On y est ! La phase transitoire de la mise en œuvre du MACF (Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières), autrement appelée taxe carbone aux frontières, démarre le 1er octobre. Pendant deux ans, elle va permettre tant aux importateurs qu’aux administrations européennes de roder le mécanisme et de récolter des données pour établir un prix de la tonne de CO2 importée.
Ce dimanche 1er octobre concrètement, il ne va pas se passer grand-chose en fait. Cette date marque juste le déclenchement d’un compte à rebours de trois mois d’ici au dépôt, par les importateurs concernés – acier sauf certains alliages, aluminium, ciment, engrais azotés, électricité, hydrogène- des premières déclarations sur les quantité d’émissions de CO2 contenue dans les produits qu’ils auront importés entre le 1er octobre et le 31 décembre 2023. La date limite pour le dépôt de ces premières déclarations est fixée au 31 janvier 2024.
Objectifs du MACF
Le MACF fait partie du paquet de mesures législatives lancées dans le cadre de sa stratégie européenne du Pacte vert (Green Deal), et notamment du plan « Fit for 55 », qui vise à réduire les émissions de gaz à effet de serre (Ges) de l’UE d’au moins 55 % à l’horizon 2030 par rapport à 1990, et la neutralité carbone en 2050. Il vise à mettre sur un pied d’égalité les producteurs européens soumis aux règlementations strictes de l’UE en matière d’émissions de Ges et les producteurs des pays tiers qui n’auraient pas les même contraintes. Et ainsi mettre fin aux fuites de carbone (délocalisations industrielles) tout en incitant les pays tiers à rehausser leurs exigences et leurs normes en matière d’émissions.
Le texte de référence est le règlement législatif dénommé Règlement (UE) 2023/956 du Parlement européen et du Conseil du 10 mai 2023
Autrement dit, ces opérateurs devront collecter auprès de leurs fournisseurs étrangers les données pour calculer le nombre de tonnes équivalent carbone contenues dans leurs produits importés durant cette période, et les consigner dans un rapport qu’ils devront déposer ensuite sur le site Internet dédié au MACF créée par la Commission européenne.
Cette plateforme MACF européenne est encore en cours de test : elle devrait être mise en ligne dans les prochaines semaines, selon des sources gouvernementales françaises. Les opérateurs, qui en seront informés par les administrations françaises, devront s’y inscrire dès qu’elle sera opérationnelle, avec leur numéro d’identification européen EORI (Economic Operator Registration and Identification), pour pouvoir faire leurs déclarations.
Où s’informer en France
Les deux grandes administrations françaises concernées par la mise en œuvre du MACF sont d’une part la Direction de l’Energie et du climat (DGEC) du ministère de la Transition énergétique, en tant qu’autorité compétente (c’est elle qui délivrera le futur statut de « déclarant MACF autorisés », obligatoire à partir de janvier 2026), et d’autre par la Direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI), qui sera en charge du contrôle des déclarations.
Des réunions d’informations auprès des opérateurs ont commencé dès le mois de septembre, la DGEC a élaboré un guide pratique destiné aux importateurs. Elles s’ajoutent à une série de webinaires organisés par la Commission européenne à destination des entreprises pour chaque catégorie de produits concernés par le MACF. Les deux administrations ont ouvert des pages d’informations pratiques sur leur site Internet.
-Site MACF de la DGEC : cliquez ICI
-Site MACF de la DGDDI : cliquez ICI
Durant les deux ans de transition, ces rapports devront être livrés par les opérateurs à un rythme trimestriel, pour chaque trimestre d’importation. « Cette première phase à blanc à l’échelle européenne doit permettre de récolter les données pour déterminer un prix de la tonne carbone avant de passer à la seconde phase d’application qui s’échelonnera entre 2026 et 2034 », précise cette même source gouvernementale.
Cette phase de transition permettra aussi d’ajuster le fonctionnement du mécanisme, et de surveiller l’apparition éventuelles de nouvelles « fuites carbone », par exemple de nouvelles délocalisations de fabrications de produits finis. D’autant que la méthodologie de calcul des émissions est encore en chantier au niveau de la Commission européenne et devrait être finalisée dans le courant de l’année prochaine.
Une seule certitude à ce stade : les rapports sur les émissions devront s’appuyer à terme sur des données des fournisseurs de pays tiers certifiées par des organismes indépendants car dans le cas contraire, les produits importés se verront appliqués des valeurs carbone par défaut risquant d’être plus pénalisantes que les valeurs réelles.
Cette montée en puissance progressive du MACF doit en effet s’effectuer en parallèle à la réforme du marché européen du carbone, qui mettra fin, notamment, aux quotas gratuits. À partir de 2026, année de démarrage de la phase définitive, les importateurs devront acheter et restituer le nombre de « certificats MACF » correspondant aux émissions intrinsèques de GES générées par leurs importations de marchandises couvertes par le MACF.
De même source gouvernementale, le nombre d’opérateurs concernés a été estimé à un peu moins de 10 000 en France, pour un volume d’importation d’environ 6 milliards d’euros.
Christine Gilguy