Si Karel de Gucht avait déjà fait part de sa décision dans
une interview accordé à une agence de presse allemande début octobre, elle est
désormais officielle : la demande française de déclencher le mécanisme de
surveillance dans le secteur automobile, suite à la mise en œuvre de l’accord
UE/Corée du Sud, a bel et bien été refusée par la Commission européenne.
Dans une lettre envoyée au gouvernement, lundi 22 octobre, le commissaire au
Commerce démonte un à un les arguments présentés par la France en août dernier.
« Les conditions juridiques requises pour l’introduction du mécanisme de
surveillance ne sont pas remplies », résume John Clancy, porte-parole de
Karel De Gucht. S’il est vrai que les importations de voitures coréennes ont
augmenté depuis l’entrée en vigueur de l’accord de libre-échange, le 1er
juillet 2011, « les chiffres montrent que cette hausse ne s’est pas
concentrée en France », ajoute-t-il, sur la base de données chiffrées. Au
sein de l’UE, l’augmentation enregistrée entre juillet 2011 et juin 2012 – par
rapport à l’année précédente – serait en effet de 41 %. Dans le cas spécifique
de la France
elle n’atteint « que » 24 %.
Dans la missive envoyée à Bruxelles, les autorités
françaises soutenaient que « la comparaison des flux constatés par la Commission européenne
entre le 1er bimestre 2011 (janvier-février) et le premier bimestre 2012 met en
évidence une hausse de plus de 50% ». « Vrai », estime la Commission, mais la
période envisagée est également jugée trop courte pour aboutir à l’activation
du mécanisme de surveillance. Par ailleurs, l’analyse des données chiffrées
démontre que cette augmentation date de début 2011, soit environ six mois avant
l’entrée en vigueur de l’ALE UE/Corée du Sud.
Autre argument rejeté par la Commission :
l’importation des voitures coréennes serait à l’origine des difficultés
rencontrées par le groupe PSA. Pour
étayer cette conclusion, l’exécutif européen se réfère au « rapport Sartorius »,
commandé par Arnaud Montebourg, pointant plutôt les « erreurs
stratégiques » de PSA qui aurait « raté le virage de la
mondialisation ». Et selon les
services du commissaire De Gucht, l’exportation, depuis la Corée du Sud, des modèles
proposées par Kia ou Hyundai, ne serait pas à blâmer non plus. D’abord parce
qu’un grand nombre de ces voitures sont actuellement fabriquées au sein même de
l’UE, en Turquie ou en Inde. Ensuite, une part significative des automobiles
importées de Corée – et reprises, de ce fait, dans les statistiques – sont
« fabriquées par General Motors, voire même par Renault », souligne la Commission. Celle-ci
rejette, enfin, les allégations du ministre du Redressement productif selon
lesquelles Kia et Hyuandai pratiquent des politiques salariales relevant du
« dumping social ».
Sans se détacher d’une certaine ironie, John Clancy tente de
dédramatiser la hausse constatée des importations de voitures coréennes.
« Bien au contraire, elle démontre que la politique commerciale de l’UE
génère plus de commerce et dans les deux sens ». Il insiste aussi sur les bénéfices globaux
engendrés par l’accord de libre-échange, largement favorable à L’UE puisque les
exportations européennes ont augmenté de plus de 20 % depuis sa mise en œuvre.
« Nous ne pouvons pas nous réjouir de
l’augmentation des exportations vers la Corée, et dans le même temps déplorer le fait que
les importations coréennes vers l’UE ont aussi augmenté », conclut le
porte-parole. Un message dont la portée ne risque pas d’échapper au
gouvernement français, principal défenseur en Europe du sacro-saint principe de
« réciprocité ».
Kattalin Landaburu à Bruxelles
Pour en savoir plus:
Lire nos derniers articles sur le sujet:
– L’ALE UE-Corée du Sud fête ses un an (05/07/2012)
– ALE UE-Corée du Sud: bilan positif pour Karel de Gucht (11/07/2012)
– Automobile: Paris et Bruxelles divergent sur la Corée du Sud (25/07/2012)
– Automobile-Corée du Sud: Paris « regrette » la décision de Bruxelles (23/10/2012)
Lire le texte de l’accord en cliquant ici.