Les perspectives géostratégiques d’Ernst & Young pour 2022 sont placées sous le signe de l’émergence d’un monde à deux vitesses. Dans ce contexte, les entreprises devront affûter leur stratégie internationale pour ne pas louper le coche.
Le risque géopolitique est revenu sur le devant de la scène depuis le début de la crise sanitaire. Selon le cabinet d’audit et de conseil Ernst & Young, l’apparition d’un monde à deux vitesses, impulsée par la disparité dans l’accès aux vaccins, va demander aux dirigeants d’entreprises de développer des approches plus stratégiques pour gérer le risque politique.
Ce monde à deux vitesses influencera en effet la dynamique géopolitique et aura des conséquences sur les politiques nationales, incitant les entreprises à repenser leurs chaînes d’approvisionnement, leurs perspectives de revenus, leurs stratégies en matière de ressources humaines et de gestion des risques réputationnels.
Dans ce monde à deux vitesses, trois thèmes majeurs influenceront, selon E&Y, l’environnement géostratégique des entreprises : l’évolution continue des pouvoirs géopolitiques et des relations internationales, le changement climatique et les questions de durabilité, mais aussi le rôle croissant des gouvernements dans la conduite et l’orientation de l’activité économique, via notamment leurs politiques industrielles.
Pour garder le cap, les entreprises devront, dans ce contexte, mettre en œuvre cinq grandes priorités préconisent les analystes d’E & Y:
1) Adapter les chaînes d’approvisionnement aux réalités géopolitiques
La dynamique géopolitique et la pression exercée par de nombreux gouvernements pour atteindre l’autosuffisance, voire l’indépendance en matière de produits stratégiques vont rendre les chaînes d’approvisionnement transfrontalières plus complexes.
Les perturbations continues des opérations et de la logistique dues à la pandémie, à l’inquiétude sociale, aux cyberattaques et aux événements météorologiques extrêmes ne feront qu’accentuer les difficultés des chaînes d’approvisionnement à travers le monde.
Dans ce contexte, les dirigeants doivent réexaminer les chaînes d’approvisionnement de leur entreprise et envisager des stratégies de relocalisation (onshoring), de délocalisation proche (nearshoring) ou de délocalisation « amie » (friendshoring) afin d’améliorer la résilience de leur entreprise.
2) Placer le risque politique au cœur des stratégies d’acquisition
L’activité mondiale de fusion et d’acquisition a été, selon E&Y, très dynamique pendant la majeure partie de 2021 et l’économie mondiale devrait connaître une croissance robuste en 2022, offrant aux entreprises de tous les secteurs l’opportunité de faire des acquisitions stratégiques.
Les dirigeants devraient intégrer des évaluations du risque politique dans la due diligence de leurs transactions. Par exemple, les secteurs jugés stratégiques seront probablement soumis à une due diligence en matière de transactions. Ces secteurs jugés stratégiques seront probablement confrontés à des limitations ou à des refus d’investissements transfrontaliers.
3) Renforcer la gestion des données et la sécurité numérique
La multiplication des réglementations relatives à la sécurité des données et à la protection de la vie privée dans les principaux marchés continuera à augmenter les coûts de partage des données au-delà des frontières.
Les dirigeants doivent, selon E&Y, anticiper les opportunités prochaines pour déceler les changements potentiels à venir. Ils doivent ensuite aligner les stratégies et les business models de leur entreprise sur les réglementations spécifiques de chaque pays afin d’éviter tout problème de conformité. En raison du risque accru de cyberattaques, les dirigeants doivent s’assurer que leurs entreprises aient les outils pour se défendre.
4) Protéger et développer les viviers de talents
La « Grande Démission »– phénomène de sortie de l’emploi volontaire et massif observé aux États-Unis – et les restrictions continues pesant sur la mobilité internationale de la main-d’œuvre dues à la pandémie imposent aux dirigeants d’innover pour attirer et retenir les talents.
La due diligence en matière de durabilité et de droits de l’homme donne aux dirigeants l’occasion de s’engager et d’instaurer un climat de confiance parmi les collaborateurs. Les dirigeants doivent coopérer avec les décideurs politiques pour faciliter le développement d’une croissance inclusive et valoriser le capital humain sur le long terme, notamment par la création d’emplois et le développement de nouvelles compétences.
5) Créer une valeur durable pour toutes les parties prenantes
L’évolution des relations entre grands blocs et le rôle croissant des puissances moyennes pourraient compliquer la gestion des parties prenantes, étant donné le potentiel de points de vue contradictoires de la part d’un groupe plus large de décideurs politiques au niveau national.
Toutefois, la présence d’un plus grand nombre de parties prenantes à la table des négociations offre aux entreprises des possibilités supplémentaires pour s’engager. Ce monde à deux vitesses et les attentes croissantes des parties prenantes en matière de développement durable offrent l’opportunité d’un changement stratégique.
Les dirigeants doivent développer et exploiter les relations avec les parties prenantes afin de soutenir les politiques qui réduisent les divergences dans ce nouvel environnement et favorisent la durabilité et la valeur à long terme au niveau mondial.
SC