Considérée comme une étape clé pour faire avancer la digitalisation des transactions du commerce international, ce projet de Loi gouvernemental, que porte le ministère de l’Economie, des finances et de la souveraineté industrielle, doit permettre de transposer en droit français une loi-cadre de l’ONU fournissant un cadre juridique solide au transfert électronique de documents.
Le gouvernement tient sa promesse : il vient de rendre public le calendrier législatif que va suivre l’examen de son projet de Loi visant à transposer en droit français la « MLETR » (pour Model Law on Electronic Transferable Records), un modèle de Loi cadre sur les documents transférables mis au point par la Cnudci (Commission des Nations unies pour le droit commercial international, en anglais Uncitral).
« Excellente nouvelle de la France pour tous les acteurs du commerce international », se félicite, dans un post sur LinkedIn, Philippe Henry, co-président, avec Valérie Collot, du groupe de travail de Paris Europlace sur la digitalisation du Trade Finance ayant produit un rapport, élaboré avec l’ICC (Chambre de commerce international), remis au gouvernement fin juin dernier. La transposition de cette Loi type était en effet une recommandation phare de ce rapport, mère de pratiquement toutes les autres.
Un projet de Loi avait même été élaboré par le groupe de travail (annexe 7 du rapport) pour faciliter la tâche aux autorités et dont s’inspire le projet du gouvernement. Bruno Le Maire Economie et finances), Eric Dupont-Moretti (Justice), Olivier Becht (Commerce extérieur), les trois ministres destinataires, s’étaient engagés à la mettre en œuvre. Accélérer la digitalisation du financement du commerce international constitue d’ailleurs l’une des mesures ajoutées au plan « Osez l’export » lancé par le ministre en charge du Commerce extérieur fin août.
Quel est le calendrier exact ?
D’après les détails fournis par Philippe Henry dans son message, le processus législatif, qui devrait prendre plusieurs mois, a commencé le 14 décembre dernier par l’examen du texte par le Comité consultatif de la législation et de la réglementation financière de la Banque de France. Un retour de la Direction générale des Outre-mer sur le texte est par ailleurs attendu le 21 décembre. Le Conseil supérieur de la marine marchande (CSMM) doit examiner le document le 11 janvier 2024. Le texte devrait être examiné par le Conseil d’Etat en janvier 2024 avant d’être soumis au Conseil des ministres en février, puis au Parlement, en mars.
Le ministère de l’Agriculture soutien inattendu du projet de Loi
Un soutien inattendu mais non moins actif en coulisse du projet de Loi visant à transposer en droit français la « MLETR » (pour Model Law on Electronic Transferable Records) de la Cnudci, afin de permettre l’accélération de la digitalisation du financement du commerce international, est le ministère de l’Agriculture. Fait méconnu en effet : le Code rural et de la pêche maritime oblige les céréalier à vendre leur production à des « collecteurs », lesquels payent à crédit (75 jours) en utilisant des billets à ordre avalisés par l’agence publique France Agrimer. Cette dernière doit donc chaque année apposer sont tampon sur des milliers de ces moyens de paiements sous format papier, le montant moyen par transaction étant d’une vingtaine de milliers d’euros pour un encours global de 5 milliards d’euros ! Cet spécificité agricole est citée par le rapport rapport du groupe de travail de Paris Europlace « Accélérer la digitalisation des activités de financement du commerce international » (p. 36) remis au gouvernement en juin dernier. On comprend l’impatience de France Agrimer, qui aimerait digitaliser toute cette activité dès que possible, pourquoi pas dès la prochaine campagne !
En attendant, le groupe de travail de Paris Europlace, « soutenu par de nombreuses entités gouvernementales » précise Philippe Henry, a commencé à plancher sur un texte pour nourrir le futur décret d’application. Selon lui, il apportera notamment des précisions utiles sur des points importants dont les définitions des notions de « contrôle exclusif », de « système fiable », de « dispositif de création et de stockage d’un titre transférable », de « données d’exploitation ». Il intègrera également une proposition de modification de différents Codes importants pour la Supply Chain du Trade Finance en France : Code des transports, Code des assurances, Code de commerce et Code monétaire et financier. Last but not the Least : « Ce décret sera un guide important pour de nombreuses applications métiers qui émergent déjà dans le pays grâce à un secteur en plein essor #TradeTech soutenu par Bpifrance » indique encore Philippe Henry.
Rappelons que l’objectif de ce projet global de digitalisation est de simplifier et réduire les coûts administratifs des outils du financement du commerce international, qui reposent encore trop souvent sur les échanges de documents papier.
Christine Gilguy