Les projets franco-russes sont nombreux dans l’aéronautique.
Mais leur évolution est freinée par des problèmes douaniers, ont tenu à
rappeler les industriels français lors d’une réunion du Conseil russo-français
pour les questions économiques, financières, industrielles et commerciales qui
s’est tenue en Russie le 20 avril dernier.
A la veille du Forum aéronautique d’Oulianovsk (région de la
Volga) et du premier vol commercial du SuperJet 100, Emeric D’Arcimoles, le
président du bureau de la commission internationale du Groupement des
industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas), a regretté que les
tarifs douaniers pratiqués par la Russie augmentent de « 20 % à 40 % » le coût final des pièces détachées. Un
surcoût pour le moins handicapant pour l’avenir commercial des avions conçus et
fabriqués dans le cadre d’une coopération internationale.
C’est le cas du SuperJet 100, un appareil régional de 95
places fabriqué par la division aviation civile de Sukhoï, détenue à 25 % par l’italien
Finmeccanica. Le moteur de cet avion, programme phare de l’aéronautique russe, a
été conçu et construit par Powerjet, une coentreprise créée en 2004 par la
Snecma (groupe Safran) et le russe NPO Saturn. Thalès, qui a ouvert à Moscou en
2006 un centre de recherche et développement avec Sukhoï, s’est occupé de l’avionique
du SuperJet 100, le premier avion civil russe depuis la chute de l’URSS. Turbomeca,
autre filiale de Safran, fournit quant à elle les turbines des hélicoptères
Kamov 226 et 62. « La France détient
environ 30 % des deux projets », a rappelé Emeric D’Arcimoles.
Tombée en décrépitude à la fin de l’URSS – la Russie n’a,
depuis, livré qu’une dizaine d’avions civils par an-, l’aéronautique tente de
se reconstruire. En 2006, l’Etat a décidé la création d’un « consortium
aéronautique unifié » (OAK), une holding d’Etat regroupant les principaux
constructeurs russes (Sukhoï, Irkut, Beriev, Iliouchine et Tupolev). Il est
également question de créer à Oulianovsk un cluster entièrement dédié au
secteur.
L’aéronautique russe affiche de grandes ambitions. En
2025, elle compte produire 25 % des avions militaires dans le monde, et 15 %
des avions civils. Pour ce faire, elle ne peut se passer des industriels
étrangers et doit assouplir ses droits de douane, si elle veut que des appareils
made in Russia soient compétitifs sur
leur propre marché. Et ailleurs. En décembre dernier, après avoir fait miroiter
une commande d’une vingtaine de Superjet 100 à Sukhoï, la compagnie Alitalia s’est
finalement tournée vers le brésilien Embraer. Raison invoquée : le tout
nouvel appareil russe n’avait pas encore reçu sa certification européenne après
deux années de test.
Sophie Creusillet