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Anvers, concurrent numéro un des ports français

Anvers, premier port français ? Provocation ou réalité commerciale, c’est en tout cas ainsi que se présente le port flamand. Ses représentants citent toute une série de clients français, industriels et distributeurs, parmi lesquels plusieurs grands groupes comme Alstom, Arcelor Mittal, Danone, PSA Citroën, Saint-Gobain, Total. 

Néanmoins, certains professionnels français qui préfèrent rester anonymes relativisent cette affirmation : « C’est du marketing. Nous avons estimé à 600 000 le nombre de conteneurs français manipulés par Anvers. Or, Le Havre, c’est 2,4 millions de conteneurs. » L’Isemar (Institut supérieur d’économie maritime Nantes Saint-Nazaire) entérine pourtant ce tropisme hexagonal du port belge : « L’image de fiabilité sociale et de réactivité des acteurs portuaires joue beaucoup pour la captation des flux dans les conteneurs mais aussi les marchandises diverses. Le port d’Anvers maîtriserait 85 % des flux conteneurisés du nord et de l’est de la France et 50 % de ceux de l’Ile-de-France. Soit sans doute environ 15 % du marché français des conteneurs (la même proportion en Allemagne) ».

Avec 178 millions de tonnes en 2010, Anvers est le deuxième port européen. Certes, il est loin derrière Rotterdam, avec ses 430 millions de tonnes (Mt), mais largement devant Marseille (86 Mt) et Le Havre (70 Mt). Sur le segment des conteneurs, Anvers talonne Rotterdam, avec 8,5 millions d’EVP (équivalent vingt pieds) en 2010 contre 11,5 millions pour le port néerlandais. En revanche, les ports français sont à la traîne sur ce marché en pleine croissance. Le Havre est seulement au dixième rang européen, avec 2,4 millions d’EVP. Quant à Marseille, il n’apparaît même pas dans le top 20… 
De plus, la croissance du port flamand est forte : +13 % en 2010. Le premier trimestre 2011 suit cette tendance avec + 7,8 % pour les conteneurs en tonnage (26,24 Mt) et + 7,9 % en nombre d’unités (2,17 millions d’EVP). Que ce soit le vrac (+ 20,4 %), les métaux ferreux (+ 41,8 %), les dérivés du pétrole (+ 34,6 %) ou les engrais (+ 9,7 %), les indicateurs de ce premier trimestre sont tous au vert. Cette tendance haussière devrait se poursuivre.

En 2010, le trafic était composé de conteneurs (58 %), vracs liquides (23 %), vracs secs (11 %) et fret conventionnel (1) (8 %). Originalité anversoise, son leadership sur le transport des marchandises conventionnelles (2), avec 25 % de pénétration, un segment du marché sur lequel Le Havre n’est pas du tout positionné. 

Le port belge est également numéro un pour les produits sidérurgiques (6,8 millions de tonnes en 2010, +13 %). C’est aussi le plus grand hub maritime chimique en Europe, avec la plus grande concentration de citernes en acier inoxydable en Europe. D’ailleurs, les grandes firmes pétrolières et chimiques comme BASF, Total, Bayer, Air Liquide ou Solvay ne s’y sont pas trompées et possèdent un ou plusieurs centres de production sur le port. 

Enfin, le port revendique la productivité la plus élevée en Europe avec jusqu’à 40 mouvements par heure et par grue. Côté logistique, Anvers offre une capacité de stockage considérable (5,5 millions de m2) et des services logistiques qui ont séduit des distributeurs français comme Décathlon ou Leroy Merlin.

La taille des porte-conteneurs continuant de croître – la capacité maximale était de 2000 EVP en 1995, 18 000 aujourd’hui – Anvers a entrepris l’année dernière le troisième élargissement de l’Escaut et peut désormais recevoir des porte-conteneurs de 14 000 EVP. 

Doté de capacités tri-modales (route, fer, fluvial), Anvers est bien relié à son hinterland. Le fluvial, par exemple, permet d’acheminer les marchandises par barges dans le Nord-Pas-de-Calais et jusqu’en Lorraine. Quant aux navettes ferroviaires pour conteneurs, le port flamand annonce 200 services hebdomadaires vers 70 destinations dans 19 pays. 
Pour consolider sa place de deuxième port européen, Anvers investit dans les infrastructures, avec une enveloppe de 1,6 milliard d’euros jusqu’en 2025. Les superstructures ne sont pas oubliées, avec, entre autres, 100 millions d’euros consacrés à la rénovation des terminaux conventionnels. 

Le port belge met en avant sa fiabilité et sa productivité pour attirer armateurs et chargeurs. Des atouts bien réels face à la concurrence des ports du « range Nord » (Nord de l’Europe) dont font partie Le Havre, Dunkerque, Rotterdam, Hambourg mais aussi des ports belges comme Zeebrugge ou Gand. Néanmoins, Anvers possède également des points faibles, comme le montre l’Isemar. Pour cet institut, « le territoire portuaire est encadré par l’agglomération d’Anvers et la frontière néerlandaise, les accessibilités ferroviaires, routières et fluviales sont toutes problématiques, la concurrence nationale est réelle avec Zeebrugge et Gand, l’économie nationale plus limitée et l’hinterland européen très concurrentiel ». En outre, « la position estuarienne ne favorise pas les activités de transbordement qui y sont les plus faibles du range Nord ».

Reste qu’Anvers dispose d’atouts certains qui en font un concurrent redoutable pour les ports européens en général et français en particulier, comme le souligne l’Isemar. Selon elle « la force d’Anvers repose sur son caractère de port de commerce avec des acteurs, quel que soit leur métier (manutentionnaires, transitaires, logisticiens), qui sont au service du marché ».

Trois questions à Annik Dirkx, port d’Anvers« Un port moderne doit être un relais performant »

Le Moci.Anvers a-t-il tiré profit des grèves de 2010 dans les ports français ?
Annik Dirkx. C’est difficile à dire. Il se peut que nous en ayons tiré un profit, mais nous ne pouvons le chiffrer.
Le Moci.
Que doit posséder un port moderne pour accompagner le développement du commerce international ?
A. D. Il doit se concentrer sur l’ensemble de la supply chain, dans laquelle chaque port n’est rien de plus qu’un relais par lequel transitent les marchandises. Un port moderne doit être un relais performant, efficace et sûr, ce que nous essayons de faire. Les commerçants internationaux ne s’intéressent pas au port en tant que tel. Ils recherchent les moyens les plus efficaces pour transporter leur fret. Nous voulons offrir à nos clients un relais fiable et nous pensons que cet objectif fera une différence significative pour notre développement futur.
Le Moci.
 Comment voyez-vous l’avenir des ports européens ?
A. D. Nous les voyons travailler de concert sur des sujets comme le développement durable et la protection de l’environnement. Les ports vont continuer de se développer, ce qui va accentuer la concurrence entre eux. C’est, bien entendu, un principe sain, dont chaque client des ports bénéficiera.

P. C.

1) Le transport conventionnel est constitué des marchandises qui ne sont transportées ni en vrac, ni en conteneurs, ni en charges roulantes (ro-ro, ou roll-on, roll-off).

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