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Les entreprises fortement touchés par la contrefaçon

Jusqu’où ira-t-on dans le développement de la contrefaçon ? En juillet dernier, une Américaine installée en Chine faisait la découverte de trois faux magasins Apple créés dans la ville de Kunming, dans le Yunnan. Tout y était, selon elle : design, lumières, vendeurs aux T-shirts bleus avec leur carte personnelle accrochée autour du cou, sauf un détail qui lui a mis la puce à l’oreille : le fait de marquer « Apple Store » sur les enseignes au lieu du dessin de la mythique pomme.


Au niveau français, les chiffres témoignent de l’ampleur du phénomène. Ainsi, en 2010, la douane française a saisi 6,2 millions de produits contrefaits représentant un montant de 421 millions d’euros, soit une progression de plus de 50 % comparé à 2009. À ce nombre s’ajoutent les saisies de fausses cigarettes (1,3 million de paquets), ce qui porte le total des saisies à 7,5 millions d’articles en 2010.

Pour l’Unifab (Union des fabricants pour la protection internationale de la propriété intellectuelle), une association française anticontrefaçon regroupant quelque 300 entreprises (dont un tiers de PME), « ces chiffres démontrent l’ampleur du développement de cette activité illicite et dangereuse ». De plus, signale son président, Christian Peugeot, « on constate une augmentation des saisies de contrefaçon au fret express (plus de 1 million en 2010) dont les produits sont issus de commandes passées sur Internet (voir interview p 25).

Un constat partagé par Elisabeth Ponsolle des Portes, déléguée générale du Comité Colbert, qui regroupe les entreprises du secteur du luxe. « Le phénomène de contrefaçon de produits de luxe s’amplifie, particulièrement par la voie d’Internet, avec des commandes passées à partir de sites illicites comme IReplica ou sur des sites plus classiques de vente aux enchères », explique-t-elle.

De fait, le secteur du luxe n’est plus le seul touché par la contrefaçon. Certes, il continue à représenter une part importante des saisies réalisées en France comme en Europe. Ainsi le trio de tête des articles saisis par la douane française en 2010 concerne les vêtements (18 % du total), les parfums et produits cosmétiques (11 %) et les accessoires personnels comme les sacs, les montres et les bijoux (11 %). Mais, s’alarme l’Unifab, il y a aussi une « augmentation inquiétante en 2010 des saisies de contrefaçon de produits alimentaires (576 000 produits) et d’articles de téléphonie mobile (475 000 produits) ».

Sans surprise, 70 % des produits contrefaits saisis en 2010 proviennent d’Asie, qui demeure la première région de production du faux, signale l’Unifab. Mais, contre toute attente, c’est l’Europe qui occupe la seconde place, en passant en 2010 devant l’Afrique, avec 16 % des saisies en provenance de pays proches des frontières françaises, poursuit l’association.

En Europe, les chiffres issus du dernier rapport spécialisé sur le sujet (1) publié le 14 juillet dernier sont du même acabit. Ainsi, signale la Commission européenne, le nombre d’envois de produits contrefaits interceptés par les douanes a presque doublé en 2010 par rapport à 2009, passant à près de 80 000 contre 43 000 auparavant. Cela représente en valeur un montant de plus de 1 milliard d’euros. En tête des pays ayant effectué le plus grand nombre de saisies en 2010 : la Grèce (22 millions de produits), l’Italie (16 millions) et l’Espagne (12 millions). La France vient loin derrière avec 6,5 millions de produit saisis. La Commission note également une « augmentation spectaculaire » des saisies effectuées dans le cadre du trafic postal à la suite d’un achat en ligne : le nombre de cas a triplé, passant de 15 000 à plus de 40 000.

Face à la montée en puissance de la contrefaçon, les organismes spécialisés tels que le Cnac (Comité national anticontrefaçon), l’Unifab ou le Comité Colbert ne sont pas restés les bras croisés. Le Cnac, qui fédère depuis 1995 entités publiques et acteurs privés, a mené de nombreuses actions de sensibilisation auprès du public. Son président, Bernard Brochand, député-maire UMP de Cannes, a été à l’origine, avec le professeur de droit de la propriété intellectuelle Pierre Sirinelli, d’une charte d’engagements de lutte contre la contrefaçon sur Internet signée en décembre 2009 par cinq fédérations professionnelles, plus de 500 marques et deux plateformes de commerce électronique, Price Minister et Deux fois moins cher. Il s’est vu confier en février dernier par le gouvernement une deuxième mission : étendre et approfondir les principes contenus dans cette charte aux sites de petites annonces et y associer les organismes de paiement à distance.

De son côté, l’Unifab apporte aux PME force de frappe et visibilité dans leur combat (voir interview page suivante). L’association possède des bureaux à Pékin et à Tokyo qui informent les adhérents et appuient leurs demandes de saisie. Elle a réalisé en avril 2010 un rapport sur l’impact de la contrefaçon vu par les entreprises en France et a fait 100 propositions pour freiner ce fléau. Cinq axes prioritaires ont été dégagés, dont la lutte contre la cyber-contrefaçon et la sensibilisation du consommateur.

Ces deux points sont importants pour le Comité Colbert. Ainsi, explique au Moci Elisabeth Ponsolle des Portes, « la Poste française – via laquelle transitent tous les produits commandés sur Internet – a été sensibilisée avec succès : une clause anti-contrefaçon a été introduite dans ses conditions de vente. Nous sommes actuellement en train de sensibiliser dans le même sens les banques françaises concernant les paiements effectués par carte bancaire ». En outre, ajoute-t-elle, « nous avons entrepris en 2010-2011 des campagnes de sensibilisation auprès des consommateurs des nouveaux pays entrants de l’UE (République tchèque, Slovaquie et Roumanie). Une campagne est en cours de préparation en Hongrie et en Italie ». 

Selon elle, la mobilisation au niveau européen est importante. « Depuis 12 ans, explique-t-elle, nous menons une action anticontrefaçon au plan européen avec nos homologues italien (Fondazione Altagamma) et britannique (Walpole British Luxury). Une association formelle a été créée en 2010 sous le nom d’European Cultural and Creative Industries Alliance (ECCIA). Nous avons été rejoints en juin 2011 au sein de cette alliance par l’association espagnole Circulo Fortuny, qui regroupe des industriels du luxe. »

Reste que, pour les entreprises, le plus important est d’anticiper le problème. C’est ce qui ressort des témoignages recueillis par Le Moci auprès de cinq entreprises (PME comme plus grosses entreprises) et des conseils des avocats-conseils en propriété intellectuelle. Avec une recommandation de bon sens : il revient toujours plus cher de réparer les dégâts que de mettre en place une véritable politique de propriété industrielle. À ce titre, la consultation de guides pratiques édités par la Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services (DGCIS) est particulièrement recommandée (voir encadré ci-dessous).

(1) Report on EU customs enforcement of intellectual property rights, juillet 2011. http://ec.europa.eu/taxation_ customs/customs/customs_controls/counterfeit_piracy/statistics/index_ fr.htm


Dossier réalisé par Isabelle Verdier avec Alix Cauchoix et Jean-François Tournoud

Des guides pratiques
La DGCIS a édité une série de guides pratiques et de fiches pratiques pour aider les PME à lutter contre la contrefaçon (www.industrie.gouv.fr/guides/guides-pratiques.php). À noter plus particulièrement :
• PME : comment vous protéger des contrefaçons, brochure de 4 pages;
31 fiches pratiques réalisées en octobre 2010 par les CCI et l’Inpi;
• PME : pensez propriété intellectuelle !, un guide publié en mai 2010 par Pierre Breesé et Yann de Kermadec.

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