Les pays arabes pourraient être un gisement d’affaires pour la filière spatiale mondiale. Un nouveau pétrole pourrait être ainsi propulsé par des pays comme les Émirats arabes unis.
En l’occurrence, le premier Émirati à s’aventurer dans l’espace, le pilote de chasse Hazza al-Mansouri, rejoindra, le 25 septembre, la Station spatiale internationale (ISS) à bord du vaisseau Soyouz MS-15.
L’évènement sera suffisamment important pour que la Chambre de commerce franco-arabe (CCFA) juge bon d’organiser à Paris, autour de dirigeants d’Airbus, Arianespace et de Thales, un petit-déjeuner sur « Les enjeux de l’industrie spatiale européenne et la coopération avec les pays du monde arabe ». La réunion s’est tenue le 12 septembre, alors que Paris accueillait, du 9 au 13 septembre, la conférence annuelle World Satellite Business Week.
Émirats arabes unis : en route vers Mars
Dans le domaine spatial, les Émirats arabes unis n’en sont pas à leur premier coup d’essai.
En 2014, ils se dotaient d’une agence nationale spatiale et, en 2018, envoyaient leur premier satellite produit sur place depuis le Japon. En mars dernier, Abu Dhabi accueillait encore le Congrès mondial de l’espace, au cours duquel onze pays arabes (Arabie saoudite, Oman, Émirats arabes unis, Maroc, Bahreïn, Égypte, Algérie, Liban, Soudan, Koweït, Jordanie) ont décidé de créer la première agence spatiale pan-arabe, visant notamment à une exploration de l’espace. Enfin, les Émirats arabes unis envisagent de lancer une sonde en orbite autour de Mars en 2021.
Ainsi, les pays arabes affichent-ils aujourd’hui leurs ambitions. Et l’industrie européenne serait bien placée, si l’on en croit Eric Truelle, directeur commercial Satellites de télécommunications au Moyen-Orient et en Afrique chez Airbus Defence and Space. « C’est par le respect et la confiance que nous nous différencions de nos concurrents américains », assurait-il, faisant allusion à une certaine souplesse ou flexibilité pouvant entourer l’exécution des contrats.
Par exemple, « en cas de retard ou de risque de retard, expliquait-il, on arrive toujours à traiter à l’amiable ». « En quarante ans, ajoutait Florent d’Heilly, directeur de la division Ventes chez Arianespace, on n’a jamais eu de litige ».
Décoller en constituant une Équipe de France à l’export
La coopération avec les autorités locales, notamment les agences spatiales dans les pays arabes, et entre opérateurs françaises est cruciale. « Certes, il nous arrive d’être concurrents, mais nous savons aussi quand c’est nécessaire constituer une Équipe de France à l’export », se félicitait Frédéric Facquer, directeur Ventes et marketing Moyen-Orient de Thales Alenia Space, filiale de Thales (67 %) et Leonardo (33 %).
Ainsi, c’est à la faveur d’un partenariat entre Airbus et Thales que l’Égypte est devenue le premier pays africain, en 1998, à disposer de son propre satellite de diffusion directe de télévision, le Nilesat 101. Les deux groupes ont aussi livré ensemble des satellites militaires au pays des pharaons et ce dernier achète aussi des Rafale à la France. De façon générale, les relations entre Le Caire et Paris, économiques et politiques, sont intenses, comme le montre le bon bilan du voyage en Égypte d’Emmanuel Macron, en janvier dernier.
Autre exemple de cette coopération, la gamme des satellites Arabsat pour l’Organisation arabe des satellites de communication et, récemment, les satellites de reconnaissance optiques Falcon Eye pour les Émirats arabes unis, dans les deux cas lancés par Arianespace.
Les ambitions de l’Arabie saoudite et du Maroc
Les Émirats arabes unis ne sont pas seuls à afficher de grandes ambitions. L’Arabie saoudite, qui s’est dotée à la fin de l’an dernier, d’une agence spatiale veut produire et participer aux projets industriels futurs.
Il en est de même du Maroc, qui, après avoir fait de l’aéronautique et de l’automobile les moteurs de son développement, cherche à se diversifier. En 2018, le Royaume chérifien disposait dans l’espace de deux satellites d’observation, Mohammed VI-A et Mohammed VI-B, lancés par Arianespace du centre spatial de Kourou, en Guyane.
Du 24 au 26 avril dernier, Marrakech recevait la Conférence globale sur l’espace dans les pays émergents (Global Conference on Space For Emerging Countries ou GLEC). L’occasion pour Rabat de réitérer son ambition. Mais aussi pour de nombreuses capitales d’appeler au partenariat pour accéder aux technologies modernes, former leurs ressources humaines et disposer de moyens financiers suffisants.
À l’avenir, c’est par le partenariat et la contribution à l’industrialisation des pays clients que les affaires vont s’envoler. L’industrie spatiale figure dorénavant sur la feuille de route des pays arabes.
François Pargny