Pour sortir du tout pétrole et encourager l’industrie légère, le Kazakhstan s’est doté d’un nouveau guichet unique pour l’investissement, Kazakh Invest. La principale innovation par rapport à l’ancienne structure est que cette agence ne sera pas seulement compétente en matière de promotion, mais aussi de soutien et de suivi des entreprises. « Il nous faut non seulement accueillir les primo-investisseurs, mais aussi suivre et aider les opérateurs déjà investis sur place », soulignait un membre français du Conseil de direction de Kazakh Invest, François Bernard, ancien représentant en France d’Invest Turkey, lors des 5e Rencontres Kazakhstan, à Business France, le 18 avril.
François Bernard n’est pas le seul ancien responsable d’Invest in Turkey à rejoindre Kazakh Invest, puisque, dans le Conseil de direction de l’organisme kazakh, figure aussi le Suisso-turc Alpaslan Korkmaz, qui pilota Invest in Turkey de 2006 à 2010, après avoir dirigé l’Agence de promotion de l’investissement de l’État de Neuchâtel en Suisse et occupé la fonction de vice-président de la Fédération des agences de promotion de l’investissement de la Suisse occidentale (DEWS) de 2002 à 2006.
Une stratégie nationale d’investissement avec la Banque mondiale
D’après nos informations, les premiers représentants de la nouvelle structure à l’étranger, tous des experts indépendants, seraient choisis dans les semaines, voire dans les jours qui viennent pour les tout premiers, dont en France. Preuve de l’importance que le gouvernement accorde à ce nouvel instrument pour attirer les entreprises internationales, Kazakh Invest est présidé par le Premier ministre, Bakhytzhan Saguintaïev, et pas moins de six ministres en font partie.
D’après le ministère des Investissements et du développement, « les investisseurs seront en mesure de contacter les ministres, voire le chef du gouvernement, pour leur soumettre directement leurs propositions de contrats ». De source sûre, la Lettre confidentielle a appris que Kazakh Invest travaille avec la Banque mondiale à l’établissement de la stratégie nationale d’investissement. Un axe clé, correspondant à la nécessaire diversification de l’économie, devrait en être la filière agroalimentaire. Le développement agricole figure parmi les priorités du président Nazarbaïev, à côté de « la 3e modernisation du pays » qui doit le mener à « la compétitivité mondiale », le développement des technologies, l’amélioration de l’environnement des affaires, la stabilité macro-économique, l’amélioration de la qualité du capital humain, la transformation institutionnelle et la lutte contre la corruption.
Selon Ronan Venetz, chef des Services économique en Asie centrale, « le potentiel agricole est immense. Seuls 92 millions d’hectares de terres agricoles sont exploités sur un potentiel de 217 millions ». Or, le pays dispose d’un réseau hydrographique très étoffé, avec les rivières Ily et Syrdaria au sud, la Volga et l’Oural à l’ouest, l’Irtysh à l’est et au nord, le Tobol, la Nura et l’Ishym. En outre, depuis l’effondrement du système des kolkhozes-sovkhozes dans les années quatre-vingt-dix, le Kazakhstan a entrepris une réorganisation ambitieuse du secteur agricole qui nécessite d’importants investissements. Un secteur où la France, au 3e rang des investissements directs étrangers, avec 12,8 milliards de dollars, derrière les Pays-Bas (60,8 milliards) et les États-Unis (23 milliards), peut faire valoir son savoir-faire.
Kazakh Invest compétent pour l’export des investisseurs étrangers
L’an dernier, Lactalis a bénéficié dans le pays d’un prêt de 15 millions d’euros de la part de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (Berd). Mais les investissements directs français restent avant tout marqués par l’empreinte du groupe d’hydrocarbures Total, impliqué notamment dans le champ « super géant » de Kashagan en mer Caspienne, entrée en production en octobre 2016 et qui pourrait produire 370 000 barils de pétrole par jour d’ici fin 2017.
A la tête du consortium Tengichevroil (TCO), l’américain Chevron a, pour sa part, annoncé un investissement colossal, le plus important de la décennie pour un projet privé dans le secteur pétrolier, soit 36,8 milliards de dollars, pour augmenter la production de brut du champ gazier de Tengiz de 260 000 barils par jour. Soit une hausse des volumes de 44 %.
Aujourd’hui, les hydrocarbures contribuent à 20 % du produit intérieur brut et 60 % des exportations. C’est dire le travail qui attend Kazakh Invest pour diversifier l’économie. L’agence a obtenu d’être séparée de Kazakh Export, l’organisme en charge des exportations. D’après les informations recueillies par la LC, il est prévu, toutefois, que Kazakh Invest conserve la compétence à l’export quand il s’agit d’investisseurs étrangers. Pour une bonne articulation, un bureau de liaison serait créé avec Kazakh Export.
François Pargny
Pour en savoir plus : http://invest.gov.kz/