers le Burkina Faso.

En avril prochain, le groupe Bolloré, encore en situation de monopole pendant quelque temps sur le port, inaugurera un troisième quai de 450 mètres, portant la profondeur du port à 15 mètres. Vincent Bolloré ferait le déplacement. Lomé Container Terminal (LCT), une co-entreprise entre Global Terminal Limited (GTL) et China Merchants Holdings (International) Company Limited (CMHI), devrait, pour sa part, achever d’ici la fin de l’année un nouveau terminal à conteneurs pouvant accueillir les plus grands navires, avec une capacité de manutention annuelle de 2,2 millions conteneurs équivalent vingt pieds (EVP).

Pour valoriser l’hinterland, Faure Gnassingbé a créé Togo Invest, un organisme public dont la principale mission est de monter un projet de corridor route-rail entre Lomé au sud et Cinkassé au nord (760 km). Construire ce type d’infrastructures est très coûteux (230 millions d’euros pour la liaison ferroviaire). L’État est conscient qu’il ne peut réussir son pari sans recourir au secteur privé. D’où son ralliement au partenariat privé-public (PPP), une formule souvent présentée comme une solution en Afrique, mais qui se heurte souvent à l’épineux problème de la rentabilité. L’expérience avec la Société nationale industrielle et minière (SNIM) en Mauritanie ou Comilog au Gabon montre ainsi que ce type d’investissement ne peut être réalisé sans le soutien et la participation des compagnies minières elles-mêmes.

En fait, les conditions ne semblent pas, à ce jour, remplies. Il faudrait déjà que le port autonome de Lomé (Pal) se renforce avec un port minéralier. Dans sa capacité à s’endetter, l’État est limité. Il n’est pas certain que les opérateurs portuaires veuillent se substituer à lui, même si le transport de marchandises à l’intérieur du continent leur ouvre une nouvelle source de profit.

Mais le plus important est sans doute que l’exploitation des mines n’apportera pas la rentabilité espérée. Le Togo est plutôt riche en phosphates, mais les gisements se trouvant au sud, leur transport ne justifie pas de si lourdes infrastructures. De même pour le marbre de Pagala et le fer de Bangeli, car les quantités sont insuffisantes, et l’or, qui est un produit peu pondéreux.

Pas plus le trafic de passagers que de marchandises ne justifie non plus de tels investissements. Il convient, toutefois, de noter que la compagnie australienne Ferrex Plc a annoncé le lancement d’une étude de faisabilité de la future mine de manganèse de Nayega, au nord du Togo, avec une mise en production prévue à la fin de l’année prochaine. Situé à 670 km de la capitale, ce gisement serait estimé à 13 millions de tonnes.
Dans ces conditions, Lomé pourrait se résoudre à se rallier à un projet concurrent, la boucle ferroviaire ouest-africaine devant relier deux capitales de l’hinterland (Ouagadougou- Niamey) et trois capitales côtières (Abidjan, Cotonou, Lomé). D’autant que Bolloré a été retenu par le Bénin et le Niger pour le projet de prolongement du chemin de fer entre les deux pays. Comme le groupe français est présent à la fois au Togo et au sud du Bénin, il serait facile de connecter le port de Lomé à la boucle.

À ce jour, le Burkina Faso n’a pas indiqué s’il prolongerait la voie ferrée si le Togo engageait concrètement le chantier du corridor. Une prudence que le soutien supposé de l’Uemoa (Union économique et monétaire ouest-africaine) au projet de boucle expliquerait au moins en partie. Togo Invest poursuit, toutefois, sa mission. Le holding public, mené par Barry Moussa Barqué, un ancien ministre du président Eyadéma, père de l’actuel chef de l’État, a lancé les études de faisabilité d’une centrale à charbon d’une capacité de 150 et 250 mégawatts (MW), présentée comme partie intégrante du projet de corridor sud-nord.
La centrale serait construite dans le cadre d’un PPP avec le groupe nigérian Dangote, dont le patron et richissime homme d’affaires Aliko Dangoté est membre du Conseil d’administration de Togo Invest. Un entrepreneur français, Claude Peyrot, figure aussi parmi les administrateurs.

Faure Gnassingbé, en juin 2011, s’est entouré d’un Conseil présidentiel pour l’investissement, dans lequel on retrouve quelques pointures, comme l’ex patronne d’Areva, Anne Lauvergeon. C’est cette instance qui a préconisé la création d’un organisme comme Togo Invest, capable de monter des projets, d’acquérir des participations, majoritaires ou minoritaires dans des PPP et d’accorder des garanties.

Pour autant, les observateurs s’interrogent sur le rôle et les pouvoirs de Togo Invest. Est-ce que le pilotage par un cacique de l’ancien régime est temporaire ? Dans ce cas, on attend toujours la nomination d’un véritable directeur général. De même, la structure ne semble pas encore établie dans ses propres locaux, qui seraient situés, pour ceux qui connaissent la capitale togolaise, en face du siège de la FAO. Début février, son capital de 30,5 millions d’euros a été renforcé par un actif public. Il s’agit de la participation de l’État dans le Complexe pétrolier de Lomé (Compel).

François Pargny

 

Chiffres clés

Superficie (2013) : 56 800 km2
Population (2012) : 6,6 millions d’habitants
Produit intérieur brut (2013) : 3,27 milliards d’euros
Croissance économique (2013) : 5,6 %
Inflation (2013) : 2,2 %
Exportations (2013) : 1,03 milliard d’euros
Importations (2013) : 1,66 milliard d’euros

Sources : Banque mondiale, autorités togolaises, FMI

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