Karel De Gucht
réussira-t-il là où son prédécésseur avait échoué? Le Commissaire au Commerce
semblait marcher sur des oeufs lors de la présentation de son plan de révision
des instruments de défense commerciale de l’UE, mercredi 10 avril à Bruxelles.
La dernière modification de l’arsenal européen remonte à 1995, le projet de
réforme de Lord Mandelson n’ayant pas abouti en 2008. «Lord Mandelson voulait
raser les instruments de défense commerciale, il voulait libéraliser autant que
possible. Moi je m’inscris dans la philosophie présente de ces instruments. Je
pense qu’il est nécessaire de les avoir, mais il faut les adapter ».
Un plan tant pour protéger les producteurs européens, que pour garantir aux
importateurs une prévisibilité accrue
Décrit pas
l’exécutif européen comme « pragmatique et équilibré » ce plan vise à
améliorer l’efficacité des instruments de défense commerciale au profit de tous
les acteurs. Il est donc conçu, tant pour protéger les producteurs européens
contre les pratiques déloyales des pays tiers, que pour garantir aux
importateurs une prévisibilité accrue en ce qui concerne la modification des
taux de droits.
Le plan de la Commission propose ainsi de réduire l’incertitude
à laquelle ces derniers sont confrontés en garantissant qu’ils soient informés,
deux semaines à l’avance, de l’application ou non de mesures antidumping ou
anti-subventions. Autre geste vis-à-vis des importateurs : la modification des
procédures, actuellement en vigueur, lorsqu’une enquête est menée pour
déterminer si une mesure doit être étendue après sa période normale d’expiration.
Selon le système actuel, les droits continuent d’être versés au cours de cette
période d’examen. Karel De Gucht propose qu’à l’avenir, ils soient reversés à
l’importateur si l’enquête conclut que les mesures de défense n’ont pas lieu
d’être étendues au delà de la période de cinq ans.
Le paquet vise
aussi à mieux protéger les entreprises européennes. La Commission pourra ainsi,
de son propre chef, ouvrir des enquêtes sans qu’une demande formelle ait été
introduite par l’industrie. La mesure permettra aux entreprises de coopérer
sans courir le risque de représailles de la part de certains partenaires de
l’UE, comme ce fut plusieurs fois le cas avec la Chine.
Enfin, la Commission veut
dissuader les partenaires commerciaux de l’UE de se livrer à des pratiques
commerciales déloyales, notamment en subventionant leurs exportations. Dans de
tels cas, l’UE renoncerait à la règle du
« du droit moindre », c’est à dire le niveau de droit
considéré comme suffisant pour éliminer le préjudice causé à l’industrie
européenne, mais qui est inférieur à la marge de subvention sur le produit
concerné. En vertu des règles de l’OMC, l’UE s’autorisera dès lors à appliquer
des droits additionnels égaux à la marge du dumping ou de la subvention.
Adoptée le 10 avril par la
Commission, la proposition législative doit désormais être approuvée par les
deux organes co-décideurs, le Conseil et le Parlement. Sans obstacles majeurs,
elle pourrait avoir force de loi « courant 2014 », pronostique-t-on à
Bruxelles. Résultat d’une réflexion entamée il y a près de 18 mois, fruit,
aussi, d’une consultation publique, elle permettra de mettre à jour – pour la
première fois en 18 ans- les règles de défense de l’UE dans la sphère
commerciale.
Kattalin Landaburu à Bruxelles
